Le bouchon synthétique Nomacorc et la capsule à vis Stelvin surclassent tous les bouchons en liège auxquels Inter-Rhône les a comparés. Pour des rotations de moins de dix-huit mois, le synthétique Intégra se place également bien.
En mars 2003, l'Institut rhodanien embouteille un côtes-du-rhône rouge et un tavel rosé du millésime 2002, avec huit systèmes de bouchage différents, à base de liège, synthétiques ou à vis. Les bouchons retenus sont : un naturel colmaté de 3 e catégorie ; un aggloméré ; l'Oméga (un technique à base de granulés de liège), tous trois de Bourrassé ; le Twintop d'Amorim (composite avec deux rondelles) ; le Nomacorc (synthétique co-extrudé) ; le Tage de Novembal (synthétique injecté moulé) ; l'Intégra de Pack Services (synthétique co-extrudé) ; la Stelvin d'Alcan, anciennement Péchiney (capsule à vis). Depuis cette date, l'institut stocke la moitié des bouteilles debout, l'autre couchée.
Les premiers résultats (voir La Vigne n° 157, septembre 2004) ont montré que l'aggloméré et l'Oméga provoquent des goûts de moisi au-delà de trois mois de conservation. Dès six mois, le Tage décroche à son tour en donnant au vin des notes d'évolution. Deux ans après la mise, ces bouchons posent toujours des problèmes. ' L'aggloméré est déconseillé dès que le metteur en bouteilles n'est pas sûr que son vin sera bu dans le mois qui suit l'embouteillage ', rappelle Stéphane Vidal, en charge de l'étude. Quant au Tage, ' il doit être réservé à des rotations rapides, qui n'excèdent pas six mois. '
Entre douze et dix-huit mois, l'Intégra décroche à son tour. Des notes de fruits dégradés apparaissent dans les jugements des dégustateurs après douze mois de conservation pour le rosé, après dix-huit mois pour le rouge. Ce n'est pas étonnant, car Intégra est l'un des bouchons qui conserve le moins le SO 2 libre, avec l'agglo et le Tage. Au bout de deux ans, sur le rosé en position debout, il n'assure plus une teneur en SO 2 libre suffisante (moins de 10 mg/l). De même, avec l'agglo et le Tage, il constitue une barrière à l'air moins efficace que les autres bouchons, car il conserve moins bien le CO 2 dissous.
Dès dix-huit mois, le naturel colmaté commence à poser des problèmes. Un dégustateur sur deux cite un défaut lors de la dégustation, en particulier des goûts de moisi ou de bouchon. L'apparition des goûts de moisi n'est pas liée à la présence d'une forte quantité de trichloroanisoles (TCA), d'après les analyses de l'Institut rhodanien. Ces molécules responsables des goûts dits de bouchon restent en-dessous de leur seuil de perception (5 ng/l) : les vins rouges conservés deux ans dans une bouteille debout fermée par un agglo n'en contiennent que 3,6 ng/l, alors qu'ils sont fortement marqués par cette déviation. Même chose sur le vin rosé. A dix-huit mois, le maximum de TCA dosé dans la bouteille couchée de vin rosé, fermée par un colmaté, était de 4 ng/l.
Pour Stéphane Vidal, l'apparition de goûts de moisi avec ces faibles teneurs peut être liée à une grande sensibilité des vins issus d'un millésime difficile. ' La qualité des bouchons d'un même lot semble hétérogène , relève-t-il. L'utilisation de tels bouchons en liège naturel doit être suspendue à une analyse rigoureuse des lots garantissant un taux de TCA extractible inférieur à 2 ng/l. '
Concernant les paramètres analytiques qui donnent des indications sur l'évolution oxydative du vin (acidité volatile, SO 2 libre et total, CO 2 dissous et DO 420), le naturel colmaté se place à peu près comme l'Intégra. Jusqu'à dix-huit mois, il garantit encore du fruit frais dans les vins rouges. Au bout de deux ans, il décroche.
Dans le trio de tête des bouchons préservant mieux le goût du vin arrive le Twintop, avec 30 % des dégustateurs trouvant des défauts. ' Il présente les meilleures performances de tous les bouchons à base de liège testés ', reconnaît Stéphane Vidal. Il conserve bien le SO 2 libre et total ou le CO2 dissous. ' Mais il communique différents types de goût au vin ', même s'il ne s'agit pas de goûts de bouchon à proprement parler. Stéphane Vidal recommande de prendre les mêmes garanties que pour le liège naturel.
Surclassant tous les autres, le Le Nomacorc et la Stelvin influent le moins sur le goût du vin. Seulement 20 % des dégustateurs trouvent qu'ils confèrent un défaut après vingt-quatre mois. Ce résultat peut paraître élevé. Mais ' il est lié au fait que l'on demande aux dégustateurs de chercher des défauts , estime Stéphane Vidal. Dans ces conditions, ils en trouvent toujours. ' Stéphane Vidal considère que ce taux est un bruit de fond. Il peut aussi être lié aux caractéristiques initiales du vin. Le Nomacorc présente toutefois un inconvénient, déjà signalé après un an d'étude : la force nécessaire pour l'extraire dépasse la limite du confort au débouchage au-delà d'un an de conservation. L'ouverture risque d'être difficile. Mais pour Stéphane Vidal, ' il représente une alternative sûre aux bouchons à base de liège pour des rotations d'environ deux ans. '
Quant à la capsule, elle n'a pas causé de réduction du vin. Mieux, elle préserve les notes de fruit frais plus longtemps que les autres bouchons. Dans les rouges, les dégustateurs citent plus fréquemment ces arômes au bout d'un an avec la Stelvin. Après dix-huit mois, seules les bouteilles bouchées par la Stelvin ou le colmaté et stockées debout offrent encore du fruit frais : 33 % des dégustateurs en trouvent.
Enfin, après deux ans de stockage, la vis debout reste la seule à assurer encore un peu de fraîcheur (19 % des dégustateurs). Sur rosé, à dix-huit mois, seule la vis debout et le Twintop conservé couché préservent du fruit frais et n'affichent aucune note de fruit dégradé. ' La vis peut donc être une alternative intéressante au bouchage des vins de la vallée du Rhône, notamment les rosés ', conclut Stéphane Vidal.