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Les Abruzzes : une diversité de vins italiens

La vigne - n°165 - mai 2005 - page 0

Deux cépages, le montepulciano et le trebbiano, occupent à eux seuls 80 % du vignoble des Abruzzes. Malgré cela, les caves proposent une grande variété de vins. Elles tirent partie de la diversité des terroirs et multiplient les modes de vinification.

Les Abruzzes se situent à la latitude de Rome, entre les glaciers des Apennins et les plages adriatiques. Dans cette région, la vigne couvre 38 500 ha, soit 5,6 % du vignoble italien. Elle fournit entre 3,5 et 4 Mhl par an, dont 70 % de vins de table, 25 % de dénominations d'origine (DOC et DOCG) et 5 % de vins de pays (IGT).
Deux choses surprennent le visiteur : la forte proportion de vignes en pente et la gamme de vins proposée par les caves. ' Le gel de printemps, la difficulté de trouver de la main-d'oeuvre pour travailler dans nos parcelles escarpées et dispersées ne nous facilitent pas la tâche ', déplore Nicola Pietrantonj, qui possède 45 ha sur la montagne et achète du raisin à une centaine de voisins. Pourtant, personne ne songe à jeter l'éponge. Les 30 000 vignerons déclarés n'ont pas cédé aux primes à l'arrachage. Depuis 1990, ils ont même agrandi le vignoble de 5 000 ha. ' Pas question d'arrêter : la viticulture représente 27 % de l'activité agricole de notre région ', proclame-t-il.
Un cépage rouge local, le montepulciano, couvre la moitié du vignoble. Il se vend 50 à 70 euros le quintal, selon la qualité. C'est une variété très tardive, qui se vendange jusque début novembre. Le trebbiano abruzzese, un blanc, occupe un tiers des surfaces. Sa récolte se termine vers le 10 octobre. Le reste est planté de variétés locales ou d'origine française.

Les Abruzzes produisent une grande diversité de vins. Nicola Pietrantonj compte quinze étiquettes à son tarif. La coopérative Citra et l'indépendant Franco d'Eusanio de Chiusa Grande, producteur de vins bio et casher, en proposent chacun une vingtaine. Farnèse, l'un des plus grands acheteurs de raisin, a bâti une gamme encore plus large avec près de trente vins ! D'où vient cette diversité ? Du terroir qui, de la plage à la montagne, permet d'obtenir des raisins différents. Du savoir-faire et de l'imagination des vignerons aussi.
Toutes les caves ont au moins une référence de Montepulciano d'Abruzzo DOC. Ce vin représente les trois quarts de la production sous appellation. Il est obtenu à partir du montepulciano, auquel les vignerons peuvent ajouter du sangiovese ou d'autres cépages rouges locaux dans la limite de 15 %. Les caves proposent aussi du Trebbiano d'Abruzzo DOC, un blanc issu du trebbiano abruzzese, à assembler avec d'autres cépages locaux dans la limite de 15 %. Le Montepulciano d'Abruzzo Colline Teramane représente le premier exemple d'une segmentation en microterroirs valorisée en DOCG. Elle existe depuis 2002 et représente seulement 1 % des volumes produits. L'identification et la valorisation de zones spécifiques va se poursuivre avec d'autres DOCG, ce qui étendra encore la gamme des vins de la région des Abruzzes.
' Avec les mêmes cépages que le rouge et une macération de douze heures à 8°C, nous obtenons un rosé intense, le Cerasuolo DOC , explique Massimo Zuccarini, responsable des ventes de Casal Thaulero, la marque haut de gamme de la coopérative Citra. Ce rosé est un vin pour les jeunes. C'est une alternative à la bière, qui accompagne très bien les pizzas. La Hollande a découvert nos vins grâce à ce rosé. '

Certifiée Iso 9002, Citra est l'une des trente trois coopératives de la région. Elle compte 4 200 adhérents et produit 150 000 hl par an. Les coopératives vinifient 80 % de la récolte des Abruzzes. C'est le plus fort taux d'Italie. ' Nous mettons en bouteilles 25 % avec une chaîne qui tourne à 20 000 cols par heure. Nous exportons 55 % vers les Etats-Unis, l'Allemagne, l'Asie... ', poursuit Massimo Zuccarini.
Controguerra est l'autre appellation des Abruzzes (nord). Elle se décline en rouge, blanc, novello (vin nouveau obtenu par macération carbonique), en pétillant, en effervescent et en vin de paille, le passito blanc et rouge. Ce passito rosso est un étonnant vin de dessert. Comme le blanc, il est obtenu à partir de raisins passerillés dans des locaux bien ventilés, puis pressés en hiver.
Bien des débats portent sur l'élevage en fûts. ' Les Français nous ont appris qu'il faut mettre le vin dans du bois, et non du bois dans le vin ! ' plaisante Nicola Pietrantonj, qui travaille avec l'une de ses filles, Roberta, pendant que l'autre termine une thèse sur la vinification. Pas de bois neuf chez lui : il utilise des foudres en noyer datant de 1884, surtout pour une micro-oxygénation. Massimo Zuccarini partage son point de vue : ' La mode du bois passera. Notre règle est d'élaborer nos vins en fonction de la cuisine des Abruzzes. ' En respectant ce principe, il satisfait la demande locale. Il suit aussi les principes qui gouvernent la politique de promotion de sa région. Celle-ci vend un package incluant vins, gastronomie et tourisme vert. Les vins font connaître le territoire, et réciproquement.
Les Abruzzes expédient à l'étranger 10 % de leur production. Champion des exportations, Camillo de Iuliis possédait trois restaurants en Angleterre et rêvait de rentrer dans ses terres natales pour ' créer une étiquette : Farnese, le nom d'un pape '.

Aujourd'hui, à 75 ans, il exporte 90 % des 10 millions de cols qu'il produit chaque année, vendus de 20 à 30 euros en oenothèque. Vigneron sans terres, ' car c'est inutile et très cher d'acheter des vignes '. Il paie le raisin ' à l'hectare, et non au kilo. C'est l'unique moyen pour que le producteur fasse de la qualité. Je paie environ 10 000 euros/ha, sur 350 ha '. Sa création haut de gamme Edizione Cinque Autoctoni est un vin de table à 14°, associant cinq cépages autochtones italiens. ' Le vin est comme un diamant : plus il a de facettes, plus il est beau. Sans créativité, pas d'identité ! '

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