Le sulfate de cuivre de la bouillie bordelaise (BB), l'hydroxyde de cuivre, l'oxyde cuivreux et l'oxychlorure de cuivre sont les quatre formes de sel de cuivre homologuées contre le mildiou. Quel que soit le sel de cuivre, la matière active est l'ion cuivrique (Cu++) libéré dans l'eau.
La bouillie bordelaise, généralement formulée en poudre mouillable, est composée de chaux et de sulfate de cuivre, obtenu par réaction du cuivre avec l'acide sulfurique. Lors de la préparation de la bouillie, la chaux neutralise le sulfate de cuivre. Un mélange complexe de gypse et de nombreux composés cupriques se forme. Parmi ces composés, les plus abondants sont la devillite, la posnjakite et la brochantite. Cette dernière est plus stable et plus active que les autres.
Pulvérisée sur la feuille, la bouillie bordelaise réagit avec l'eau de pluie et le gaz carbonique de l'air pour former la malachite, laquelle libère progressivement ses ions Cu++. De ce fait, la bouillie bordelaise ne possède pas d'action de choc. En revanche, du fait de son pH neutre, elle bénéficie d'une bonne sélectivité : elle ne provoque pas de réaction phytotoxique sur la vigne.
L'hydroxyde de cuivre est obtenu par le traitement du sulfate de cuivre à la soude. Contrairement à la bouillie bordelaise, la libération des ions Cu++ sous l'action du gaz carbonique se fait massivement, permettant un très bon effet choc. Par contre, l'hydroxyde de cuivre est d'une moins bonne sélectivité, entraînant des risques de phytotoxicité. En outre, sa persistance d'action est plus faible.
L'oxychlorure de cuivre est obtenu par neutralisation d'un mélange de cuivre et d'acide chlorhydrique. Il possède un effet choc intermédiaire entre les hydroxydes et les bouillies bordelaises. Mais sa résistance au lessivage est moins bonne.
L'oxyde cuivreux est un composé de couleur rouge brique obtenu par oxydation du cuivre métal. Les fongicides à base de ce sel sont moins solubles : ils libèrent plus difficilement leurs ions Cu++. Mais ils sont plus concentrés. Les volumes à manipuler sont donc plus faibles. Du fait d'une bonne adhérence, l'oxyde cuivreux, résiste assez bien au lessivage. Il possède une bonne persistance d'action. ' Malgré ces caractéristiques, il ne présente pas forcément une bonne efficacité ', prévient Nicolas Constant, de l'Association interprofessionnelle des vins biologiques du Languedoc-Roussillon (AIVB). Chez Capiscol, la société qui vend le Nordox 50, un oxyde cuivreux, Didier Camara ne partage pas cet avis. ' L'efficacité est identique à la référence de la commission des essais biologiques (bouillie bordelaise RSR Disperss) et aux hydroxydes ', affirme-t-il. Selon l'AIVB, cette forme de cuivre est plus phytotoxique. Mais Didier Camara affirme qu'elle est d'une bonne sélectivité en conditions optimales d'application (doses réduites, températures supérieures à 10°C, feuillage sec).
Pour les fabricants, la réduction des doses de cuivre est un enjeu considérable : ce métal est toxique pour la flore microbienne du sol et pour les milieux aquatiques. Le but est de proposer des spécialités aussi efficaces que les anciennes, homologuées entre 3 000 et 5 000 g de Cu/ha. Depuis 1999, des hydroxydes sont homologués à 1 500 g de cuivre métal/ha.
Aujourd'hui, c'est toujours un produit de cette famille qui apporte la dose la plus faible à l'ha : l'Héliocuivre, homologué depuis décembre 2002 à 1 200 g de Cu/ha. Il a fallu attendre la campagne 2003 pour voir apparaître une bouillie bordelaise à 1 500 g/ha, la BB RSR Disperss de Cerexagri.
L'efficacité des spécialités dépend de la disponibilité de l'ion cuivrique, de leur pouvoir couvrant et de leur résistance au lessivage. Ces caractéristiques proviennent de la nature du sel de cuivre, de la finesse des particules et de la formulation. ' Le sel de cuivre doit être rapidement solubilisé pour libérer les ions cuivriques, mais pas trop pour conserver sa résistance au lessivage et demeurer persistant , explique Bernard Tombu chez Nufarm. En diminuant la taille des particules, on facilite la libération du Cu++, on augmente le pouvoir couvrant et on diminue la sensibilité du sel au lessivage. ' Pour cela, les fabricants améliorent les procédés industriels.
La BB RSR Disperss, homologuée à 1 500 g de cuivre métal/ha, est composée de brochantite micronisée en particules de 2 µm en moyenne, enrobées d'adjuvants. Le cuivre est disponible plus rapidement que dans une bouillie classique, mais comme il est sous forme peu soluble, il est libéré progressivement et mieux réparti sur la feuille. Les particules d'hydroxydes de cuivre sont encore plus petites. Ce sont des aiguilles ou écailles de 0,2 à 0,8 µm, elles aussi enrobées d'adjuvants. Tout en maintenant l'efficacité de ces produits, elles améliorent leur sélectivité.
Des innovations sont à venir. S'agissant des hydroxydes de cuivre, DuPont De Nemours attend, pour 2006, l'homologation de son Kocide Opti à 750 g de Cu/ha. Nufarm annonce une demande d'homologation pour une dose inférieure à 4,30 l/ha de Champ Flo, qui apporterait 720 à 1 080 g Cu/ha. La firme attend l'homologation de son Cuproxat, un nouveau sel de cuivre à 1 140 g de Cu/ha. Les oxydes cuivreux devraient prochainement passer sous la barre des 1 500 g de Cu/ha. Capiscol a fait une demande d'homologation en réduction de dose pour son Nordox 50. Certis devrait déposer un dossier pour une nouvelle formulation du Nordox 75.