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DOSSIER - Le palissage sans se planter

Le palissage sans se planter

CLARA DE NADAILLAC - La vigne - n°217 - février 2010 - page 16

Le palissage d'une plantation représente un coût financier non négligeable. Il doit durer le plus longtemps possible. Pour ces deux raisons, mieux vaut bien réfléchir avant de se lancer. Voici quelques pistes pour vous y aider.
La pose de piquets est amplement simplifiée par l'utilisation d'un enfonce-pieux. © P. ROY

La pose de piquets est amplement simplifiée par l'utilisation d'un enfonce-pieux. © P. ROY

Piquets en acacia. © J.-M. LECLERCQ/ASSO LPG

Piquets en acacia. © J.-M. LECLERCQ/ASSO LPG

Installation du piquet de tête

Installation du piquet de tête

Fixation de l'amarre

Fixation de l'amarre

Implantation de l'amarre

Implantation de l'amarre

Installation d'un fil en inox sur un piquet en bois. © J.-M. LECLERCQ/ASSO LPG

Installation d'un fil en inox sur un piquet en bois. © J.-M. LECLERCQ/ASSO LPG

Avec Gripple, les raccords sont plus faciles à réaliser.

Avec Gripple, les raccords sont plus faciles à réaliser.

Quels facteurs prendre en compte avant de choisir son palissage ?

Avant même d'établir son palissage, plusieurs critères sont à considérer.

Le sol tout d'abord : son acidité, sa texture et sa profondeur. Ainsi, sur un sol acide, on privilégiera un piquet en bois ou à galvanisation élevée. A l'inverse, une parcelle au pH neutre pourra être palissée avec un piquet en acier ou avec une galvanisation en bande. Sur un sol argileux, la section sera plus importante, car « la terre gonfle et se rétracte. Si le piquet est de petit diamètre, il bougera plus qu'un gros », explique Jean-Henri Soumireu, du Comité de développement du Beaujolais. En revanche, sur des terres plus sablonneuses, on pourra opter pour une section moindre.

Si la plantation est dans le sens du vent, il faudra moins de précautions que si elle y est perpendiculaire. L'orientation des rangs doit être définie en fonction de la topographie de la parcelle, de sa pente et de son exposition.

Le cépage est également déterminant. Un port érigé conduit sur une faible hauteur de feuillage se contentera d'un palissage moins conséquent qu'un port retombant avec une grande hauteur de feuillage. Le porte-greffe joue lui aussi un rôle dans l'expression de la vigueur.

Les objectifs de production (vin haut de gamme ou vin de table) pèsent également sur le choix du palissage, car ils déterminent la surface foliaire, donc la hauteur des piquets.

Le mode de taille et les objectifs de mécanisation de l'exploitant doivent également entrer en ligne de compte. Ainsi, un relevage mécanique avec une machine Tordable, Ero ou DMP Concept, appellera des ficelles releveuses. En revanche, un relevage manuel ou avec la RVL de Pellenc nécessitera la mise en place de fils releveurs métalliques ou polyester.

Les derniers facteurs à prendre en compte sont la durée de vie envisagée pour la plantation, la possibilité ou non d'utiliser un enfonce-pieux, l'esthétique et le budget disponible.

Pour quel tuteur opter ?

Les tuteurs sont mis en place en même temps que les plants. C'est donc le premier élément du palissage à être installé, bien avant les piquets ou les amarres. Ils assurent la bonne tenue du jeune plant et du manchon de protection, s'il y en a un.

Il en existe en bambou, plastique, acacia, châtaignier, acier ou acier galvanisé.

L'association LPG conseille de laisser les tuteurs en place entre cinq et huit ans, le temps de former un pied bien droit. La longévité du tuteur est donc le premier paramètre à prendre en compte lors de l'achat. Les bambous, par exemple, ne durent que deux à trois ans. En revanche, ils se désagrègent sur place. Il n'y a donc pas besoin de les enlever.

La mécanisation de la parcelle doit par ailleurs être considérée. Dans le cas d'une vigne désherbée mécaniquement, il est primordial de disposer de tuteurs suffisamment robustes pour déclencher l'effacement de l'intercep. C'est le cas du bois ou de l'acier. Par ailleurs, si l'on souhaite effectuer de la taille rase de précision, les tuteurs métalliques sont à proscrire. La sécurité du personnel est un autre critère à considérer. Les tuteurs métalliques sont de loin les plus dangereux.

Quel manchon choisir ?

Il existe de très nombreux types de manchons de protection : opaques, translucides, grillagés , pleins, etc. Leur intérêt est triple : limiter les risques de brûlure par les désherbants, éviter les dégâts de gibiers et favoriser la pousse des plants. Ils sont eux aussi mis en place lors de la plantation.

La chambre d'agriculture de Charente a réalisé un essai en 2007 sur de l'ugni blanc pour voir l'impact des différentes protections sur le développement végétatif des jeunes plants. L'essai a conclu qu'il valait mieux opter pour des manchons translucides. Les opaques et, dans une moindre mesure, les teintés inhibent la pousse du cep. La matière, la forme et la hauteur ont beaucoup moins d'importance. On privilégiera notamment les manchons en plein (et non les grillagés) si l'on souhaite désherber chimiquement.

Le lycée d'Orange a lui aussi mené des essais sur les manchons. L'un de ses enseignements a été de déconseiller fortement les poches à former ou les poches grillagées dans les parcelles venteuses, car elles claquent sur les ceps et brisent les sarments.

Quand installer son palissage ?

La période la plus propice se situe vers mars-avril, c'est-à-dire après les grands froids et avant le début des travaux de printemps. Le palissage doit être mis en place le printemps suivant la plantation des ceps. Jean-Marie Leclercq, conseiller en palissage de l'association LPG, recommande néanmoins de planter les piquets de tête et les amarres six mois avant de tirer dessus, afin qu'ils soient solidement ancrés. Le « Guide des vignobles Rhône-Méditerranée », édité par les chambres d'agriculture du Languedoc-Roussillon, l'IFV et la SRPV, va jusqu'à conseiller de fixer les amarres dès la plantation de la vigne.

Quel type de piquet acheter ?

L'offre en piquets est pléthorique : pin injecté, acacia, châtaignier, acier galvanisé, inox, PVC, béton… Il est de plus en plus difficile de faire son choix. Pour y parvenir, il faut prendre en compte la longévité, la flexibilité, la facilité de mise en place ou encore le prix d'achat. A titre d'exemple, les piquets flexibles de faible section facilitent les vendanges mécaniques. En revanche, ils ploient plus facilement sous le poids de la végétation et ont une tenue moindre dans les sols mouvants.

La chambre d'agriculture de l'Aude a mené des essais durant vingt ans sur différents types de piquets en bois, métalliques, en béton et en PVC. Au final, sur ces quatre familles, seules deux sont vraiment adaptées au palissage de la vigne : les bois et les métalliques.

Les piquets en bois ont une bonne tenue au sol, ainsi qu'une bonne résistance mécanique. Ils sont plus esthétiques que les métalliques.

En revanche, ils sont parfois difficiles à mettre en place et, suivant les essences, ils ont une durée de vie limitée. Il faut leur ajouter des pointes et des crampillons pour fixer les fils. Tout changement de hauteur de palissage est compliqué. Ils nécessitent également beaucoup d'entretien, que ce soit pour changer les piquets pourris ou remettre des pointes manquantes. Pour toutes ces raisons, le Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC) recommande de les utiliser principalement en tant que piquet de bout de rang. De même, dans des parcelles venteuses, Gilbert Cazals, responsable du domaine expérimental de Cazes, dans l'Aude, recommande de palisser les deux premiers rangs exposés au vent avec des piquets en bois, plus résistants que des métalliques. Ou au moins d'alterner piquets métalliques et en bois.

Les piquets métalliques, surtout galvanisés, ont aussi de nombreux attraits. Ils sont résistants dans le temps, ne nécessitent aucun entretien et sont flexibles. Ils sont adaptés à la mécanisation et sont très modulables : il est aisé de remonter la hauteur de palissage ou de la baisser grâce aux encoches. Pour toutes ces raisons, la plupart des instituts techniques recommandent de les utiliser en tant que piquets de rang.

Fortement déconseillés par la chambre d'agriculture de l'Aude, les piquets en béton ne sont pas assez flexibles. De même, le PVC recyclé est contre-indiqué. Ce que confirme le groupe de travail régional Midi-Pyrénées, composé des chambres d'agriculture de la région et de l'IFV : les piquets en plastique et en matériaux composites sont sensibles au gel et aux grosses chaleurs. Ils rompent aisément, notamment lors de vendanges mécaniques.

Comment choisir son piquet en bois ?

Plusieurs essences sont disponibles, que ce soient des feuillus comme le châtaignier ou l'acacia, ou des résineux (pin, épicéa).

Le pin est, d'après l'étude de la chambre d'agriculture du Gard, l'essence la plus intéressante, car son imprégnation fongicide en autoclave est très efficace. Ce bois résiste donc très bien aux champignons. En revanche, il est cassant.

Acacia et châtaignier sont moins intéressants. Ils ont tendance à être coupés trop jeunes, ce qui diminue leur longévité. De plus, les traitements contre les champignons imprègnent irrégulièrement ces bois, ce qui leur confère une moindre résistance à la pourriture. L'acacia résiste naturellement bien au dépérissement. De ce fait, c'est l'essence la plus indiquée après le pin. En revanche, il vaut mieux éviter le châtaignier. Le 5 novembre dernier, la chambre d'agriculture de Charente organisait une journée dédiée au palissage. Ses intervenants ont insisté sur le fait que les piquets en châtaignier sont les plus onéreux au final, même s'ils sont les moins chers à l'achat. « Ils durent peu. Il faut les changer très souvent. Même si le piquet en lui-même ne coûte rien, la main-d'œuvre pour le remplacement a un coût. Installer des piquets en châtaignier n'est donc pas un bon calcul à long terme », expliquait l'un des experts.

Lorsqu'on opte pour du bois dans le cas de vendanges mécaniques, il faut que le diamètre ne soit pas trop important.

Par ailleurs, lorsqu'on souhaite réaliser soi-même des piquets, il faut opter pour des arbres d'une forêt orientée plein sud, où ils auront poussé plus lentement. Le bois sera plus résistant. Pour la même raison, mieux vaut choisir un bois avec beaucoup de cœur.

Comment opter pour le bon piquet métallique ?

Il existe plusieurs sortes de piquets métalliques : en acier, en inox, en acier galvanisé en bande (Sendzimir ou Galfan) ou en acier galvanisé par trempage à chaud (ou immersion).

Les piquets en acier (cornières ou profilés U) sont les moins chers. Ils sont simples à installer et flexibles. En revanche, ils rouillent vite et polluent un peu dans les moûts de raisin. Pour y pallier, on peut opter pour des piquets galvanisés.

La galvanisation consiste à revêtir l'acier d'une couche de zinc, ou de zinc et aluminium, plus ou moins épaisse. Elle constitue ainsi une protection contre la corrosion. Cette couche peut être apportée de diverses manières.

La galvanisation par trempage à chaud (également appelée galvanisation par immersion) consiste à plonger le piquet déjà formé dans un bain de zinc en fusion. La couche de zinc est importante. Ce type de revêtement est particulièrement conseillé dans le cas de sols acides ou sur les parcelles proches d'un front de mer. Il dure environ trente à trente-cinq ans.

La galvanisation « en bande », (la Sendzimir ou la Galfon) repose sur la projection, sur les bandes en acier non encore profilées, de zinc (pour Sendzimir) ou d'un alliage zincaluminium (pour Galfan). Le revêtement est souvent trop mince aux pliures et aux points de découpe, ce qui entraîne des risques de rouille. Ce type de piquet convient mieux à des sols à pH neutre et résiste entre douze et seize ans.

Les piquets en inox conviennent, quant à eux, à tous les types de sols. Mais leur coût élevé freine leur développement. De plus, ils ne peuvent pas être utilisés avec des fils en acier galvanisé, une réaction chimique se produisant alors entre les deux métaux.

La section des piquets doit être définie une fois le matériau choisi. On privilégiera les grosses sections pour les sols faciles (sable, limon, argilo-calcaire), tandis que les sols difficiles (calcaire, tuffeau) se contenteront de plus petits diamètres. Les grosses sections ont en effet plus de tenue dans les sols mouvants ; ceux de faible section s'enfoncent plus facilement.

Par ailleurs, les viticulteurs relevant manuellement leurs fils choisiront plutôt des linguets enfoncés dans le piquet. A l'inverse, ceux utilisant une releveuse privilégieront les linguets en relief.

Enfin, il faut porter une grande attention à l'origine de l'acier. Mieux vaut le choisir neuf et rigide. S'il est recyclé, il sera moins résistant.

Comment planter un piquet ?

Il est fortement recommandé d'installer les piquets en période humide, sur terrain préparé. Sur les sols difficiles, il vaut mieux réaliser un avant-trou avec une tarière, par exemple.

Pour enfoncer un piquet métallique, il faut utiliser un accessoire de protection qui évite une déformation du haut du piquet sous l'effet de l'enfonce-pieux.

Ensuite, il faut espacer les piquets de cinq mètres maximum et les enfoncer de 25 à 30 % de leur hauteur. Sur les parcelles exposées au vent, il faut augmenter la section ou diminuer l'espacement entre les piquets.

Comment positionner son piquet de tête ?

Il faut l'incliner de 20 à 30° par rapport à la verticale. Pour trouver cet angle, il faut mesurer un mètre à la verticale du piquet, puis 40 cm à l'horizontale. On a alors l'angle de 20°. La réalisation d'une équerre peut faciliter cette installation. Une fois le piquet de tête installé, on passe à l'amarre.

Comment choisir son amarre et la fixer ?

La nature du sol est le principal critère de choix de l'amarre. Selon Gilbert Cazals, dans les sols profonds ou lourds, mieux vaut opter pour une tige avec assiette (ou hélice). L'association LPG préconise également des cornières dans de telles terres. En revanche, sur les sols caillouteux ou pierreux, les tiges avec ressorts, dites amarres à percussion, sont mieux adaptées. Le 5 novembre dernier, en Charente, les distributeurs ont insisté sur le fait qu'une amarre non soudée tient aussi bien qu'une amarre soudée.

Le point d'ancrage est primordial. Il détermine la bonne tenue de l'ensemble du palissage. Il doit être situé à une distance égale à 80 % minimum de la hauteur hors sol du piquet de tête. Puis, le fil du haut doit être fixé à 20 à 30 cm du haut du piquet. Celui du bas doit être attaché à équidistance entre le sol et le fil d'amarre du haut. Si le palissage est bas, ou si les piquets sont très résistants, un seul fil haut suffit.

Quel type de fil installer ?

Trois types de fils sont actuellement disponibles sur le marché : acier, inox et polyester. Le choix du fil sera déterminé par la résistance qu'il doit opposer, son aptitude à ne pas trop s'allonger et à ne pas trop rouiller. « Il faut bien calculer la charge qui va reposer sur le fil et choisir sa résistance en fonction, avertit Jean-Marie Leclercq. Il ne faut pas dépasser la limite d'élasticité, sinon, le fil sera déformé en permanence. » Ainsi, un fil d'amarre devra posséder une résistance à la rupture bien supérieure à celle d'un fil de palissage.

L'inox est la « Rolls-Royce » du fil. Il ne s'allonge pas et ne rouille pas. Il ne nécessite aucune « maintenance ». Néanmoins, dans les parcelles venteuses, il n'est pas recommandé au niveau des fils releveurs, car il peut sectionner les pampres. De même, dans les régions chaudes, il faut faire attention au niveau du fil supérieur. L'inox emmagasine la chaleur et risque de brûler les vrilles.

Les fils en acier galvanisé ont une durée de vie qui varie en fonction du taux de galvanisation. Les plus recommandés sont de classe C. Ils tiennent environ dix à quinze ans. En revanche, ils ne peuvent pas être employés sur des piquets en inox, sous peine de provoquer une réaction chimique. Les fils en polyester de type Deltex sont surtout utilisés au niveau des fils releveurs. Ils se tendent lorsque la température augmente, ce qui permet de bien tenir la végétation. D'après les connaissances actuelles, ils tiennent au moins quinze ou vingt ans. En revanche, on peut difficilement les employer comme fils fixes, car lorsqu'on les sec sectionne à la taille, on ne peut pas les rabouter. Il faut donc les changer entièrement.

Enfin, détail qui a son importance, au niveau des amarres, il ne faut pas placer les fils de palissage dans la terre, sinon, ils pourrissent.

Comment fixer le fil en bout de rang ?

« La pose sera différente suivant le type de piquet pour lequel on a opté », avance Jean-Marie Leclercq. Mais globalement, le plus simple est de réaliser les raccords avec des Gripple. « Ils sont chers, mais pratiques et simples d'utilisation », indique Gilbert Cazals.

Dans quel cas faut-il mettre un ou deux fils releveurs ?

Le nombre de fils releveurs se raisonne en fonction de la vitalité de la vigne et de la hauteur foliaire désirée. Moins il y a de ceps à l'hectare, plus la vigne devra monter haut et plus le palissage devra compter de fils.

Le cépage détermine également le choix. Un port retombant, comme la syrah, tiendra mieux avec deux paires de fils releveurs. En revanche, s'il a tendance à faire beaucoup de vrilles, il peut être utile d'avoir un fil fixe entre deux paires de releveurs. Avec un port dressé au contraire, une seule paire de releveurs est généralement suffisante.

Quelles attaches utiliser ?

Plusieurs types d'agrafes sont commercialisés : en acier, en bois biodégradables, en plastique photodégradable et en plastique. Les attaches en acier et en plastique sont récupérables. Ils font donc prendre en compte le temps de ramassage dans les calculs de coût de revient. Elles sont de moins en moins employées. Les biodégradables et les photodégradables se cassent lors de la taille. Ce sont les plus utilisées. Mais Gilbert Cazals prévient tout de même que, dans les vignes vigoureuses, les biodégradables ne sont pas recommandées, car elles éclatent sous la pression de la végétation. De même, dans les parcelles en travers du vent où elles se rompent fréquemment.

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