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Champagne La croissance encadrée

La vigne - n°183 - janvier 2007 - page 0

Les ventes ont progressé de 5,2 % en 2006, dopées par le grand export. La récolte historique de 13 000 kg/ha, l'équivalent de 360 millions de bouteilles, devrait limiter le risque de dérapage des prix.

La problématique champenoise a de quoi faire des envieux, à savoir gérer au mieux la croissance pour éviter une surchauffe des cours. Pour qualifier l'année 2006, certains n'hésitent pas à employer le mot « miraculeuse ». C'est le cas d'Yves Fourmon, président des courtiers de la Champagne : « Avec le mauvais temps du mois d'août, nous sommes passés près de la catastrophe. Et le soleil de septembre nous a sauvés. Sur le plan commercial, la hausse des ventes et des prix raisonnables, mais confortables, tiennent aussi du miracle. Ceci étant, on ne monte pas au ciel éternellement. La baisse du cours du dollar risque de freiner les exportations. Par ailleurs, l'augmentation des taux d'intérêt va renchérir le coût du stockage des vins. » A la fin octobre 2006, les ventes de champagne avaient progressé de 5,2 % sur un an par rapport à la même période en 2005. La croissance des expéditions des vignerons est plus mesurée, avec 1,6 %, principalement en raison du tassement des ventes en France.

Malgré cela, « les vignerons et les maisons de négoce sont très raisonnables, observe Yves Fourmon. Ils ont conscience qu'il ne faut pas casser la machine et sont prêts à signer pour que la situation actuelle dure longtemps ». Le prix du raisin n'a augmenté que de l'inflation en 2006. Avec la récolte historique de 13 000 kg/ha, le marché devrait être suffisamment approvisionné.
Les échanges de vins sur lattes, dont l'éventuelle interdiction fait périodiquement la une des journaux locaux, sont aussi actifs. « Avec 20 millions de bouteilles, soit 6 % des ventes de champagne en 2006, le marché des vins sur lattes reste marginal, mais sensible , poursuit Yves Fourmon. Dans l'organisation actuelle de la Champagne, je ne vois pas comment il pourrait être supprimé. Le vignoble est surstocké en vin sur lattes et j'imagine mal les vignerons vendre eux-mêmes ces bouteilles. »
Du côté des négociants, le décret stipulant l'interdiction de vendre du vin sur lattes entre eux tarde à paraître. Depuis une dizaine d'années, il est plus rémunérateur pour un vigneron de vendre du vin sur lattes ou clair que des bouteilles terminées à leurs clients, mais jusqu'à quand ?
Pour encadrer la croissance et éviter une crise semblable à celle de 1993, plusieurs outils sont mis en place. Dans l'immédiat, le Syndicat des vignerons de la Champagne se réjouit d'avoir obtenu l'accord de l'Inao de tester pendant cinq ans le fameux VCI, le volume complémentaire individuel. Objectif du syndicat : que chaque vigneron puisse disposer à terme d'une demi-récolte de réserve, soit 8 000 kg/ha, pour faire face aux aléas climatiques fréquents dans cette région septentrionale.
Pour que les vignerons puissent se constituer leur réserve, le rendement butoir sera porté à 15 500 kg/ha, contre 13 000 kg/ha en 2006. Mais « si les ventes descendent en dessous des 300 Mcols, nous saurons, comme par le passé, abaisser le niveau de classement à 11 000 kg par exemple, pour adapter l'offre à la demande », dit Patrick Le Brun, président du syndicat.
Outre sa dimension économique, la réserve individuelle vise à améliorer les pratiques culturales. Une fois que les vignerons l'auront constituée, ils accepteront de traiter moins les vignes et maîtriseront mieux les rendements.

A plus long terme, l'aire délimitée de l'appellation sera agrandie. Mais ce dossier en est toujours à sa première phase, celle où la situation de chaque commune est étudiée. A partir de 2009, la commission d'enquête passera à l'examen parcellaire, beaucoup plus délicat étant donné le prix de l'hectare. « Plusieurs milliers d'hectares devraient rejoindre l'aire d'appellation, explique Daniel Lorson. Ce qui ne veut pas dire qu'ils seront tout de suite plantés. Les droits de plantation seront distribués au compte-goutte pour ne pas déséquilibrer le marché. La surface ne progressera pas de plus de 1 % par an . »

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