Le troisième président des Etats-Unis affectionnait la viticulture. Il était persuadé qu'il fallait encourager la consommation de vin pour lutter contre l'alcoolisme.
Thomas Jefferson, le troisième président des Etats-Unis d'Amérique, est un homme hors du commun. Né en 1743, en Virginie, d'un père riche propriétaire terrien et d'une mère issue d'une famille prestigieuse, il reçoit ' une éducation raffinée '. Il est familier des philosophes et des auteurs classiques, amateur d'art et d'architecture, et passionné de sciences.
Il s'installe en 1772 à Monticello, un domaine de 2 000 ha qui restera toute sa vie ' son port d'attache '. Agriculteur, inventeur, scientifique, philosophe et homme d'Etat, il a des centres d'intérêts très variés. Parfois, ses multiples facettes sont contradictoires. Comme auteur de la déclaration d'indépendance de 1776, il condamne l'esclavage qu'il pratique pourtant chez lui.
De 1784 à 1789, il succède à Benjamin Franklin comme ministre des Etats-Unis auprès de la cour de Versailles. Il est chargé de négocier des traités de commerce avec les puissances européennes. Il en profite pour s'instruire.
En 1787 et 1788, il parcourt la France, l'Italie du Nord et l'Allemagne. Dans ses carnets de voyage, il note les méthodes de culture et l'organisation de la société rurale dans le but d'être utile à l'agriculture de son pays.
Il affectionne particulièrement la viticulture. Lorsqu'il visite un vignoble, il s'attache à connaître la hiérarchie des crus. Il s'intéresse aux techniques de production. Il relève les modes de plantation, le nombre et le type de façons données à la vigne, etc. Il s'instruit des prix de revient et de rentabilité. Il note avec soin les crus, les millésimes fameux, le nom des propriétaires, les tarifs, les moyens et les prix de transport, la valeur ajoutée liée au vieillissement.
Epicurien et fin gourmet, Thomas Jefferson est l'un des connaisseurs de vins les plus avertis de son époque. Il est aussi un client de rêve. ' La qualité d'abord, le prix ensuite ', écrit-il à l'un de ses fournisseurs bourguignons. Durant son séjour en France, il déguste et classe plus de 200 vins de différentes régions. Dans le Bordelais, il s'inspire d'un classement établi en 1776. Il confirme que quatre crus sont bien de première qualité : château Haut-Brion, château Latour, château Lafite et château Margaux. Il distingue des vins de ' seconde qualité ' et de ' troisième classe '. Il apprécie les vins de Sauternes, de Champagne, du coteau de l'Hermitage, mais aussi les grands bourgognes. Il apprécie également les vins ' très bon marché ' du Languedoc et du Roussillon, notamment ceux de Saint-Georges-d'Orques, près de Montpellier.
A son retour, il importe pendant de nombreuses années du vin français. Il conseille ses compatriotes dans leurs achats. Il tentera sans succès de cultiver la vigne en Virginie.
Thomas Jefferson devient président des Etats-Unis en 1801, et le reste jusqu'en 1809. Il est persuadé que le vin est le meilleur moyen de lutter contre l'alcoolisme. Aussi réduit-il les taxes à l'importation pour favoriser sa consommation aux dépens du whisky.
Sa vision de la société est fondée sur le travail de la terre et les valeurs rurales. ' Je pense que nos gouvernements demeureront vertueux aussi longtemps qu'ils demeureront fondés sur l'agriculture. Mais quand viendra, comme en Europe, l'entassement dans les grandes villes, alors, comme en Europe, les gouvernements deviendront corrompus ', précise-t-il. Ce francophile est persuadé que ' tout homme cultivé a deux pays : le sien et la France '.
Il meurt le 4 juillet 1826 à l'âge de 83 ans, le jour du cinquantenaire de la déclaration d'indépendance.
BIBLIO
'Thomas Jefferson', de Claude Fohlen.
'Thomas Jefferson à Bordeaux', de Bernard Ginestet.
'La Viticulture de l'Europe occidentale à la veille de la Révolution française, d'après les notes de voyage de Thomas Jefferson', de Gaston Galtier.