Pline l'Ancien a consacré un tome entier de son ouvrage ' Histoire naturelle ' à la vigne et au vin. Il y dresse l'inventaire de vins le plus étoffé de l'Antiquité.
Pline l'Ancien naquit à Côme en août 23, dans une famille de la riche bourgeoisie. Il suit une carrière militaire qu'il interrompt lors du règne de Néron. Il est ensuite appelé à servir dans l'administration par le nouvel empereur Vespasien, son ami. Amateur insatiable de sciences, il compile toutes les connaissances existantes sur le sujet. ' 20 000 faits dignes d'intérêt, tirés de la lecture d'environ 2 000 volumes et provenant de 100 auteurs de choix ont été renfermés en 36 livres ', indique Pline dans la préface de son ouvrage Histoire naturelle, dédié à ' son cher Vespasien César '.
Chaque livre traite de sujets différents : structure de l'univers, géographie, médecine, botanique, minéralogie, agriculture... Trois tomes abordent la viticulture. Et le livre XIV est tout entier consacré à la vigne et au vin. Non content de recenser les connaissances de ses prédécesseurs, Pline l'Ancien décrit minutieusement les pratiques de son époque. Ainsi apprend-on que la vigne est considérée comme un arbre et que les châtaigniers, roseau, saules ou chênes servent d'échalas pour sa culture.
Dans l'Antiquité, l'addition de poix ou de résine aux moûts est une technique répandue. Ces produits sont versés ' dans les moûts lors de la première fermentation, qui dure neuf jours au plus . Le moût offre, en certains lieux, le défaut naturel de fermenter spontanément une seconde fois, accident qui le prive de sa saveur. On le nomme encore piquette. '
Pline l'Ancien recense les différentes méthodes pour ' garder le vin une fois récolté ' suivant le climat. ' Dans la région des Alpes, on le met dans des tonneaux de bois cerclés et même, au fort de l'hiver, on allume des feux pour l'empêcher de geler ', écrit-il. Dans les contrées plus tempérées, on le met en jarre qu'on enterre entièrement ou non, selon ' la force du vin '. Les jarres ne sont jamais pleines. On ne doit les ouvrir que par beau temps, jamais par vent du sud ou par pleine lune. Soutirer donc de préférence lorsque la lune croît et se trouve sous terre. Il recommande de laisser des intervalles entre les jarres ' pour éviter que les maladies ne se communiquent, car la contagion est toujours rapide '. Il relève que pour des questions de maturité, ' les cépages mêlés ne s'accordent pas du tout, il est bon de les séparer et de les planter chacun dans un quartier '.
Outre ces considérations techniques, en bon érudit soucieux d'exhaustivité, Pline l'Ancien offre, dans le livre XIV, l'inventaire de vins le plus étendu que l'Antiquité ait légué, selon André Tchernia dans Le vin, nectar des dieux, génie des hommes. Il classe les variétés de vigne de l'époque. Les scientifiques d'aujourd'hui ignorent quels cépages actuels sont les descendants de ceux qu'il décrit. Pline l'Ancien donne ainsi la première place aux vignes aminéennes, ' pour la force de leur vin qui gagne toujours du corps en vieillissant '.
Il attribue le second rang aux nomentanes, ' donnant moins de vin, un excès de marc et de lie, résistant fort bien aux gelées, elles souffrent plus de la sécheresse et du chaud que de la pluie et du froid ', écrit-il.
Pline l'Ancien énumère cinquante crus italiens, gaulois et espagnols, classés d'après leurs qualités. Il distingue quatre catégories. ' Chacun sait qu'il est des crus plus agréables que d'autres. ' Par exemple, il classe au premier rang le ' pucinum, en provenance d'un coteau pierreux plongeant sur l'Adriatique '.
Le vin de Falerne, dans le golfe de Naples, ' dont il est trois sortes, le fort, le doux et le léger ' n'est classé qu'au second rang. A l'époque, il est pourtant très en vogue. Pline l'Ancien poursuit son inventaire par les vins non classés de la côte adriatique, de la mer Tyrrhénienne et de la région narbonnaise.
Le 24 août 79, le Vésuve entre en éruption. Toujours avide de connaissance, Pline l'Ancien se rend sur place pour observer. Il meurt asphyxié par les émanations.