« Quels sont les risques professionnels liés à l'application des pesticides ? Peut-on travailler sans s'exposer ? » Ces deux questions étaient le thème d'un colloque qui a eu lieu le 6 mai (1), à Paris. Des institutions, des prescripteurs et des chercheurs sont venus en débattre.
Alain Garrigou, du laboratoire santé travail environnement de l'université de Bordeaux 1 et 2, a fait une intervention remarquée. Ce chercheur a travaillé avec les viticulteurs et observé la manière dont ils travaillent. Il en a tiré de nombreux enseignements : « Au niveau de la prévention, on a longtemps considéré que le viticulteur était le maillon faible de la chaîne. » En clair, qu'il n'applique pas les consignes de prudence édictée par des spécialistes. « Cette conception a fait son temps, a poursuivi Alain Garrigou. Si l'on veut changer les comportements, il faut intégrer l'ensemble des acteurs de la filière », depuis les firmes phytosanitaires jusqu'aux fabricants de matériel.
Les joints de vitres se rétractent sous la chaleur
Second constat : « On a beaucoup centré la prévention sur les EPI (Equipement de protection individuel). Or, ceux-ci ne protègent pas à 100 %. Certes, mettre des EPI est important, mais il y a d'abord beaucoup de choses à faire au niveau de l'organisation du travail et de la conception des matériels. »
Alain Garrigou a ajouté que les cabines ne protègent pas non plus totalement. Il a expliqué que des constructeurs n'ont pas pensé à mettre des essuie-glaces sur les vitres des tracteurs. Au cours d'un traitement, ces dernières sont vite recouvertes de produit et les viticulteurs sont obligés de les ouvrir pour voir clair. Il a aussi souligné que des joints de vitre se rétractent sous l'effet de la chaleur, laissant pénétrer des embruns. Il a, en outre, mentionné les problèmes d'accessibilité à l'orifice de remplissage de certains pulvérisateurs, tout en soulignant qu'« il est inacceptable d'avoir de tels défauts, surtout sur les matériels récents ».
Pour le chercheur, il est essentiel de mettre le viticulteur au centre du dispositif de prévention : « Il faut l'aider à découvrir quelles sont les occasions au cours desquelles il se contamine. » Il a aussi précisé qu'il est nécessaire de modifier les normes de perméabilité des combinaisons et que c'est aux fabricants de produits phytosanitaires d'inscrire précisément sur leurs produits les équipements de protection les mieux indiqués. Des propos remplis de bon sens.
(1) Colloque organisé par le réseau Anact, avec l'Agence française de sécurité sanitaire et de l'environnement (Afsset), la MSA et la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL).