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ACTUS - POUR OU CONTRE

Faut-il lever l'obligation de livrer les marcs et les lies aux distilleries ?

Propos recueillis par Aude Lutun - La vigne - n°216 - janvier 2010 - page 20

Une partie de la production pense que oui depuis que les distilleries font payer le transport.

Depuis le 1er août 2008, les aides européennes accordées à la distillation des prestations viniques ont chuté. Les viticulteurs n'en touchent plus et les distilleries beaucoup moins qu'avant. Ce changement pénalise les régions productrices de vins blancs, dont les marcs et les lies sont moins riches en alcool et en tartre que ceux des vins rouges. Dans ces régions, les distillateurs ont décidé de faire payer une partie du transport aux vignerons. En Charente et en Alsace, cela ne passe pas. Les vignerons veulent pouvoir se tourner vers d'autres modes d'élimination des marcs et des lies que la distillation, comme l'épandage. Un groupe de travail, présidé par Jérôme Despey, président du conseil des vins de FranceAgriMer, va étudier d'autres pistes dès février 2010.

Sans attendre, des régions productrices de blancs veulent la levée de l'obligation de livrer les prestations viniques aux distilleries, ce que chaque exploitation peut déjà faire en effectuant une demande au ministère de l'Agriculture. Dans les régions productrices de vins rouges, cette question ne fait pas débat, car les distilleries font culturellement partie de la filière, et ces vignerons n'ont pas à payer de transport. Les distilleries, quant à elles, mettent en avant leur rôle qualitatif et dépolluant et la nécessité de conserver un outil de distillation en cas de besoin.

Le Point de vue de

CONTRE

« Si l'obligation est levée, les distilleries fermeront »

Hubert Burnereau, président de la Fédération nationale des distilleries coopératives viticoles

Hubert Burnereau, président de la Fédération nationale des distilleries coopératives viticoles

« Nous militons pour le maintien de l'obligation de livrer les marcs et les lies aux distilleries pour plusieurs raisons. Premièrement, la distillation est une mesure qualitative avec une traçabilité physique et administrative. Cela permet d'éviter la filtration excessive des vins ou le surpressurage des marcs. Les 500 000 hectolitres d'alcool pur issus de la distillation des prestations viniques représentent un potentiel de 5 Mhl de vin de qualité inférieure qui ne se retrouvent pas sur les marchés. La seconde raison est environnementale.

Nous sommes contrôlés par les Drire et les Agences de l'eau, ce qui donne l'assurance que les marcs et les lies sont traités dans les conditions optimales. Nous dépolluons de manière efficace, comme cela a été rappelé dans l'étude commandée par la Commission européenne au cabinet Oréade Breche. Troisièmement : si nous ne traitons plus de marcs et de lies de manière suffisante, nos entreprises fermeront. Qui d'autres que les distilleries peuvent intervenir lors des distilleries de crise ? Ou pour traiter les DPLC ? La réforme de l'OCM nous a pénalisés, surtout dans les régions produisant des vins blancs. A cette réforme s'est ajoutée la baisse du prix de l'alcool de 25 % en un an. De plus, le marché du tartrate de chaux reste difficile avec un prix divisé par trois en quelques années suite aux importations en provenance de Chine. L'augmentation du taux de prestation vinique de 7 à 10 % nous permet de requalifier une partie plus importante des alcools dans la partie subventionnée, mais d'autres solutions doivent être trouvées au plan local via la création d'unions qui permettront des "ouvertures de capitaux." »

Le Point de vue de

POUR

« Nous voulons bien donner nos marcs et nos lies à ceux qui en tireront une richesse »

Gérard Boesh, président de l'Ava (Association des viticulteurs d'Alsace)

Gérard Boesh, président de l'Ava (Association des viticulteurs d'Alsace)

« La question n'est pas simple ! Nous avons la nécessité d'être une filière propre et de gérer nos déchets. C'est une priorité. La redistribution des cartes au niveau de l'OCM fait que la distillation des marcs et des lies n'est plus rentable en Alsace. Les distillateurs perdent de l'argent et les viticulteurs aussi, en payant le transport 30 € par tonne en 2009 et 40 € par tonne en 2010, malgré le passage du taux de prestation vinique de 7 à 10 %. Nous nous retrouvons face à un seul interlocuteur qui est en situation de monopole. Il faut donc trouver d'autres voies. Nous allons étudier très prochainement toutes les pistes possibles et lancer des expérimentations avec FranceAgriMer dès la récolte 2010. Il nous faut des études dignes de ce nom avec tous les paramètres, dont le bilan carbone, qui n'est pas nécessairement favorable aux distilleries. En Allemagne, il n'y a pas d'obligation de livrer et il n'y a jamais eu de problème de pollution, alors que leur zone d'épandage est assez restreinte. Il ne faut pas croire qu'il n'y a que les distilleries ! Nous voulons bien donner nos marcs et nos lies à tous ceux qui en tireront une richesse… »

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