La flavescence dorée a contaminé de nouvelles zones en 2013 dans les Bouches-du-Rhône, le Gard, le Vaucluse, le Rhône et les Charentes. Elle a également été détectée sur quelques plants en Côte-d'Or. En 2012, elle avait déjà très fortement progressé en Saône-et-Loire et dans la Drôme. Cette maladie est provoquée par un phytoplasme qui circule dans la sève des pieds atteints.
Ce parasite est véhiculé par la cicadelle Scaphoïdeus titanus, qui l'acquiert en se nourrissant sur un pied malade et le transmet ensuite à d'autres ceps. La flavescence dorée a un impact sur les rendements et il n'existe aucune solution curative pour l'éradiquer. C'est une maladie de quarantaine. La lutte est régie par l'État. Un arrêté ministériel et des arrêtés préfectoraux imposent la prospection, l'arrachage des parcelles au-delà de 20 % de pieds atteints et des traitements insecticides dans des périmètres de lutte obligatoire (PLO). Ceux-ci sont institués après la découverte de contaminations. Ils concernent plus de la moitié du vignoble français (456 000 ha en 2011).
1. Prospectez vos vignes pied par pied
En août et septembre, inspectez vos parcelles cep par cep à la recherche de symptômes de la maladie. Ceux-ci se caractérisent par un enroulement et une coloration des feuilles (rougissement sur cépages rouges ou jaunissement sur cépages blancs), le dessèchement des grappes et le non-aoûtement des rameaux. « Il faut apprendre à les reconnaître. Au début, ce n'est pas évident, surtout dans des vignobles où la maladie n'est pas présente. Or, cette méconnaissance peut retarder la mise en place de la lutte et compromettre son efficacité », insiste Jacques Grosman.
Dans les périmètres de lutte obligatoire, la prospection est organisée par les Fredon (Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles), les syndicats de vignerons et les chambres d'agriculture, en lien avec la Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf). Si vous détectez des pieds atteints, vous devez le signaler à cette dernière. Surveillez aussi les abords des parcelles. « Les vignes à l'abandon et les repousses de porte-greffes peuvent être des réservoirs pour la maladie », prévient Jacques Grosman.
2. Arrachez les ceps atteints
Les pieds contaminés doivent être marqués puis éliminés avec leurs racines. Si vous ne pouvez pas les arracher immédiatement, coupez leur végétation afin qu'elle ne soit pas piquée par Scaphoïdeus titanus. Il est également conseillé de détruire les bois de taille. Si la parcelle présente un taux de pieds atteints supérieur au seuil fixé par l'arrêté préfectoral (20 % jusqu'ici en général), elle doit être entièrement arrachée, y compris si elle est située hors du périmètre de lutte obligatoire.
3. Effectuez les traitements obligatoires
Dans les vignobles en périmètres de lutte obligatoire non aménagée et dans les vignes mères de greffons et de porte-greffes, tous les vignerons doivent effectuer des traitements contre la cicadelle de la flavescence dorée (larvicides et/ou adulticide). Les dates d'intervention sont définies en lien avec la Draaf. Ces traitements peuvent être ordonnés alors que le vignoble ne compte pas de pieds contaminés. « Il faut respecter ces obligations de traitement. Cela coûte plus cher de ne pas traiter. Cette maladie est très grave. Les quelques vignerons qui refusent de traiter peuvent annihiler l'effort collectif », souligne Serge Vigano.
4. Privilégiez les insecticides les plus doux pour les auxiliaires
Il existe de nombreux produits homologués contre la cicadelle de la flavescence dorée. « Si vous avez trois traitements à effectuer, nous préconisons de ne pas appliquer seulement des pyréthrinoïdes, en raison de leur impact sur les auxiliaires et des risques d'une possible résistance à moyen terme, explique Laurent Pillon. Le chlorpyriphos-méthyl est un peu plus respectueux des auxiliaires que les pyréthrinoïdes. D'autre part, Luzindo de Syngenta (thiaméthoxam et chlorantraniliprole) introduit une nouvelle option parmi les spécialités disponibles. » La firme met en avant la persistance d'action de son insecticide (plus de trente-cinq jours) et son profil « doux » envers les typhlodromes.
Serge Vigano préconise de son côté Jokari, un pyréthrinoïde, « en deuxième ou troisième traitement. Ce produit a une forte efficacité larvicide et adulticide. Il permet une action de choc et sa rémanence d'un mois est plus élevée que d'autres spécialités sur le marché. Il est en outre non classé ».
De nombreux insecticides sont mixtes, utilisables à la fois contre la cicadelle de la flavescence dorée et celle des grillures. « Mais si vous souhaitez réaliser un traitement bivalent, les préconisations de stades d'application ne coïncident pas toujours », informe Laurent Pillon.
5. Restez vigilant dans les zones en lutte aménagée
La lutte obligatoire repose généralement sur trois traitements insecticides. Mais la Draaf peut rendre certains de ces traitements facultatifs, dans le cadre d'une lutte aménagée. Celle-ci n'est possible que sous certaines conditions : surveillance de la zone par les Fredon ou par un autre organisme à vocation sanitaire, prospection d'au moins 20 % des parcelles par an, assainissement des vignes abandonnées, arrachage des ceps atteints, faibles niveaux de populations de Scaphoïdeus titanus, etc.
« En 2012-2013, un tiers des surfaces en périmètre de lutte obligatoire étaient en lutte aménagée, avec aucun à deux traitements obligatoires selon les zones, indique Jean-Michel Trespaillé-Barrau. Mais l'aménagement de la lutte ne signifie pas que la vigilance peut être relâchée. Il faut réaliser correctement le ou les traitements demandés. » Les surfaces en lutte aménagée ont progressé de 43 % entre 2008 et 2010 au niveau national. Ce dispositif concerne en particulier l'Aquitaine, où « les viticulteurs réalisent moins d'un traitement en moyenne, mais où les prospections sont nombreuses », signale Jacques Grosman.
À l'inverse, le Languedoc-Roussillon compte nettement moins de surfaces en lutte aménagée. Les vignerons sont moins enclins à réaliser les traitements obligatoires et les arrachages. « En zone aménagée, les producteurs sont dans un cercle vertueux. Mais dans les périmètres de lutte obligatoire non aménagée, il arrive souvent que la maladie progresse car la surveillance des vignes n'est pas suffisante », observe Jean-Michel Trespaillé-Barrau.
ET EN BIO ? Seule solution : le pyrèthre naturel
Les vignerons en bio installés dans des zones en lutte obligatoire ne peuvent utiliser qu'un seul produit : le Pyrévert, à base de pyrèthre naturel. Homologué depuis 2009, il assure une action de choc par contact. Il s'applique de préférence sur les larves, son efficacité étant moindre sur les cicadelles adultes. Mais le Pyrévert est coûteux et a un impact sur les auxiliaires. De plus, il est sensible au lessivage et à la lumière. « Exposé au soleil pendant plus d'une heure, il est totalement dégradé. Mais au vignoble, le Pyrévert reste actif là où les cicadelles sont présentes, c'est-à-dire à l'ombre, sur la face inférieure des feuilles, explique Nicolas Constant, ingénieur-conseil à Sudvinbio. Sur un essai de traitement réalisé à la mi-journée et par forte chaleur (30°C), le Pyrévert a même montré de bons résultats, souligne l'ingénieur, qui s'attendait plutôt au contraire. Ce produit ne semble pas plus contraignant que d'autres. »
Toutefois, plusieurs échecs ont été relevés avec ce produit dont beaucoup restent inexpliqués.
Une étude menée en 2012 par le Service régional de l'alimentation et la Fredon Aquitaine sur cinquante parcelles en bio indique que les cas d'échecs peuvent s'expliquer par une mauvaise qualité de pulvérisation. Elle met aussi en évidence l'importance d'épamprer juste avant les traitements et de ne pas appliquer de Pyrévert avec du cuivre ou du soufre.
Au Groupe de recherche en agriculture bio (Grab), Marc Chovelon a constaté qu'associer du saccharose à du Pyrévert au moment du pic des éclosions permettait de doubler l'efficacité du produit. Cet effet était encore plus net lorsque cette application était précédée d'une application de sucre seul lors des toutes premières éclosions.
Un nouvel arrêté renforce la lutte obligatoire
Un nouvel arrêté national de lutte contre la flavescence dorée est paru au JO le 31 décembre dernier. Il est entré en application le 1er janvier 2014. Jusqu'à présent, les arrêtés préfectoraux imposaient de prospecter les vignes uniquement dans les zones touchées par la maladie. Désormais, la prospection pourra être ordonnée partout, « si l'évaluation du risque sanitaire le justifie ».
Le nouvel arrêté ministériel élargit aussi le champ d'application du traitement à l'eau chaude. S'il existe un risque de contamination des vignes mères de porte-greffe qui n'expriment pas de symptômes, le traitement à l'eau chaude pourra être rendu obligatoire pour le matériel végétal issu de ces vignes mères. Le risque sera évalué dans un rayon de 500 mètres autour de la parcelle suspecte. Par ailleurs, le traitement à l'eau chaude des plants avant la plantation peut être ajouté à la liste des moyens de lutte dans les arrêtés préfectoraux. Le nouvel arrêté prévoit également des dérogations en matière de traitements dans les vignes mères. Pour les parcelles de vignes mères de greffons situées hors du périmètre de lutte, les applications d'insecticides peuvent être remplacées (sur demande de dérogation) par un traitement à l'eau chaude. Pour les parcelles de vignes mères de porte-greffes situées hors du périmètre de lutte, les pépiniéristes pourront les traiter avec du Pyrévert, sous réserve de réaliser un traitement des plants à l'eau chaude.