Retour

imprimer l'article Imprimer

VIGNE

Michel Duclos prône une taille équilibrée

Clara de Nadaillac - La vigne - n°215 - décembre 2009 - page 36

Michel Duclos conseille de nombreux domaines en France et à l'étranger pour la taille. Selon lui, tout est question d'équilibre entre la charge et la vigueur, et d'aération du pied.
 © C. DE NADAILLAC

© C. DE NADAILLAC

CETTE VIGNE A DEUX ANS ET DEMI. Elle a été plantée par Michel Duclos. Elle est conduite selon ses conseils. Les pieds sont droits et les bois bien étalés. A vue de nez, on dirait qu'elle a quatre ou cinq ans. © C. DE NADAILLAC

CETTE VIGNE A DEUX ANS ET DEMI. Elle a été plantée par Michel Duclos. Elle est conduite selon ses conseils. Les pieds sont droits et les bois bien étalés. A vue de nez, on dirait qu'elle a quatre ou cinq ans. © C. DE NADAILLAC

Michel Duclos arrive dans une Audi récente, un chapeau noir vissé sur la tête, son chien Lilou à ses côtés. La cinquantaine, costaud et volubile, il a l'aplomb des gens à qui tout sourit.

La journée démarre sur la parcelle de l'un de ses amis, en biodynamie. Il l'a plantée, il y a de cela deux ans et demi. A peine arrivés, la première question fuse. « Quel âge vous lui donnez à cette vigne ? » Moi : « Cinq ans ? » Faux. « C'est ce que disent la plupart des gens. Mais non, elle n'a que deux ans et demi. C'est l'un des résultats de ma façon de procéder avec la taille et l'épamprage précoce », explique-t-il.

Puis il embraye sur des questions de physiologie. « Quels sont les quatre éléments essentiels au développement d'une graine ? » Le sol, l'eau, l'air et le soleil. « Quel est l'élément climatique qui améliore la structure du sol sur les dix premiers centimètres ? » Le gel.

« Comment reconnaît-on un bois à fruits ? » Il reste, en général et suivant les cépages, un petit bout de la queue du raisin, au niveau du troisième et du quatrième bourgeon.

« Qu'est-ce qu'un joli bois ? » Un bois de 1 cm de diamètre, aoûté jusqu'au fil du haut.

« Que signifie la présence de mousse sur un pied de vigne ? » La plupart du temps, cela implique qu'il est trop chargé. Il n'arrive plus à mettre en réserve, et par conséquent, l'écorce ne se renouvelle plus.

C'est sous cette avalanche de questions que le conseiller commence à m'expliquer les fondamentaux de sa vision de la taille, à commencer par la formation de la vigne.

Une première taille deux mois après la plantation

Avant de débuter toute plantation, Michel Duclos conseille d'aérer le sol en profondeur, puisque les plantes ont besoin d'air ; et bien sûr de le débarrasser des vieilles racines et des adventices. Puis, il recommande d'installer des marquants bas, 20 cm en dessous du niveau du fil de pliage pour qu'ils ne gênent pas au moment de la taille.

Arrive la plantation à proprement parler, au mois d'avril ou mai, période la plus propice pour lui. Michel Duclos indique que la réussite de l'opération dépend de la régularité de la pousse. Il suggère de couper les racines à 2 ou 3 cm. Et de bien placer le greffon contre le marquant, à 4 cm au-dessus de la terre. Quinze jours après, il préconise de travailler le sol. Deux mois environ après plantation, intervient la première « taille ». Pour Michel Duclos, il s'agit de ne conserver qu'une seule pousse, la plus droite. On l'attache et on la coupe 10 cm en dessous du fil de pliage. Pendant l'été, les entre-cœurs poussent. Le conseiller recommande de couper ceux qui sont à moins de 30 cm du sol, puis d'effectuer les travaux classiques, comme le travail du sol et les traitements.

Un pied droit aéré, dont on ne coupe pas les courants de sève

L'automne arrive. Il faut alors palisser la vigne de manière classique. L'hiver suivant la plantation, Michel Duclos coupe le bois à 10-15 cm en dessous du fil, et garde trois ou quatre bourgeons en haut de la baguette. Il élimine les autres bourgeons, jusqu'au greffon. Le but est d'obtenir un pied droit. Le second hiver, le tailleur opte pour le type de taille qu'il désire, en conservant les principes de base de Michel Duclos : un pied droit, aéré, qui respecte le potentiel de chaque cep et dont on évite de couper les courants de sève.

Les vignes taillées selon la méthode de ce conseiller sont facilement reconnaissables : elles sont ordonnées. En Guyot simple ou mixte, ainsi qu'en cordon de Royat unilatéral, toutes les astes sont du même côté, « pour un bon étalement » précise-t-il. De même, tous les bois sont bien disposés dans le plan de palissage, et espacés régulièrement. « L'objectif est de bien aligner et d'étaler toutes les grappes le long du fil de pliage. »

Pour arriver à ce résultat en Guyot simple ou mixte, il laisse quatre ou cinq bourgeons sur la baguette, suivant la vigueur du cep et en ayant ôté environ un bourgeon sur deux. Ainsi, la vigne s'étale. De même, en Guyot double, il laisse à peu près trois bourgeons sur chaque bois, toujours de manière espacée. En cordon de Royat bilatéral, trois ou quatre bourgeons sur chaque bras suffisent et, en unilatéral, on en laissera cinq ou six.

Michel Duclos estime qu'il faut raisonner la charge des vignes pour les équilibrer. Sinon, elles se fatiguent. Il estime qu'une vigne est équilibrée lorsqu'elle a des bois d'un centimètre de diamètre, aoûtés jusqu'en haut et qui portent des entre-cœurs. Dans ce cas de figure, chaque pousse portera à peu près deux grappes, de 150 à 200 grammes.

Ne pas négliger les travaux en vert

Pour obtenir un bon équilibre et une bonne vigueur, Michel Duclos compte également sur les travaux en vert : ébourgeonnage, dédoublage et épamprage. Ces opérations facilitent l'aération et l'ensoleillement des grappes.

Ce paysan, comme il aime à se qualifier, est à présent le conseiller de très nombreuses propriétés en France, notamment auprès de domaines prestigieux et également à l'étranger, aux Etats-Unis comme en Toscane. Sur certaines, il prodigue des cours pratiques de taille ; sur d'autres, il est consultant à l'année.

Selon lui, le succès qu'il rencontre provient de sa bonne compréhension de la nature. Son mode de taille, que l'on pourrait qualifier de radical, amène aussi une simplification des travaux en vert, une réduction de la pourriture grise et un renforcement de la vigueur des ceps. Deux ans après leur plantation, ils portent déjà quelques grappes.

Pourquoi ils font appel à lui

Jean-Paul Texier, des Vignobles Travers (Fronsac, Gironde) :

« Quand j'ai rencontré Michel Duclos, notre vignoble tombait en ruine. Depuis 1982, les rendements étaient très bas sur certaines parcelles, de l'ordre de 25 hl/ha. Nous avons essayé les engrais et les engrais foliaires. Rien n'y a fait. Un jour, j'ai visité l'un des domaines que Michel Duclos suit. Il m'a tout de suite plu. C'était un vignoble plaisant à l'œil, bien ordonné. C'est ce que je cherchais. Après discussion avec lui, j'ai appris que sur ces 18 ha, il n'y avait que deux personnes, ce qui est très peu pour un tel résultat. Nous avons donc commencé à requérir ses conseils. Et à présent, les rendements ont doublé ! »

Bertrand Bardet, chef de culture du domaine Jean Faure (Saint-Emilion, Gironde) :

« Nous avons fait appel à Michel Duclos pour retrouver un équilibre à la taille, ne pas laisser trop de charge sur la vigne. Il est simple ; c'est la personne du terroir qui connaît bien son métier. Les gens aiment travailler avec lui. Sa façon de faire évite une partie des vendanges vertes et beaucoup d'effeuillage. Rien qu'en vendanges vertes, c'est du simple au double au niveau temps de travail. Et ainsi, cela revient bien moins cher. »

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

PARCOURS

Age : 54 ans.

Fils d'agriculteur en polyculture dans l'Entre-deux-Mers.

Champion national de taille.

Chef de culture à Saint-Emilion, pendant quinze ans.

Consultant et conseiller depuis une dizaine d'années.

Il intervient sur une cinquantaine de propriétés, en France comme à l'étranger.

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :