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Les MCR gagnent du terrain

La vigne - n°164 - avril 2005 - page 0

Les moûts concentrés rectifiés (MCR) sont plus faciles à utiliser que le sucre. Ils séduisent des caves coopératives et particulières dans des régions où la chaptalisation est autorisée.

Après avoir mené des essais en 2002 et en 2003, la coopérative d'Igé (Saône-et-Loire) a enrichi, en 2004, ses 20 000 hl de vins avec des moûts concentrés rectifiés (MCR). ' Nous avons commencé par les blancs, puis les rouges. En trois ans, nous avons été rassurés, nous n'avons constaté aucune différence qualitative. Les moûts concentrés rectifiés sont des produits technologiques tout à fait neutres ', affirme Gilles Charlot, le maître de chai.
La principale différence se situe au niveau de la mise en oeuvre. ' Nous stockons les MCR dans une cuve installée en hauteur. Nous envoyons, par gravité, le volume nécessaire dans une cuve graduée de 20 hl. Nous n'avons plus qu'à pomper cette dose de MCR dans la cuve à enrichir, et à réaliser un remontage pour bien mélanger. Avec du sucre en sacs de 50 kg, il fallait deux personnes à temps plein pour chaptaliser. Avec les MCR, une seule personne à mi-temps suffit. '
Manipuler de grandes quantités de sucre n'est pas évident. La législation impose désormais de mettre deux personnes à un poste de travail où il faut déplacer, de manière répétitive, des sacs de plus de 30 kg. Les emballages doivent être stockés et éliminés dans une filière de recyclage. Les big-bag, ces sacs de 1 000 l, rendent la tâche moins pénible, mais ils ne peuvent pas être fractionnés. A l'opposé, les MCR se pompent sans problème avec du matériel de cave classique. Ils ne sont pas plus pâteux que les lies.

Par ailleurs, deux liquides se mélangent plus facilement qu'un liquide et un solide. ' Pour le sucre, nous utilisons un mélangeur de 15 hl, dans lequel nous faisons passer du vin. En Alsace, nos moûts sont froids. Le sucre ne s'y dissout pas facilement. Avec les moûts concentrés rectifiés, nous avons divisé le temps de travail par deux ', souligne Lilian Andriuzzi, oenologue et responsable technique de la coopérative de Traenheim (Bas-Rhin), qui vinifie 65 000 hl.
Il a commencé à tester les MCR il y a quatre ans. Aujourd'hui, il les utilise pratiquement sur tous les vins, rouges et grands crus mis à part. ' Pour optimiser les coûts de transport, je commande des citernes complètes à la Gardonnenque (Gard). J'ajuste en chaptalisant une petite partie des vins avec du sucre, ce qui m'évite d'avoir à conserver des stocks de MCR d'une année sur l'autre. ' A l'achat, les MCR reviennent quatre à cinq fois plus cher que le sucre de betteraves, à pouvoir sucrant équivalent. Pour compenser le surcoût, il faut demander une aide européenne à l'enrichissement. Celle-ci couvre environ les trois quarts du prix d'achat. ' Compte tenu des économies de main-d'oeuvre, l'enrichissement aux MCR nous coûte trois fois moins cher que la chaptalisation. Ce n'est pas neutre au niveau de la rémunération des adhérents. Nous avons pu réduire les retenues pour frais de chaptalisation ', souligne Gilles Charlot.
Pour obtenir cette aide, il faut se plier à des procédures rigoureuses. Il faut également avoir une trésorerie suffisante pour avancer l'argent durant plusieurs mois. Ces obstacles découragent un certain nombre de caves. D'autres se lancent et ouvrent la voie. Mais bousculer les habitudes n'est pas toujours facile ! Pour lever les réticences, certaines caves ont dû se regrouper et organiser une réunion préalable avec les administrations régionales concernées.

' En Beaujolais, il n'y a qu'un seul laboratoire agréé Cofrac. Il n'était pas organisé pour analyser des moûts concentrés rectifiés, n'ayant jamais eu à le réaliser. La première année, nous avons dû envoyer nos échantillons à Nîmes (Gard) ', raconte Michaël Lachaud, maître de chai à la coopérative du Bois-d'Oingt, (Rhône). ' Maintenant, la procédure est calée avec notre laboratoire et avec la délégation régionale de l'Onivins, où une personne a pris en charge les dossiers et nous aide à les remplir. Cela va beaucoup mieux qu'au début. '
Les caves, déjà bien organisées dans le cadre de la traçabilité ou de l'assurance qualité, ont plus de facilité à mettre en oeuvre les procédures d'enregistrement.

Mais même avec une bonne organisation, il subsiste des risques d'erreur, qui se traduisent par des retenues sur le montant de l'aide. ' J'ai oublié de noter l'heure d'enrichissement de deux cuves. L'aide a été réduite de 5 % pour ces dernières ', raconte un utilisateur. ' J'avais enrichi les cuves dans un ordre différent de celui des numéros. J'ai eu une petite amende qui ne m'a pas découragé. Mais il y a des caves qui ont perdu plusieurs milliers d'euros sur l'aide et qui ont renoncé ', raconte un autre.
' Pour éviter les problèmes, je me suis informé auprès de l'Onivins. Ensuite, j'ai téléphoné pour suivre mon dossier ', commente Eric Steinger, maître de chai du domaine Louis Moreau, dans l'Yonne. En 2004, il a utilisé les MCR pour enrichir 1 000 hl de chablis. ' Techniquement, nous avons obtenu de bons résultats. Mais avant d'aller plus loin, nous attendons de voir ce que nous allons toucher comme aide. Pour 1 000 hl, nous avons dû remplir un dossier de 25 pages. Si nous pouvions acheter directement les MCR au prix du sucre, je crois que nous serions beaucoup plus nombreux à les utiliser ! '



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