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Fermentations : jouer la carte de la sécurité

La vigne - n°179 - septembre 2006 - page 0

L'objectif assigné à la fermentation alcoolique est simple : épuiser les sucres sans marquer le vin par des arômes fermentaires. Quant à la malo, il faut tout faire pour qu'elle se déroule rapidement.

'Les fermentations constituent un point capital à assurer, prévient Isabelle Tribaut-Sohier, du CIVC. Il faut qu'elles se fassent vite et bien. Dans le cas contraire, on peut perdre beaucoup ! ' Le message est clair et il passe. Les Champenois ne prennent aucun risque durant les fermentations. Ils ne cherchent pas à révéler des arômes ou des nuances particulières à ces moments-là. C'est dans cette optique que la plupart des caves emploient des levures sèches actives adaptées.
Chez Moët & Chandon, ' nous utilisons nos propres levures , précise Benoît Gouez, chef de cave. Nous les avons sélectionnées dans nos chais et elles sont conservées d'une année sur l'autre dans de l'azote liquide '.
Une souche de levure destinée à l'élaboration d'un vin de base doit avoir une qualité essentielle : elle doit être une bonne finisseuse, car elle a affaire à des moûts très clarifiés, avec lesquels les risques de fermentations languissantes sont élevés. Les souches disponibles dans le commerce pour l'élaboration des vins de base ont été sélectionnées en Champagne. Pour la campagne 2006, les souches préconisées par le CIVC pour les vins de base sont : Vitilevure DV10, Levuline CHP et 18-2007, de l'Institut oenologique de Champagne. Ce sont les plus utilisées.
Les quelques carences du moût doivent être rectifiées. La chaptalisation, si nécessaire, doit être bien calculée. En Champagne où le taux d'alcool final d'un effervescent ne doit pas dépasser 13°, il faut viser 11° en fin de fermentation alcoolique. Surtout, il s'agit de ne pas être au-dessus de 11°5, car la prise de mousse génère encore 1°4 supplémentaire.

Par ailleurs, certaines caves font un collage à la bentonite en début de fermentation pour éviter l'apparition de faux goûts sur les vendanges abîmées, et limiter les risques dus aux protéines et aux composés phénoliques oxydables. ' Nous collons les cuvées à la bentonite s'il le faut. Sur les tailles issues de raisins noirs, nous utilisons l'association bentonite-PVPP à titre préventif vis-à-vis de l'amertume ', dit Didier Mariotti, chef de cave chez Mumm. Cependant, cet adjuvant est jugé comme néfaste à la capacité à l'effervescence du vin de base. Le CIVC ne recommande son emploi qu'aux raisins ayant connu des problèmes sanitaires. L'acidification est rare. Quant aux problèmes de couleur dus aux cépages noirs, ils sont corrigés par l'ajout de 50 à 100 g/hl de charbons oenologiques au débourbage.
Durant la fermentation, la maîtrise des températures est fondamentale. Pour limiter les risques d'arrêts de fermentation et éviter les pertes aromatiques, la température est régulée dans la plupart des chais de vinification entre 18 et 20°C. ' Nous préférons travailler entre 16 et 19°C, nous y trouvons plus de finesse ', explique Didier Mariotti. La régulation thermique est généralement coupée en fin de fermentation, lorsque la densité arrive aux alentours de 1 010 ou 1 005. La température remonte alors à 23°C.

Un ajout de 5 à 10 mg/l d'oxygène au moût en début de fermentation, vers 1 070, facilite le bon déroulement de la fermentation alcoolique. Cet ajout peut être réalisé par l'intermédiaire d'un remontage à l'air de quelques minutes. Certaines maisons préfèrent une politique moins interventionniste. ' A part un levurage et un contrôle des températures, nous n'intervenons pas pendant la fermentation , précise Benoît Gouez. Nous voulons limiter l'impact fermentaire. Le seul adjuvant que nous sommes quelquefois amenés à utiliser, c'est 20 g/hl de bentonite si l'état sanitaire de la vendange laisse à désirer. ' La fermentation alcoolique est terminée en cinq à six jours.
Concernant la fermentation malolactique, le mot d'ordre est le même que pour la fermentation alcoolique. Ceux qui veulent la faire doivent mettre toutes les chances de leur côté en utilisant des kits d'ensemencement. Comme toujours pour la mise en oeuvre de bactéries lactiques, il faut surveiller le niveau de SO 2, la température du vin, le pH et la turbidité. Certaines caves ne soutirent pas entre les deux fermentations. ' Pour la malo aussi, nous utilisons nos propres souches de bactéries, précise Benoît Gouez. Nous les inoculons à mi-fermentation alcoolique. Lorsque la densité est aux alentours de 1 010, nous coupons le froid, la température monte à 22-23°C, la fermentation alcoolique se termine ainsi sans problème et cela favorise l'implantation des bactéries. La fermentation malolactique prend ainsi directement le relais et dure entre deux à trois semaines. '

Le pH des vins de base est généralement très bas. Les kits de bactéries à ensemencement direct ont donc peu de chances de succès. Le CIVC préconise l'élaboration, dès le début des fermentations, d'un pied de cuve correspondant à 5 % du volume à ensemencer. L'inoculation des bactéries se fait sur le moût, juste après le levurage. Il vaut mieux utiliser un moût issu des tailles au pH plus élevé. L'incorporation à la cuve à ensemencer a lieu en fin de fermentation alcoolique. ' Avec cette technique de pied de cuve, les bactéries s'adaptent petit à petit à l'alcool , précise Isabelle Tribaut-Sohier. Il s'agit en fait d'une coïnoculation. L'incorporation en fin de fermentation permet de profiter de la température du vin à cet instant pour faciliter l'implantation des bactéries. Les deux flores se succèdent aisément et la malo suit la fermentation alcoolique. '

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