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Vente et gestion, deux faiblesses

La vigne - n°171 - décembre 2005 - page 0

Les stratégies commerciales manquent d'efficacité, trop d'exploitants méconnaissent les notions élémentaires de gestion : plus questions d'attendre les clients, ni d'ignorer ses coûts de production.

En Anjou, la Fédération viticole veut améliorer les vins blancs de chenin. Elle a chargé Dominique Pasquini, pendant trois ans, de diagnostiquer les exploitations et de leur proposer des solutions. Il a rencontré de nombreux producteurs vendant en raisins ou en moûts. Il a vu des vignes bien tenues, avec des surfaces foliaires en progression et de l'enherbement pour maîtriser la vigueur. Mais souvent, la conduite n'est pas adaptée au potentiel des parcelles. Les vignerons optent pour le même itinéraire technique sur toute leur exploitation. Dans cette région mixte, ils ne savent qu'au dernier moment, quels sont les besoins ou les offres de prix des négociants. En réponse à cette incertitude, ils tranchent trop tard.
' Nous avons lancé des expérimentations avec des vignerons volontaires. Lorsque les essais se révélaient pertinents, ils ont modifié leurs habitudes de travail ', apprécie Dominique Pasquini. Preuve que rien n'est figé. Mais au-delà des questions techniques, Dominique Pasquini a constaté que de nombreux viticulteurs ne connaissent pas leurs coûts de production à l'hectare et se contentent de calculer leur chiffre d'affaires. Une partie de son travail a consisté à expliquer la différence entre ces deux notions, tout aussi mal maîtrisée dans les autres régions viticoles.

Les problèmes financiers, voilà le noeud de la situation bordelaise. ' Quand tout allait bien, les vignerons ont lourdement investi, souligne François Ricadat, coordinateur technique des audits. Ils ont autofinancé ou emprunté à outrance, ce qui pèse trop sur les bilans. Pendant des années, Il y a eu une gestion trop axée sur le social et le fiscal. La priorité, c'était de réduire les impôts et les charges sociales. Aujourd'hui, elle n'est plus là. ' Il faut d'urgence relancer les ventes !
Les quatre cents entreprises auditées au cours des deux dernières années ont peu de problèmes techniques. En revanche, leurs politiques commerciales sont approximatives et manquent d'efficacité. Trop de propriétés dépendent d'un seul circuit de vente. Beaucoup exploitent mal leur fichier de clients. ' Il n'y a pas de recette miracle, admet François Ricadat. Le premier pas, c'est déjà de se rendre compte que son système ne fonctionne plus. '
En Bourgogne, Bruno Guichard est chargé de mission du programme régional Contrat qualité +. Selon lui, bien des exploitations ne sont plus adaptées pour attaquer le marché. ' Certaines ont vécu sans se poser de questions pendant des années. Aujourd'hui, j'en rencontre qui attendent le passage du courtier ou le coup de fil du négociant. Avant, on venait leur acheter leur vin. Maintenant, il faut le vendre !'
Pour Bruno Guichard, parmi les quatre métiers d'une exploitation (producteur, vinificateur, vendeur et gestionnaire), celui de vendeur est moins bien exercé que les autres. Mais ' il n'est pas rare que des entreprises pêchent dans les quatre domaines. Celles qui résistent à la crise commercialisent plus de la moitié de leur production en bouteilles, s'appuient sur des marchés anciens (de deuxième, voire troisième génération) et ont investi raisonnablement, surtout dans l'outil de production. Les coopérateurs et ceux qui vendent tout en vrac au négoce, les petites structures notamment, sont très fragilisés. Ils n'ont pas beaucoup de marge de manoeuvre. '
Dans le Muscadet, certains viticulteurs n'en ont plus. Les auditeurs les ont orientés vers la cessation d'activité, avec l'arrachage primé pour les plus anciens ou le bilan de compétence pour les plus jeunes, afin qu'ils prennent une autre voie. La centaine de diagnostics effectuée en un an a mis en lumière de grosses difficultés de trésorerie dans de nombreuses exploitations.

A celles qui ont le potentiel ou la volonté pour s'en sortir, les auditeurs ont imposé de retravailler en profondeur la partie commerciale. Ils leur ont demandé de dynamiser, voire de développer leurs ventes directes, forcément plus rémunératrices. A certains, ils ont conseillé de diminuer leurs surfaces pour se concentrer sur les productions rentables. Là aussi, il s'agit simplement d'appliquer des règles élémentaires de gestion des entreprises.
Les vignerons qui ont souhaité ou accepté un audit de leur exploitation, ont tous le sentiment qu'un regard extérieur pouvait être profitable. Ils apprécient ce regard posé sur leur façon de travailler, qu'on leur propose des solutions à mettre en oeuvre ou qu'on leur expose les questions à résoudre à plus ou moins long terme.

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