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VIGNE

Loi Grenelle 2 : toutes les nouveautés sur les phytos

Christelle Stef - La vigne - n°222 - juillet 2010 - page 30

Le Sénat et l'Assemblée nationale ont voté définitivement la loi Grenelle 2 les 28 et 29 juin. Voici les mesures qui vous concernent.
DISTRIBUTEURS ET CONSEILLERS VITICOLES devront être agréés, certifiés et détenir le certiphyto. Dès lors qu'ils feront une préconisation phyto, elle devra être écrite. © J.-C. GUTNER

DISTRIBUTEURS ET CONSEILLERS VITICOLES devront être agréés, certifiés et détenir le certiphyto. Dès lors qu'ils feront une préconisation phyto, elle devra être écrite. © J.-C. GUTNER

DISTRIBUTEURS ET CONSEILLERS VITICOLES devront être agréés, certifiés et détenir le certiphyto. Dès lors qu'ils feront une préconisation phyto, elle devra être écrite. © J.-C. GUTNER

DISTRIBUTEURS ET CONSEILLERS VITICOLES devront être agréés, certifiés et détenir le certiphyto. Dès lors qu'ils feront une préconisation phyto, elle devra être écrite. © J.-C. GUTNER

L'ÉPANDAGE PAR HÉLICOPTÈRE des produits phytosanitaires sera interdit sauf dans des conditions particulières définies par l'administration. © C. WATIER

L'ÉPANDAGE PAR HÉLICOPTÈRE des produits phytosanitaires sera interdit sauf dans des conditions particulières définies par l'administration. © C. WATIER

CERTIPHYTO. Il faudra l'avoir pour traiter. Des formations sont actuellement en cours d'expérimentation. Fin avril, 419 exploitants viticoles y avaient participé.

CERTIPHYTO. Il faudra l'avoir pour traiter. Des formations sont actuellement en cours d'expérimentation. Fin avril, 419 exploitants viticoles y avaient participé.

PPNU. Les viticulteurs devront les ramener dans l'année suivant leur date limite d'utilisation. © P. PARROT

PPNU. Les viticulteurs devront les ramener dans l'année suivant leur date limite d'utilisation. © P. PARROT

UTILISATION DES PRODUITS : Il faudra avoir un certificat

« Les personnes qui utilisent les produits phytopharmaceutiques (...) dans le cadre de leur activité professionnelle à titre salarié, pour leur propre compte, ou dans le cadre d'un contrat d'entraide (...) justifient d'un certificat délivré par l'administration ou un organisme qu'elle habilite (...) », dit la loi.

C'est le fameux certiphyto. Au 1er janvier 2015, viticulteurs, conseillers et distributeurs devront l'avoir pour acheter, stocker, manipuler ou appliquer les produits phytos. On pourra l'obtenir par équivalence de diplôme, par l'évaluation des compétences ou par une formation spécifique. Il faudra le renouveler régulièrement. Les modalités concrètes de l'obtention du certificat seront fixées par un décret.

Le certiphyto est en cours d'expérimentation. Plusieurs formations, à l'issue desquelles les vignerons ont pu l'obtenir, ont déjà été réalisées. A chaque fois, elles ont fait carton plein. Selon le ministère de l'Agriculture, à la fin avril, 419 exploitants viticoles avaient participé à une formation certiphyto.

TÉMOIGNAGE : André Faugère, viticulteur à Escoussans (Gironde)

« Pour beaucoup de viticulteurs, le certiphyto est une nouvelle contrainte. Pour ma part, je ne pense pas qu'il soit inutile. J'ai suivi une formation expérimentale avec treize autres exploitants les 27 et 28 avril. Je n'ai pas perdu mon temps. Les intervenants ont abordé toute laglementation sur les phytos. Ils ont rappelé les risques liés à leur utilisation, montré comment on pouvait les limiter… Ils ont abordé beaucoup de choses. Ce que j'ai apprécié avant tout, ce sont les échanges que j'ai eus avec les autres viticulteurs sur la manière de remplir le pulvérisateur, de traiter les effluents… Ce fut très constructif. Nous avons pu poser beaucoup de questions aux intervenants et nous leur avons fait part des problèmes que nous rencontrons au quotidien. Cette formation de deux jours pour obtenir le certiphyto est une bonne chose. Il n'y aurait peut-être pas besoin des autres voies. Après, il faut voir concrètement comment les choses vont évoluer. »

Les conseillers effectueront des préconisations écrites

Là encore, c'est une révolution : tout conseil d'utilisation de produits phytopharmaceutiques en vue d'un traitement devra faire l'objet d'une préconisation écrite. Le conseiller devra préciser la substance active et la spécialité recommandées, la cible visée, la ou les parcelles concernées, la superficie à traiter, la dose recommandée et les conditions de mise en œuvre. Ce sera valable pour les distributeurs, les conseillers de chambre d'agriculture, les conseillers indépendants… Mais en pratique comment les choses vontelles se mettre en place ?

TÉMOIGNAGE : Yann Montmartin, de la chambre d'agriculture de Gironde

« Pour faire du conseil, il faudra être certifié et avoir le certiphyto. Nous ne pourrons pas faire de préconisation phytosanitaire sans traçabilité écrite. Nous devrons faire attention à nos propos au téléphone. Lorsque nous donnerons un conseil oral à un viticulteur qui est sous contrat de suivi technique, ce conseil n'ira pas au-delà de la préconisation figurant dans les messages techniques que nous éditons. S'il s'avère que le viticulteur a besoin d'un conseil spécifique, alors nous le lui donnerons par écrit. Quant aux viticulteurs qui ne seront pas sous contrat, nous n'irons pas au-delà de ce qui figurera dans les BSV (bulletins de santé du végétal). Nous ne leur donnerons pas de préconisations phytos en tant que tel. »

EXPLOITATIONS : Une certification Haute valeur environnementale

« Les exploitations agricoles utilisant des modes de production particulièrement respectueux de l'environnement peuvent faire l'objet d'une certification », indique la loi. Plusieurs niveaux sont prévus. Seul le plus élevé donnera droit à la mention « exploitation de haute valeur environnementale » ou HVE. Mais la loi n'en dit pas plus. Les modalités de mise en œuvre de la certification environnementale seront précisées dans un décret à venir.

A priori, ce décret devrait distinguer trois niveaux. Le premier attesterait du respect des bonnes pratiques imposées aux bénéficiaires des aides Pac, ce que l'on appelle la conditionnalité. A ce titre, il faudra préserver les espèces protégées, posséder un local phytosanitaire, utiliser les produits au bon moment et à la bonne dose, etc.

Le niveau 2 comprendrait seize exigences relatives à la biodiversité, à la stratégie phytosanitaire, à la fertilisation et aux ressources en eau. Il est question, par exemple, de demander à chaque exploitation d'identifier ses zones de biodiversité et de présenter un plan de préservation. Il faudra également justifier tous les traitements.

Quant au niveau 3, la HVE, il comportera des exigences de résultat et non plus de moyens. Deux options sont prévues. L'une est assez concrète : il faudra au moins 10 % de la SAU en « infrastructure agroécologique » et le poids des intrants (phytos, engrais, énergie) devra être inférieur à 30 % du chiffre d'affaires. C'est l'option B.

Le contenu de l'option A est plus complexe. Les exploitations seront notées sur le respect de la biodiversité, leur stratégie phytosanitaire, leur gestion de la fertilisation et de la ressource en eau. Il faudra qu'elles obtiennent au moins dix points dans chacun de ces quatre domaines.

TÉMOIGNAGE : Sandra Bennamane, de la chambre d'agriculture de l'Aude

« Nous avons testé la certification HVE chez deux exploitations viticoles déjà certifiées en Terra vitis. L'une est en cave particulière (AOC Coteaux-du-Languedoc), l'autre en cave coopérative (AOC Corbières). Chez elles, le niveau 1 est acquis. Le niveau 2 aussi, de nombreuses exigences étant déjà présentes dans le référentiel agriculture raisonnée. Pour le niveau 3, nous avons constaté que l'option A n'est pas adaptée à la viticulture. Nous avons donc opté pour la B. Là encore, les deux exploitations sont dans les clous. Mais elles ne sont pas forcément représentatives de toutes les exploitations viticoles. Il faut voir ce que cela donne au niveau national. De toute façon, les choses ne sont pas encore clairement définies. Et les viticulteurs se posent beaucoup de questions. La HVE remplacera-t-elle la qualification agriculture raisonnée ? Quelle communication y aura-t-il ? Les négociants seront-ils demandeurs ? Les viticulteurs s'étonnent aussi que certains points qui étaient dans le référentiel de l'agriculture raisonnée, comme par exemple l'obligation de faire des analyses de sol ou de trier et d'éliminer les déchets de l'exploitation, ne figurent plus dans la HVE. Encore des points à éclaircir… »

TRAITEMENTS AÉRIENS : Autorisés par dérogation

« L'épandage aérien des produits (...) est interdit, sauf dans des conditions strictement définies par l'autorité administrative lorsqu'un danger menaçant les végétaux (...) ne peut être maîtrisé par d'autres moyens. » La loi autorise également « ce type d'épandage [s'il] présente des avantages manifestes pour la santé et l'environnement par rapport à une application terrestre ».

TÉMOIGNAGE : Jean-Louis Uriel, société La Vigneronne, à Epernay (Marne)

« Nous avons 2 500 clients viticulteurs, représentant 7 à 8 % du vignoble champenois. Les parcelles que nous traitons par hélicoptère sont dans des coteaux très escarpés où ni les enjambeurs, ni les chenillards ne peuvent aller, car c'est trop dangereux. Avec le CIVC et la Protection des végétaux, nous avons élaboré un référentiel des bonnes pratiques du traitement aérien. Nous devrions obtenir les dérogations pour continuer. Mais c'est vrai qu'avec cette loi, seules les parcelles escarpées situées à plus de 50 m des points d'eau et des maisons pourront être traitées par hélicoptère. Pour les autres, nous ne savons pas comment cela va se passer. Il est possible que nous ne puissions plus les traiter, même en cas d'urgence. »

PPNU : Un an pour les rapporter

On ne pourra plus stocker indéfiniment un produit qui fait l'objet d'une interdiction (produit phytosanitaire non utilisable : PPNU). Il faudra le ramener à une collecte dans l'année suivant la date limite d'utilisation. L'élimination sera financée par le détenteur de l'homologation et pourra avoir lieu dans le cadre d'Adivalor.

Les autres mesures à retenir

Distributeurs, prestataires de services et entreprises de conseil agricole devront être agréés et certifiés.

Des trames vertes et bleues seront mises en place pour préserver la biodiversité. Ce sont des bandes de végétation et des rivières.

Il faudra implanter des bandes enherbées d'au moins cinq mètres de large le long des cours d'eau désignés par l'administration qu'on ne pourra ni traiter ni fertiliser.

L'administration pourra limiter l'usage des terres agricoles autour d'un captage d'eau potable pollué. Pendant trois ans, elle pourra imposer qu'on y implante des prairies permanentes ou des cultures sans intrants. Elle pourra aussi maintenir les cultures existantes, mais en interdisant d'y utiliser des produits de synthèse.

Les départements pourront indemniser des agriculteurs bios ou en conversion qui récupèrent des parcelles conventionnelles lors d'aménagements fonciers.

Le ministère de l'Agriculture ne pourra interdire une matière active autorisée dans l'Union européenne qu'après « avis de l'Afssa et évaluation des effets sociaux-économiques et environnementaux d'une telle mesure ».

L'étiquetage environnemental des produits alimentaires sera expérimenté à compter du premier juillet 2011.

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