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VIGNE

Gagnez du temps à la taille

Christelle Stef - La vigne - n°217 - février 2010 - page 34

Des viticulteurs bordelais ont réduit leur temps de travail en taillant en deux passages ou en alternant taille en guyot et taille en cordon sur la même parcelle.
DANS LE VIGNOBLE BORDELAIS, des viticulteurs chronomètrent tous leurs travaux. Leur analyse montre qu'au lieu de tailler et d'ébourgeonner en même temps, il est plus rentable de séparer les deux opérations. © J.-M. NOSSANT

DANS LE VIGNOBLE BORDELAIS, des viticulteurs chronomètrent tous leurs travaux. Leur analyse montre qu'au lieu de tailler et d'ébourgeonner en même temps, il est plus rentable de séparer les deux opérations. © J.-M. NOSSANT

Nelly Bernaleau-Cardinel est conseillère d'entreprise à la chambre d'agriculture de Gironde. Marie-Charlotte Michaud est conseillère viticole à l'Adar Haute Gironde. Ensemble, elles animent un observatoire technico-économique des pratiques viticoles. Une dizaine de vignerons soucieux de réduire leurs coûts en font partie. Chronomètre en main depuis 2005, ils enregistrent très précisément la durée de leurs travaux. Puis, chiffres à l'appui, ils échangent leurs façons de faire et les astuces qu'ils utilisent pour gagner du temps. Jean-Luc Audubert, viticulteur en cave coopérative avec 40 ha en AOC Bordeaux sur Naujan-et-Postiac (Gironde), est de ceux-là. Il conduit ses vignes en guyot double. En réorientant ses techniques, son temps de taille a diminué de 30 %, selon notre confrère « L'Avenir agricole et viticole aquitain ».

Le sécateur électrique, fait perdre en précision

Au lieu de tailler et d'ébourgeonner en même temps, il sépare désormais les deux opérations. Il demande d'abord à ses ouvriers de tailler les bois principaux (ceux de deux ans). Puis, après avoir tiré les bois, ils repassent pour nettoyer les deux astes (ou baguettes) et le cœur de la souche. Il ne met alors plus que vingt heures (185 pieds/h) pour tailler un hectare : quatorze heures pour le premier passage et sept en moyenne pour le deuxième. « Actuellement, de plus en plus de viticulteurs ont recours au sécateur électrique. Avec ce matériel, on gagne en puissance, mais on perd en précision. Il est donc difficile de tailler les astes et d'ébourgeonner en même temps. Il est plus judicieux de tailler en premier, puis de repasser avec un sécateur manuel pour ébourgeonner. C'est un conseil que nous essayons de généraliser. Le fait de se focaliser sur une seule tache à la fois permet d'aller plus vite. Le viticulteur va aussi y gagner sur le plan financier. Il va réserver le premier passage aux tailleurs dont le coût est plus élevé (9,10 euros de l'heure la plupart du temps), car ils doivent avoir des connaissances spécifiques. Il peut ensuite confier l'ébourgeonnage, plus simple, à des saisonniers qu'il va rémunérer à un coût moindre (8,82 à 8,95 euros de l'heure) », expose Marie-Charlotte Michaud.

De son côté, Renaud Ladépèche, viticulteur en cave coopérative à Lugon (Gironde) a testé la taille en cordon alternatif, indique « L'Avenir agricole et viticole aquitain ». « Il est d'abord passé d'une taille Guyot double (41 h/ha) à une taille bordelaise (35 h/ha) en supprimant les cots de retour. Cela lui a permis de gagner 6 h/ha. Puis, conservant la taille bordelaise, il a décidé d'opérer en deux passages, réduisant son temps de taille à 22,5 h/ha. Toutefois, une taille à aste (ou taille longue) comme la taille bordelaise nécessite de tirer les bois, de les plier et de les broyer. Avec le prétaillage, cela représente au total 45 h/ha pour l'ensemble de ces travaux hivernaux », explique Nelly-Bernaleau Cardinel.

40 h/ha pour prétailler, tailler, tirer les bois, broyer et plier

Il a alors essayé la taille en cordon de Royat. En effet, avec un cordon, on supprime le tirage des bois, le broyage et le pliage. Mais des rendements trop faibles et des temps de mise en œuvre importants ne l'ont pas encouragé à développer cette technique sur toute son exploitation. « Il a donc décidé d'alterner sur 10 ha de son exploitation, qui en compte 37, taille bordelaise et taille en cordon », poursuit Nelly Bernaleau-Cardinel. La première année, il taille à la bordelaise, la suivante en cordon et ainsi de suite. La technique n'est pas compliquée, mais demande une formation préalable.

« En guyot double, il y a deux as tes pliés à plat et attachés sur le fil de palissage. L'année suivante, le viticulteur prétaille pour réduire la hauteur des bois de l'année, mais il ne touche pas aux astes de deux ans. Puis, il raccourcit les bois de l'année à deux bourgeons, ce qui lui permet de passer en cordon. L'année d'après, pour reformer un guyot, soit il prend un pampre, soit il prend un aste de l'année le plus proche de l'intérieur du pied », explique Marie-Charlotte Michaud. Ainsi Renaud Ladépèche ne met-il plus que 40 h/ha en moyenne pour l'ensemble des travaux (prétaillage, taille, tirage des bois, broyage et pliage).

« Cette technique ne demande aucune formation. Tous les viticulteurs en Guyot double peuvent le faire. Sur des vignes conduites en cordon, c'est un peu plus difficile, car il faut d'abord rajeunir les souches et penser à laisser se développer des pampres. Mais c'est possible », précise Marie-Charlotte Michaud. Pour elle, le seul risque éventuel de la technique est qu'en cordon, il y aura plus de casse s'il gèle au printemps.

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