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Ulysse Gayon : le fondateur de l'oenologie bordelaise

La vigne - n°175 - avril 2006 - page 0

Ulysse Gayon a créé la station oenologique de Bordeaux. Il a organisé des cours publics pour les viticulteurs. Il a montré que la bouillie bordelaise n'affecte pas le vin.

Commandeur de la légion d'honneur, lauréat des prix des académies des sciences et d'agriculture : de son vivant, Ulysse Gayon a récolté les fruits de quarante années de travail intense. Chimiste et microbiologiste reconnu, il créa la station oenologique de Bordeaux et réalisa de nombreuses recherches dont les applications marquèrent la filière viticole : il fut coinventeur de la bouillie bordelaise.
Issu ' d'une simple et brave famille de propriétaires ruraux ', Ulysse Gayon est né en 1845, à Bouëx (Charente). Extrêmement brillant, il est admis aux trois prestigieuses grandes écoles françaises : Saint-Cyr, Polytechnique et l'Ecole normale supérieure qu'il choisit. Il en sort en 1871 agrégé de sciences physiques. Il obtient aussi trois licences : mathématiques, physique et chimie.

Admis comme préparateur dans le laboratoire de Louis Pasteur, il apprend à maîtriser les techniques de ' la science nouvelle de la microbiologie '. En 1875, il soutient sa thèse sur les altérations spontanées des oeufs. Ses conclusions sont très claires : la propreté des installations d'élevage s'impose, car les altérations sont provoquées par des contaminations.
Dans la foulée, ' l'administration des douanes lui propose de prendre la direction d'un laboratoire qu'elle crée à Bordeaux, pour assurer le contrôle de la qualité et de la conformité des produits, surtout agricoles, entrant en France ', raconte Pascal Ribéreau-Gayon, son arrière petit-fils.
Ulysse Gayon fut maître de conférences, professeur de chimie de la faculté des sciences, directeur de la station agronomique, qu'il transformera en station agronomique et oenologique. Cette dernière aborde divers sujets : laboratoire chimique de contrôle de la qualité, composition des vins rouges, fermentation des vins de Sauternes, incidence des maladies, effets du chauffage sur la qualité, influence de la fertilisation... Elle organise des cours publics pour les professionnels. ' Ces actions témoignent d'une véritable volonté d'ouverture sur l'extérieur, alors que les universitaires s'enferment souvent dans leur tour d'ivoire ', relève sa biographie. Reconnu comme l'un des meilleurs spécialistes, il montre que les transformations de la matière organique végétale sont provoquées par des microbes.
En 1882, Alexis Millardet, professeur de botanique, sollicite son aide. Il a observé que les vignes traitées avec un mélange de chaux et de sulfate de cuivre par Ernest David, le régisseur du château Dauzac (Médoc), résistaient bien au mildiou qui commençait à faire des ravages dans le vignoble. Leurs travaux débouchent sur la mise au point de la célèbre bouillie bordelaise. Ulysse Gayon montrera que ' le vin n'est pas affecté dans sa constitution, par la pulvérisation de ce produit, bien qu'il donne au raisin une coloration bleue épouvantable ', et que ' le cuivre pulvérisé sur le raisin est précipité pendant la fermentation alcoolique et ne se retrouve pas dans le vin '. Une découverte capitale.
' Millardet et Gayon subissent un feu nourri de critiques. Mais philosophe, Gayon disait : 'Le temps fait justice des maladroits et des charlatans. Il récompense tôt ou tard les bons ouvriers ' ', rapporte Pascal Ribéreau-Gayon.

Par ailleurs, Ulysse Gayon améliora la vinification des vins rouges, en montrant le rôle du contrôle de la température et de l'aération des moûts en fermentation. Il est décrit comme un homme ' aimable et plein d'humour, recherchant le contact avec les autres '. On lui prête cependant la phrase suivante : ' Avec les étudiants, on s'arrange toujours, avec le gouvernement, c'est souvent difficile, mais enfin, on s'en tire, tandis qu'avec les collègues... '
Ulysse Gayon est devenu ' bordelais jusqu'au plus profond de lui-même, fier et heureux de l'être '. Il refusa même de quitter la ville pour devenir professeur à la Sorbonne, à Paris. Il meurt le 9 avril 1929.

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