REVENU COMPTABLE : Une donnée obligatoire
« Il correspond schématiquement au chiffre d'affaires réalisé par l'exploitation, auquel on retire les charges engagées, puis auquel on ajoute ou on enlève la variation des stocks, selon qu'elle est positive ou négative, explique Eric Duval, expert-comptable au CDER de la Marne. Le revenu comptable est un paramètre important, regardé par la banque. Le banquier s'intéresse également de près à l'EBE (Excédent brut d'exploitation), qui donne une indication sur la capacité de l'entreprise à rembourser ses emprunts. » L'EBE se calcule en prenant la valeur ajoutée, à laquelle on additionne les éventuelles subventions et à laquelle on retranche les impôts, les taxes et les charges de personnel. Pour passer de l'EBE au résultat comptable, on retranche ou on ajoute les amortissements et provisions, ainsi que les résultats financiers.
REVENU DISPONIBLE : Le poids du stock
« C'est souvent au moment où l'on analyse la différence entre les ventes et les achats, que l'exploitant se pose la question : où est passé le bénéfice ? » poursuit Eric Duval. Pour beaucoup d'exploitants, cette différence devrait se trouver comme un revenu disponible sur leur compte bancaire. Mais les choses ne sont pas aussi simples. En fait, la différence entre les ventes et les achats constitue la capacité d'autofinancement, une notion importante. Dans la pratique, elle sert à constituer les stocks. C'est même sa principale utilisation.
Or, se constituer un stock coûte cher. En Champagne, le coût de production d'un stock de vin est de l'ordre de 40 000 euros par hectare. Un vigneron qui exploite cinq hectares doit donc engager 200 000 euros sur une année. Le taux de rotation du stock étant en moyenne de trois ans, il doit mobiliser 600 000 euros avant de commencer à vendre. Et ce viticulteur aura toujours à financer ces 600 000 euros d'avance. Mais il pourra les récupérer lors de sa cessation d'activité.
Au niveau comptable, un stock de vin, c'est abstrait. La valorisation comptable s'effectue en empilant les charges inhérentes à ces stocks : charges de production du raisin, de vinification et de conditionnement, ou selon le cours du jour.
Le revenu disponible c'est l'EBE moins les échéances d'emprunt. Il permet au viticulteur de prendre des prélèvements privés, de renouveler le stock et d'investir. Rappelons que le renouvellement du stock doit être financé, même à quantité égale, en raison du coût de l'inflation. Une fois tous ces postes déduits, reste le solde de trésorerie qui est positif ou négatif.
Les créances et les dettes interviennent également dans l'analyse du revenu disponible. Si un viticulteur a vendu beaucoup de bouteilles mais n'a pas encore été payé, il aura un résultat disponible important mais un manque de trésorerie, puisque l'argent est chez ses clients. A l'inverse, s'il a réalisé des achats qu'il n'a pas encore payés, il aura une trésorerie plus favorable, momentanément. Selon la date de clôture, la trésorerie sera plus ou moins importante.
Plusieurs voies d'amélioration
L'amélioration du revenu disponible passe par une réduction des prélèvements fiscaux et sociaux. Pour diminuer ces prélèvements, on peut demander à changer d'assiette d'imposition pour passer de l'assiette triennale à l'assiette annuelle (N-1), ou inversement.
Ainsi, quand on a un résultat exceptionnellement élevé une année, l'option annuelle permet de sortir plus rapidement cette bonne année du calcul des cotisations. L'option annuelle est également intéressante quand les revenus de l'exploitation baissent de manière structurelle. Elle permet de prendre en compte plus rapidement la baisse de résultat, que dans le cas de la moyenne triennale. Mais attention, l'option de l'assiette annuelle se fait pour une durée de cinq ans minimum.
Prenons l'exemple d'un viticulteur dont le revenu de 2007 est de 35 000 euros, celui de 2008 est exceptionnellement de 60 000 euros, celui de 2009 et de 2010 étant de 30 000 euros. Si ce vigneron opte avant le 30 novembre 2009 pour une assiette annuelle, il économise 5 340 euros de cotisations MSA en 2010, car seule l'année 2009 est prise en compte. Il économisera 2 500 euros en 2011 par rapport à un calcul incluant les revenus 2008, 2009 et 2010. Le revenu élevé de 2008 sera ainsi vite écarté et n'aura été retenu que pour le calcul des cotisations payées en 2009. Au total, le gain du changement d'option s'élève à 7 840 euros.
Les déductions pour investissement (DPI) et déductions pour aléas (DPA) sont d'autres outils très intéressants pour gérer au mieux ses prélèvements sociaux et fiscaux. La DPI est plafonnée à 20 000 euros et permet de financer l'achat de biens amortissables à rotation lente. C'est le cas d'un stock de vin. La DPA, plafonnée à 23 000 euros, permet quant à elle de faire face à un aléa climatique important et depuis peu économique. Le viticulteur peut encore jouer sur la durée des amortissements ou changer de date de clôture pour réaliser de belles économies. Dans tous les cas, une simulation s'impose avant de prendre une décision, car un choix intéressant sur le court terme peut s'avérer handicapant par la suite.
REVENU FISCAL : Souvent éloigné du résultat Comptable
Le résultat fiscal sert de base pour le calcul de l'impôt sur le revenu et celui des cotisations sociales. En agriculture et en viticulture, il est souvent très éloigné du résultat comptable, car différents éléments viennent se déduire ou s'ajouter au résultat comptable : les exonérations totales ou partielles de plus-values, la DPI ou la DPA et les abattements Jeunes agriculteurs.
Le choix de l'option moyenne triennale (en matière sociale et/ou fiscale) peut également créer une distorsion entre le résultat comptable et le résultat fiscal. Cette option est privilégiée en période de croissance du résultat fiscal.
A noter que les plus-values à long terme ne font pas partie de la base fiscale, car elles sont taxées à un taux fixe de 16 %, auxquels s'ajoutent les prélèvements sociaux.
Ouvrir un compte titre pour l'entreprise
Dans l'hypothèse d'un solde positif, il est conseillé d'ouvrir un compte bancaire (compte titre en Sicav monétaire, par exemple) au nom de la société pour que la trésorerie excédentaire soit facilement accessible pour payer les charges à court ou moyen terme. « C'est surtout vrai pour les vignerons qui sont en société avec leur frère ou leur sœur, ou avec des cousins. Dans ce cas, il est plus prudent de laisser l'argent dans la société, conseille Eric Duval. Si le viticulteur le distribue et que l'entreprise en a besoin deux mois plus tard, il se peut que l'un des associés s'y oppose. Autant prévenir ce cas de figure problématique. »