En ces temps de crise, la gestion est devenue le nerf de la guerre. Mais il reste peu de marge pour baisser les coûts, sauf ceux de mécanisation avec la création de Cuma.
«Il y a encore quelques années, les vignerons regardaient peu les coûts de production. Ce n'est plus le cas maintenant, constate Jean-Louis Giornal, expert-comptable à Orange (Vaucluse). Ceci étant, les exploitants ont peu de marge de manoeuvre. Comment réduire ses coûts quand on est déjà au taquet sur tous les postes ? »
Avec la crise, les vignerons ont dû trouver une réponse à cette difficile question. Ils ont analysé plus finement leurs dépenses et débusqué les postes qui pouvaient encore être optimisés. De l'avis de nombreux conseillers de gestion, le coup d'accélérateur s'est opéré en 2004.
En Gironde, entre 2000 et 2004, le coût de production est passé de 3 950 euros à 3 417 euros/ha, soit - 13 %. Les efforts ont porté sur les approvisionnements (- 27 %) et la mécanisation (- 20 %), avec un renouvellement du matériel qui s'est espacé. En conséquence, le recours aux entrepreneurs viticoles a augmenté (9 %). La main-d'oeuvre, charge presque incompressible, n'a logiquement diminué que de 6 %.
Cependant, « même si les exploitants ont travaillé à la réduction de leurs charges, ils se heurtent à une baisse des rendements de 16 %, qui fait exploser leur coût de revient à l'hectolitre », signale Florence Lamoureux, conseillère d'entreprise à l'URABLT (Union régionale agricole Branne-Libourne-Targon).
La crise amène d'autres changements. « De nombreux vignerons réfléchissent à travailler ensemble pour optimiser la main-d'oeuvre et le matériel », dit Jean-Louis Giornal.
Le Beaujolais a consenti à abaisser sa densité de plantation. « Dans notre vignoble, il existe deux postes de charge très élevés : la main-d'oeuvre et la mécanisation , analyse Jean-Claude Vanel, conseiller de gestion chez ABC-Cefar, à Saint-Jean-d'Ardières (Rhône). Et cela nous renvoie forcément à la densité de plantation . »
Les nouveaux décrets de l'AOC Beaujolais autorisent une densité à l'hectare de 6 000 pieds, contre 10 000 pieds auparavant. Les conseillers préconisent d'arracher un rang sur six dans un premier temps, puis un rang sur trois. Objectifs : réduire le temps de travail de 30 % et s'équiper d'un tracteur vigneron, moins coûteux qu'un enjambeur.
Ce changement de mode de conduite nécessite un gros investissement. Arracher un rang sur trois coûte presque 8 000 euros/ha. Mais cela permet d'économiser 250 h, soit 2 600 euros/an/ha. En moyenne, les simulations ont montré que le retour sur investissement est obtenu sur cinq à six campagnes.
Reste à réfléchir à l'usage du temps gagné : s'agrandir, développer la vente ou trouver un travail à l'extérieur ?
« La sortie de la crise passe par le commercial, principalement à l'exportation, explique Jean-Louis Giornal. Mais comment prospecter quand on n'a plus de revenu ? Cela fait deux ans que ceux qui vendent en vrac perdent de l'argent. Cela ne peut plus durer. »