« Dans les formations existantes, les viticulteurs ont beaucoup d'informations sur les EPI (Equipements de protection individuel). Les formateurs insistent beaucoup sur les contaminations liées aux contacts directs avec les phytos, mais moins sur les contacts indirects qui se produisent lorsqu'on touche une surface souillée par ces produits », rapporte Aurélie Camponovo, de l'IFV pôle Bordeaux-Aquitaine.
Pour mieux prendre en compte tous les risques de contamination et pour intégrer les façons de travailler des viticulteurs et l'ergonomie des matériels, l'Acta a coordonné le programme Agriprotect 2 (voir encadré). Ce travail a abouti à la création d'une formation originale et interactive.
Un colorant bleu pour visualiser la présence des contaminants
La formation se déroule soit sur une demi-journée, soit sur la journée entière. La partie la plus originale est l'atelier pratique où les viticulteurs sont amenés à détecter des situations de contamination en s'appuyant sur leur compétence et leur intuition. Pour cela, le formateur fait appel à un volontaire. Il lui demande de revêtir une première combinaison qui représentera la peau, puis une autre correspondant à celle habituellement portée. Il le met ensuite en situation. Par exemple, il demande au volontaire de nettoyer un pulvérisateur. Auparavant, le formateur a appliqué un colorant bleu sur le matériel, représentant des souillures par les produits phytosanitaires. Les participants observent leur confrère et essaient d'identifier les moments où il se contamine. Ils regardent ensuite les traces de colorant sur les combinaisons externe et interne. Cet exercice permet aux viticulteurs de mieux se rendre compte de l'importance des contaminations cutanées qui peuvent survenir lors d'un contact indirect avec les produits. « Nous savons que l'opération de lavage du pulvérisateur peut être très contaminante, mais là, on le met en évidence de manière claire », constate Aurélie Camponovo.
Le volontaire peut également simuler la préparation d'une bouillie, le remplissage du pulvérisateur ou encore le déshabillage. Avant l'atelier pratique, la formation comprend une partie théorique en salle. Les formateurs rappellent ce qu'est un produit phytosanitaire et la signification des symboles de danger sur les étiquettes. Ils décrivent les voies de pénétration dans l'organisme, la différence entre les contaminations directes et indirectes, mais aussi les risques sur la santé et l'environnement.
135 salariés et chefs d'exploitation déjà formés
Ensuite, ils décortiquent les différentes phases (stockage des produits, préparation de la bouillie, application, incident, nettoyage du pulvérisateur, rentrée dans les parcelles après un traitement…) au cours desquelles les viticulteurs ou les salariés peuvent se contaminer. Pour les illustrer, ils se servent de photos montrant des anonymes en situation. Les participants les commentent et le formateur expose les risques encourus et la bonne conduite à adopter.
En 2008 et 2009, les partenaires d'Agriprotect ont réalisé cinq formations de ce type. Cent trente-cinq responsables d'exploitation, salariés, tractoristes ou mécaniciens y ont participé. Tous ont apprécié l'aspect pratique. Aujourd'hui, la formation Agriprotect peut être reprise par les organismes de formation qui le souhaitent. A titre d'exemple, la chambre d'agriculture de Gironde l'a intégrée dans les formations Certiphyto.
Cinq viticulteurs suivis au cours d'un traitement
L'Acta a conçu le module de formation Agriprotect 2 (1) avec la chambre d'agriculture de Gironde, l'IFV, l'IUT de Bordeaux 1 et la MSA. Pour le mettre au point, l'IUT de Bordeaux 1 a suivi cinq viticulteurs au cours d'un traitement, en 2008. Il les a filmés et observés. A partir de cette expérience, les partenaires du réseau Agriprotect ont déterminé les principaux points à aborder lors de la formation. Ils se sont notamment rendus compte que certains viticulteurs ne connaissaient pas les phrases de risques ou ne les lisaient pas. Ils ont aussi constaté que beaucoup de viticulteurs pensent se contaminer en respirant les produits. Or, la voie principale de pénétration d'un produit dans l'organisme est cutanée.
Ils ont également constaté que les EPI n'étaient pas forcément adaptés à la pénibilité du travail. Ainsi, les porter en pleine chaleur est très contraignant.
(1) Programme financé avec le concours du ministère de l'Agriculture, dans le cadre de l'appel à projet CAS Développement agricole et rural.