Par copeaux, on désigne des morceaux de bois de chêne de forme et de taille très variées. Certains sont en bois frais, mais la plupart ont subi une chauffe. Voici des explications pour y voir plus clair.
Outre la réduction des coûts, les produits alternatifs répondent à deux objectifs distincts. Leur utilisation permet soit d'améliorer le profil gustatif d'un vin sans apporter de goût boisé, soit de complexifier le bouquet aromatique par des notes vanillées ou torréfiées. Dans le premier cas, on utilise des granulats ou des copeaux de bois frais, de préférence en cours de fermentation. Dans le second cas, on emploie, durant l'élevage, du chêne ayant subi une chauffe d'autant plus forte que l'on veut donner un goût boisé plus intense.
Les granulats constituent les plus petits morceaux de chêne dont l'emploi est autorisé dans l'Union européenne. Leurs dimensions flirtent avec la limite fixée à 2 mm de diamètre minimum. « Ces produits sont très intéressants pour les vins rouges , déclare Pascal Conte, directeur de la Tonnellerie Vernou. Ils se diluent à 70 % dans le vin, on ne les retrouve presque pas dans les lies. L'idéal, c'est de les employer en cours de fermentation, ils permettent alors de stabiliser la couleur, d'apporter un gain de structure, et de gommer l'amertume et certains goûts herbacés. »
Dans ce cadre, les granulats deviennent de véritables auxiliaires de vinification. « De par leur granulométrie, ils diffusent en une à trois semaines les composés extractibles intéressants », précise Guillaume de Jarnac, directeur de Pronektar. Ils sont en général employés à raison de 1 à 4 g/l. Ils sont disponibles dans les gammes de chauffes habituelles de chaque fournisseur et en bois frais. Ces granulats s'incorporent souvent en vrac dans la cuve ou avec la vendange lors d'essais sur moûts.
Avec une taille supérieure aux granulats, on trouve les copeaux au sens strict. Leur diamètre oscille entre 5 et 25 mm. « C'est le produit qui correspond le mieux à l'élevage, explique Pascal Conte. Il faut les incorporer dès le début de la malo. Ils arrondissent les angles en apportant un plus aromatique, permettant de franchir un palier qualitatif. Ils ne se diluent pas dans le vin, il faut utiliser des sacs de diffusion. Ces sacs de coton ou de polypropylène de qualité alimentaire contiennent, en général, 5 kg de copeaux. Ce conditionnement est très pratique pour stopper le contact entre le vin et le bois en un seul geste. »
La durée de contact doit être pilotée par la dégustation. Elle est souvent comprise entre trois et neuf semaines. Les gammes de copeaux sont très fournies. Chêne américain ou français, chauffe légère, moyenne ou forte sont autant de critères de choix. Certains fournisseurs proposent des assemblages d'essences variées et de différentes chauffes pour permettre au vinificateur d'obtenir le profil de vin répondant à ses objectifs. Les doses les plus courantes sont de 2 à 4 g/l.
Après les copeaux viennent les planches, encore dénommées douelles ou staves. Elles ont des dimensions assez semblables chez les différents fournisseurs : de 0,7 à 1,5 cm d'épaisseur, environ 1 m de long et 4 à 5 cm de large. « Nous proposons deux épaisseurs différentes , souligne Pascal Conte. C'est pour moduler la durée de vie du produit. Pour un usage unique, l'épaisseur est de 0,7 cm. Pour que les staves servent une seconde fois, il faut au moins 1,4 cm, car le vin pénètre dans le bois d'environ 0,6 cm par an. » Les douelles s'utilisent à raison de deux à quatre par hectolitre. Pour les maintenir en place et éviter qu'elles ne flottent, une armature est nécessaire. En règle générale, les fournisseurs disposent de modèles flexibles qu'ils adaptent à chaque cuve.
A côté des planches standardisées, on trouve les planchettes, des morceaux de planches aux dimensions très variables d'un fournisseur à l'autre. Elles ont l'épaisseur d'une douelle et des longueurs allant de 1 à 5 cm. « Sur ces produits, ce qui compte, c'est la surface et le type de section du bois en contact avec le vin », explique Jean-Louis Dreyer, gérant d'Arôbois. La mise en oeuvre des segments nécessite souvent un sac d'infusion. La surface d'échange à poids égal par rapport aux staves est supérieure d'au moins 10 %. Les segments permettent de diminuer la dose de bois à utiliser. La moyenne atteint 5 g/l. Les segments coûtent, en moyenne, 5 % plus cher que les staves, mais ne nécessitent pas d'armature.
« Planches et planchettes sont des alternatifs dont les résultats tendent vers ceux de la barrique , explique Guillaume de Jarnac. Le temps d'élevage nécessaire est compris entre trois et six mois. » Ces produits n'existent pas en bois frais, ils sont tous chauffés. Certains les chauffent à la flamme comme les merrains d'un fût. Ils affirment qu'ils apportent ainsi une complexité aromatique semblable à la barrique car, par cette méthode, il se crée un gradient de chauffe à l'intérieur du bois. D'autres réalisent la chauffe dans un four à convection. « Dans ce cas, elle est homogène sur toute l'épaisseur du bois et il n'y a pas de risque de formation de benzopyrènes par brûlage », soutient Guillaume de Jarnac, partisan de ce procédé. Jean-Louis Dreyer complète : « Les gradients de chauffe sont inutiles et ouvrent la porte au hasard, donc à des lots hétérogènes. Pour la complexité, il suffit d'assembler des bois ayant subi des chauffes différentes. »
Plusieurs fabricants proposent des morceaux de chêne à introduire dans les barriques pour redonner un pouvoir boisant à des fûts de trois à quatre vins. Ces produits se présentent sous des formes diverses et variées. On trouve des tronçons de planchettes ou simplement des copeaux dans des filets de diffusion, mais aussi des mini-douelles reliées les unes aux autres. Ces produits portent des noms plus ou moins originaux et imagés : sets de sticks, zigzags, chapelets, scorpions, snakes, hot dogs... Leur surface en contact avec le vin dans le fût est équivalente à celle de l'intérieur d'une barrique. « Bien que ce soit l'outil de la misère, c'est un super outil, souligne Pascal Conte. Les sets de sticks permettent de prolonger la durée de vie d'une barrique de un ou deux vins. Mais au-delà de cet aspect économique, les inserts permettent également d'associer aux copeaux ,les conditions oxydatives de l'élevage en barriques. »
La gamme de chauffe proposée pour ces produits correspond à celle que l'on trouve habituellement en tonnellerie traditionnelle. Ce cas précis d'utilisation des morceaux de bois de chêne est prévu dans la réglementation européenne d'octobre dernier.
En effet, un vin ayant fait l'objet d'un ajout de copeaux, même s'il est élevé en barriques, ne peut pas revendiquer à l'étiquetage les mentions comme « élevé en fûts de chêne » et « vieilli en barriques ». Cette pratique reste tout à fait légale si elle est réservée à l'élevage des vins, et non à la vinification en barriques. Elle n'engendre aucune conséquence pour un utilisateur ne faisant pas appel à ces mentions sur ses étiquettes. Au contraire, il peut alors étaler le renouvellement de son parc à barriques.