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Nous réduisons nos coûts

La vigne - n°179 - septembre 2006 - page 0

La famille Henry a toujours eu pour objectif de produire, à moindre coût, les vins recherchés par le négoce. Son domaine a prospéré. Mais la crise la pousse à accélérer son développement commercial.

Intéresser le négoce avec des vins d'entrée de gamme : voilà le pari qu'a fait le couple Henry. En 1972, Patrick arrive comme salarié sur le domaine de l'Isle-Saint-Pierre, fondé par son grand-père, négociant en vins à Paris. En 1927, ce dernier avait acheté 1 000 ha au coeur de la Camargue, à Mas Thibert. Il cultivera jusqu'à 500 ha de vignes. A l'arrivée de son petit-fils, il n'en reste plus 170. En 1982, la succession réglée, Patrick Henry s'installe en son nom propre, avec son épouse Marie-Cécile qui gère le volet administratif. La surface du vignoble n'est plus que de 85 ha. Le couple va mettre fin à ce déclin.
Il renouvelle le vignoble au rythme de 4 à 5 ha par an, y compris en 2006. Il plante des cépages incontournables (merlot, cabernet franc, chardonnay, muscat...). Il essaie également des variétés moins courantes, comme le petit verdot ou l'arinarnoa, un croisement de merlot et petit verdot obtenu par l'Inra.

Dès le départ, il mécanise le maximum de travaux. ' Nous sommes sur des vins d'entrée de gamme, pas chers. Il est impératif d'optimiser les coûts ', explique Patrick Henry. Ce dernier conduit la vigne sur un seul fil porteur à 1,10 m. Il plante des rangs de 500 à 600 m de long. Au bout, il aménage des tournières de 14 m de large. Ainsi, il manoeuvre et tourne rapidement avec les engins. Il y a dix ans, il opte pour la lutte raisonnée afin de diminuer le nombre de traitements. Aujourd'hui, il veut aller jusqu'à supprimer toute intervention manuelle lors de la taille.
Patrick Henry a également allégé les effectifs de l'entreprise. Il n'y a plus que quatre salariés à la vigne, deux au chai, un au caveau et un au bureau. En contrepartie, le domaine fait appel à des prestataires de service pour la taille, l'entretien du matériel, la mise en bouteilles.... ' C'est une flexibilité et une tranquillité énormes, explique Patrick Henry. Il y a moins de personnel à gérer. '

Mais le coût de la main-d'oeuvre, même indirect, reste encore trop important. En cause : la taille de la vigne. En 2003-2004, le domaine a payé 120 000 euros pour 7 000 h, un record. ' Nous devons récupérer de la marge sur ce poste. En 2005-2006, nous avons réduit le temps de taille et les frais correspondants à 80 000 euros . ' Le but est de les diminuer encore de moitié cette année, en supprimant toute intervention manuelle. Ces économies ont permis de stabiliser le coût de revient à 56 euros/hl. Désormais, ' il est impératif d'augmenter les rendements des vins de pays pour se battre à armes égales avec nos voisins italiens et espagnols '.

Le chai se modernise progressivement. Patrick Henry s'équipe de conquêts de réception en Inox. Il investit dans un groupe de froid de 200 000 frigories. Il renouvelle les pompes à marc et achète un égrappoir. Il investit pour transférer rapidement le raisin, éviter les macérations incontrôlées et les oxydations prématurées. Il y a trois ans, il change d'oenologue. Il souhaite élaborer les vins demandés sur le marché mondial : ronds, souples et fruités. L'oenologue lui recommande, par exemple, de raccourcir la durée des macérations à cinq-six jours, contre une dizaine auparavant. ' Les vins sont moins durs et gardent du fruit ', souligne Patrick Henry.
Après avoir maîtrisé le foncier, l'encépagement et la production, le couple Henry entend progresser sur le plan commercial. En 1988, il étiquette ses premières bouteilles. Pour rationaliser les coûts de la mise en bouteilles, il simplifie son offre au maximum. Il propose une gamme de vins d'assemblage, une de vins de cépages et deux mousseux, soit douze vins.
En 2001, il commence avec succès les ventes en bibs de 5 et 10 l. Aujourd'hui, il en commercialise 15 000 de chaque, la demande explose.
En revanche, les ventes en bouteilles ne représentent que 25 % du potentiel de 1,8 million, et le vrac souffre beaucoup. ' Le marché n'existe plus, déclare Patrick Henry. Les ventes se font au coup par coup, à la citerne. ' En 2005, le domaine distille 1 000 hl et, en 2006, 450 hl.
Pourtant, Patrick Henry est très optimiste : ' La crise passera. Elle permet de nous remettre en question. '

' Le système est tellement compliqué que les consommateurs sont perdus. Ils ne savent plus ce qu'ils achètent. Ils se rattachent au cépage, mais surtout à des marques ou à des domaines ', intervient son fils Julien, 32 ans, arrivé en 2005 pour donner un nouvel essor commercial au domaine.
La famille mise sur lui et sur les cinq agents commerciaux qu'elle prendra après les vendanges 2006, trois pour l'exportation et deux pour la France. Elle entend construire une image forte autour de la Camargue, du Rhône, du fleuve, ' en évitant les grappes de raisins '. Julien Henry, designer et architecte de formation, s'y attelle. Il relooke toutes les étiquettes, les packagings, les fiches techniques et le site internet.
Les Henry vont exploiter à fond l'énorme potentiel agrotouristique de leur domaine. Situé sur une île du Rhône, doté d'une riche histoire, il a de quoi faire rêver les consommateurs.

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