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Un sujet monté en épingle par les médias

La vigne - n°166 - juin 2005 - page 0

La presse grand public fait régulièrement des pesticides ses choux gras. A l'aide de titres chocs, elle n'hésite pas à exagérer la portée des résultats des études scientifiques. L'objectif est simple : faire du sensationnel.

Pesticides, nos enfants sont en danger titre l'hebdomadaire VSD fin janvier 2004. L'enquête démarre sur une double page illustrée. On y voit un pulvérisateur qui épand des produits phytosanitaires dans une parcelle. Au dessus, un couple pose au milieu des vignes avec ses jumeaux. La légende nous apprend que les deux petits garçons sont atteints de graves anomalies de l'appareil génital. L'article affirme que dans le Languedoc-Roussillon, le nombre de malformations sexuelles chez les nouveaux-nés ne cesse d'augmenter. Le professeur Charles Sultan, responsable du service d'endocrinologie et de gynécologie pédiatrique au CHU de Montpellier, en est intimement convaincu : c'est la faute aux pesticides ! Il n'a cessé de le répéter dans tous les médias. A la demande de la Direction générale de la santé, l'Institut national de veille sanitaire s'est penché sur le dossier. En octobre 2004, il rendait ses conclusions : ' Le taux de malformations congénitales du petit garçon, opérées en Languedoc-Roussillon, est comparable à la moyenne nationale . ' Il ajoute : ' D'autres hypothèses peuvent être envisagées pour expliquer l'augmentation du nombre de cas signalés entre 1998 et 2000 au CHU de Montpellier, comme des variations locales de l'offre de soins et de pratiques chirurgicales, ou la notoriété croissante du service d'endocrinologie pédiatrique de cet hôpital . '

Autre étude qui a fait couler beaucoup d'encre dernièrement : celle de l'équipe du professeur Gilles-Eric Séralini, de l'université de Caen (Calvados). Elle fait suite à une enquête épidémiologique américaine, montrant que le taux de fausses couches et de naissances prématurées est de 1,5 à 2 fois supérieur chez les couples d'agriculteurs qui manipulent le glyphosate. Pour comprendre le phénomène, les chercheurs ont appliqué des doses de glyphosate à des concentrations bien inférieures aux usages agricoles sur des cellules de placenta humaines. Ces dernières se sont montrées extrêmement sensibles. A des concentrations encore plus faibles, le glyphosate a perturbé le système endocrinien. Le Roundup s'est avéré encore plus toxique que la matière active seule. L'étude a été reprise dans le quotidien Le Monde du 12 mars 2005, sous le titre : Le Roundup n'intoxique pas que les mauvaises herbes . La Commission des toxiques et la firme Monsanto contestent l'interprétation des résultats. ' La conclusion sur le danger doit considérer les résultats de l'ensemble des études disponibles. De plus, il faut prendre en compte l'exposition réelle de l'applicateur ', déclare Thierry Mercier, de la Commission des toxiques. A lire ces articles, on pourrait croire à une catastrophe sanitaire. Pourtant, il n'en est rien. Les agriculteurs ont une espérance de vie supérieure au reste de la population. Et pour l'instant, il existe peu de certitudes quant à l'impact des pesticides sur leur santé. Mais il est clair que les phytos ne sont pas anodins. Oui, ils peuvent créer des intoxications. Oui, ils peuvent avoir des effets à long terme. Il faut s'en protéger. Mais avant de créer une psychose, il faut améliorer les connaissances sur les risques liés à leur utilisation.

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