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L'extraction électrique

La vigne - n°167 - juillet 2005 - page 0

L'Institut du vin de Fribourg, en Allemagne, teste l'électroporation sur la vendange. Il obtient une extraction de la couleur, des tanins et des arômes aussi bonne qu'avec les méthodes traditionnelles.

L'électroporation soumet le raisin à des impulsions électriques de courte durée. Elle provoque ' l'ouverture ' des membranes des cellules et la libération d'un maximum de leurs composants. Dans le programme d'essais sur du pinot noir et du riesling, mené depuis 2001 par l'Institut du vin de Fribourg, la vendange manuelle et éraflée est pompée à l'intérieur d'un tuyau de dix centimètres de diamètre. Elle passe entre deux électrodes qui émettent quinze impulsions par seconde. Un champ électrique d'environ 25 kilovolts/cm est ainsi créé. ' L'appareil est réglé pour laisser les pépins intacts. L'objectif est de toucher la chair et la peau des baies pour en libérer naturellement - et en fonction du cépage - de la couleur, des tanins et des arômes primaires, ou leurs précurseurs ' , explique Jürgen Sigler, responsable du département oenologie à l'Institut du vin de Fribourg (Allemagne).
Le pinot noir a fait l'objet de microvinifications en 2001 et 2003. La vendange titrait 13°1 d'alcool probable la première année, et 14° la seconde. Les deux années, les Allemands ont comparé l'électroporation au chauffage de la vendange, car ' les deux techniques ont un effet similaire '. Dans le cas de la thermovinification, la vendange est portée à 80°C pendant une à deux minutes. On la refroidit dans la foulée, puis elle macère pendant une nuit. Elle est pressurée. Le jus est débourbé statiquement. La fermentation se déroule à 20°C. Elle dure de cinq à sept jours. Le raisin traité par électroporation est vinifié en phase liquide après une nuit de macération.

Entre les deux années, un réglage fin de l'appareil a permis d'obtenir des valeurs comparables en tanins et en acidité, sur le moût comme sur le vin. ' Les deux vins sont fruités, souples, à consommer rapidement. Lors de la dégustation, ils étaient très proches l'un de l'autre ', indique Jürgen Sigler. En 2004, des essais ont été réalisés en grand volume. Ces résultats ne sont pas encore disponibles.
En blanc, les essais ont concerné un riesling 2002 titrant 11° d'alcool probable. Les expérimentateurs ont comparé trois modalités : le pressurage direct des raisins entiers, la macération pelliculaire et la macération précédée d'un traitement à l'électroporation. Dans les deux derniers cas, la macération a duré une nuit. Après débourbage statique, les vins ont fermenté en cinq jours à 19°C. Le moût issu d'électroporation présentait plus de bourbes, mais cela semble lié au réglage de l'appareil. Son acidité totale était moindre. Il était le plus riche en tanins. Cependant, dans le vin, ces différences se sont atténuées.
Les écarts les plus nets sont apparus dans le domaine des arômes. Le vin issu d'électroporation est nettement plus riche en linalol, nérol et géraniol que les deux autres. Ces trois substances rappellent la rose. Pour Jürgen Sigler, c'est signe que ' l'électroporation améliore l'extraction des arômes en blanc. Les vins sont aussi plus gras et plus ronds. Ils ont été mieux notés lors de la dégustation, qui a eu lieu six mois après la mise en bouteilles. Mais le témoin issu de pressurage direct affichait un goût de vieillissement atypique. Le vin issu d'électroporation y a échappé, sans doute parce que la technique a favorisé une plus grande disponibilité en azote. '
Les essais se poursuivront encore plusieurs années. En 2005, il s'agira de voir dans quelle mesure l'électroporation peut être complémentaire de la macération à froid du pinot noir. En blancs comme en rouges, l'une des idées est de se passer d'enzymes. Pour Jürgen Sigler, elle a le potentiel pour devenir une alternative aux techniques traditionnelles de macération ou de chauffage : elle est qualitative et économe en énergie. Son brevetage est en cours. L'objectif est de la faire inscrire au catalogue des procédés oenologiques autorisés.

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