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Cinq conseils pour tailler au bon moment

La vigne - n°171 - décembre 2005 - page 0

Le choix de la date de taille des parcelles se raisonne en fonction de l'organisation des chantiers, de la lutte contre les gelées, de l'état sanitaire de la vigne. Le vigneron doit trouver un compromis entre ces différents facteurs et déterminer ses priorités.


Tous les conseillers viticoles sont unanimes : la taille ne doit pas démarrer avant la chute complète des feuilles. En effet, après les vendanges, les feuilles continuent d'élaborer des substances, dont l'amidon, nécessaires pour les réserves de la vigne. ' Si on démarre la taille avant la chute des feuilles, on appauvrit la plante. Plus les réserves sont mises en place, plus la vigne résistera au gel et aux parasites ', précise Bruno Samie, de la chambre d'agriculture de Gironde. Nadège Brochard, de la chambre d'agriculture de Loire-Atlantique, estime qu'il faut laisser le temps à la vigne de finir son cycle biologique. ' Si on démarre avant, la sève ne sera pas complètement redescendue. On risque de créer des ruptures de sève, les vaisseaux vont moins bien cicatriser et on va peut-être favoriser les maladies du bois. Un stress à cette époque risque de gêner l'implantation du système racinaire ', explique-t-elle. François Dal, de la Sicavac, dans le Centre, conseille aux vignerons de s'organiser pour faire tous les travaux de remise en état du palissage, de peinture, de remplacement des pieds manquants avant de démarrer la taille.

Les tailles tardives retardent le débourrement. Elles limitent donc les risques de gelées de printemps lorsque celles-ci sont précoces. Selon des essais du CIVC (Comité interprofessionnel du vin de Champagne), réalisés en 1999, 2000 et 2004 sur du pinot noir, la taille réalisée mi-avril engendre un écart de six à dix jours par rapport à une taille effectuée fin janvier-début février. Mais d'après Bruno Samie, pour les cépages tardifs comme le cabernet-sauvignon à Bordeaux, cela se fait au détriment de la qualité, car on retarde aussi la floraison et la maturité. Il conseille de réserver les tailles tardives aux parcelles à risques connus de gelées de printemps. De même, il estime qu'il est possible d'envisager plusieurs passages (ébourgeonnage) ou un pliage tardif.
Concernant le gel d'hiver, François Langellier, du CIVC, a observé que les tailles précoces engendrent une sensibilité accrue au gel d'hiver. ' En 1996, il a gelé le 22 février à des températures allant jusqu'à - 20°C. Nous avons fait une enquête qui a montré que les parcelles taillées fin décembre avaient accusé des dégâts plus importants que celles taillées en janvier et février. Cela s'est revérifié en 1997. Le phénomène s'est davantage observé sur le pinot noir et les cordons ', explique-t-il.

Lorsque les parcelles sont très infestées par l'eutypiose, mieux vaut privilégier une taille tardive en période de sève montante. Les pleurs empêchent la pénétration des spores. Depuis 1991, la station viticole du BNIC (Bureau national interprofessionnel du cognac) suit un essai sur une parcelle d'ugni blanc. Dans la modalité taillée en période de pleurs, le taux de ceps atteints d'eutypiose est de 2 %, contre 7 % dans le témoin. Par contre, l'efficacité sur l'esca est nulle. Les deux maladies ne semblent pas répondre aux mêmes déterminismes. Nadège Brochard conseille de tailler à part les ceps atteints d'esca, avec un sécateur manuel dès la chute des feuilles, puis seulement ensuite de démarrer le chantier de taille.
Pendant cette opération, les vignerons peuvent en profiter pour repérer les ceps atteints d'eutypiose pour les tailler en mars lors des pleurs, et éviter ainsi les contaminations des pieds sains.
A contrario, lorsque la parcelle est touchée par la nécrose bactérienne, il faut impérativement éviter la période des pleurs qui sont des sources de contaminations importantes. Dans ce cas, il faut tailler pendant le repos végétatif. En fait, c'est la maladie principale de la parcelle qui va conditionner le choix de la date de taille.

La taille est très gourmande en main-d'oeuvre. A Bordeaux, il faut compter une semaine pour tailler en guyot 1 ha de merlot, planté à 3 000 pieds/ha.
En Bourgogne, la taille, le tirage et le brûlage des bois dans les vignes plantées 1 m × 1 m consomme 200 h/ha. Avec les 35 heures et le manque de personnel, de nombreux vignerons sont obligés de démarrer la taille tôt pour être sûr de tout finir à temps. En général, la taille s'étale de novembre à mars. Concernant l'ordre du chantier, ' il ne faut pas se baser sur des pratiques ancestrales, mais sur la vigueur ' , insiste Nadège Brochard. Selon elle, mieux vaut commencer par les terroirs les plus précoces, là où les feuilles sont tombées en premier et où la vigueur est moyenne.
Les conditions climatiques sont également un facteur à prendre en compte. ' Lorsqu'elles sont favorables, les vignerons vont tailler les parcelles les moins accessibles, alors que lorsqu'il neige et qu'il fait froid, ils vont tailler celles qui sont mieux exposées ', remarque Frédéric Schwaerzler, de la chambre d'agriculture du Haut-Rhin.

Les techniciens recommandent de tailler les jeunes parcelles tardivement pour plusieurs raisons. ' Les jeunes vignes débourrent plus tôt et les bourgeons gèlent plus vite, car ils sont plus près du sol ', rapporte François Langellier. Selon Nadège Brochard, ' les jeunes vignes ont tendance à démarrer tôt, car la circulation de la sève est plus rapide. On conseille donc de les tailler plus tard '. A Bordeaux, Bruno Samie avance un autre argument : ' On peut les tailler tard, car elles ne sont pas censées produire. De ce fait, on ne pénalise pas la qualité en retardant le débourrement. '

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