Retour

imprimer l'article Imprimer

DOSSIER - Enherbement : Gardez le contrôle

L'enherbement total réduit les rendements et la vigueur

La vigne - n°224 - octobre 2010 - page 31

L'IFV Sud-Ouest et la chambre d'agriculture du Rhône testent l'enherbement total. Ils constatent une baisse de la vigueur et des rendements qui dépendent des sols et des espèces installées sous le rang.
Enherbement total à Fronton, en juillet 2008. © IFV PÔLE SUD-OUEST

Enherbement total à Fronton, en juillet 2008. © IFV PÔLE SUD-OUEST

Beaucoup de viticulteurs aimeraient se passer des herbicides pour l'entretien de la ligne des souches. L'enherbement total pourrait être une solution. Mais ne concurrence-t-il pas trop la vigne ? Pour le savoir, l'IFV pôle Sud-Ouest a mis en place en 2007 un essai dans trois parcelles : l'une de malbec en AOC Cahors (Lot), l'autre de négrette en AOC Fronton et la dernière de colombard en VDP côte-de-gascogne (Gers).

Sur chaque site, les expérimentateurs comparent l'enherbement total avec le désherbage chimique ou mécanique sous le rang. Dans tous les cas, les interrangs sont enherbés avec un mélange de fétuque rouge et de ray-grass. Pour obtenir l'enherbement total des vignes, l'IFV a semé différents mélanges ou laissé pousser la flore spontanée sous les rangs.

Plus d'impact dans les parcelles à faible réserve en eau

Les premiers résultats montrent que l'enherbement total réduit les rendements. Son effet est plus ou moins marqué selon les sites. En 2009, dans le Gers où la parcelle est sensible au stress hydrique, le poids des grappes s'est réduit de 25 % par rapport à la modalité désherbée chimiquement sous le rang. Dans le Lot, où le sol est plus profond, la baisse est de 16 % en moyenne. En revanche, à Fronton, l'enherbement total n'a pas réduit le rendement.

« L'impact est plus marqué dans la parcelle du Gers qui se situe dans une zone IGP où les viticulteurs conduisent la vigne pour avoir de hauts rendements. A Cahors et à Fronton, même si l'enherbement total provoque une baisse des rendements, ces derniers peuvent rester conformes à l'appellation », rappelle Laure Gontier, de l'IFV Sud-Ouest.

La koelérie grêle est peu concurrentielle

L'enherbement total agit aussi sur la vigueur, avec des effets variables selon les sites et les couverts. « Pour l'instant, les mélanges à base de koelérie grêle, une graminée vivace à très faible développement, semblent les moins concurrentiels. Ceux à base de dactyle d'Espagne sont plus compétitifs vis-à-vis de la vigne, mais ils régulent mieux les mauvaises herbes. Quant à l'enherbement naturel, il a mis du temps à s'implanter, car précédemment les rangs étaient désherbés chimiquement. Mais au bout de trois ans, il a bien couvert le sol. Il a alors eu tendance à être plus concurrentiel », précise Laure Gontier.

L'enherbement total impacte aussi la teneur en azote assimilable des moûts. Par exemple, il a occasionné une baisse de 23 % en 2008 et 2009 dans la parcelle du Gers. En revanche, à Fronton, la baisse est inférieure à 10 %. Une pulvérisation de dix unités d'azote foliaire à la véraison peut y pallier.

Mais l'enherbement a également eu des effets positifs. Ainsi, en 2008, à Fronton, les teneurs en anthocyanes et l'indice de polyphénols totaux ont augmentés de 12 et 13 %. Dans le Gers, c'est la teneur en sucre des moûts qui augmente, sans impact sur l'acidité.

Toutes ces observations laissent à penser qu'il faut se lancer avec beaucoup de prudence dans l'enherbement total, dès lors que les parcelles visées portent les rendements que l'on attend.

Les observations de Jean-Henri Soumireu, de la chambre d'agriculture du Rhône, vont dans le même sens. En 2007, il a mis en place un essai d'enherbement total spontané dans une parcelle de gamay située dans le sud du Beaujolais. Le sol y est profond et argileux.

Ecart important dans le Beaujolais

Au bout de ces trois premières années, il y a toujours un écart de rendement entre l'enherbement total et la modalité désherbée chimiquement sous le rang. « Cette année, la baisse serait de 37 % dans l'enherbement total », rapportait-il avant les vendanges. De plus, les teneurs en azote des moûts étaient deux fois plus faibles. En revanche, le rapport surface foliaire sur poids de récolte est plutôt positif pour l'enherbement total, expliquant des degrés légèrement supérieurs. « Reste à savoir si ces tendances vont se confirmer », conclut Jean-Henri Soumireu.

Cet article fait partie du dossier Enherbement : Gardez le contrôle

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :