Retour

imprimer l'article Imprimer

VIGNE

Bien préparer le sol avant la plantation

Frédérique Ehrhard - La vigne - n°224 - octobre 2010 - page 34

Les impératifs économiques poussent à raccourcir le délai entre arrachage et replantation d'une vigne. Voici des conseils pour réussir une plantation dans ce contexte.
L'ARRACHAGE, comme toutes les opérations ultérieures de préparation du sol, doit avoir lieu en conditions ressuyées. Il faut aussi éviter de bouleverser les horizons, une exigence à laquelle satisfait ce godet à peigne. © A. MARTINET

L'ARRACHAGE, comme toutes les opérations ultérieures de préparation du sol, doit avoir lieu en conditions ressuyées. Il faut aussi éviter de bouleverser les horizons, une exigence à laquelle satisfait ce godet à peigne. © A. MARTINET

1. Ne faites pas l'impasse sur la dévitalisation

« On ne peut plus désinfecter les sols, rappelle Maxime Christen, de la chambre d'agriculture de la Gironde. Lorsqu'on replante une vigne sur une vigne, la dévitalisation reste la seule mesure de prévention pour freiner le développement du pourridié ou des nématodes vecteurs du court noué. »

A moins que votre parcelle soit saine, ne faites pas l'impasse sur cette opération qui, soit dit en passant, ne vous dispense pas d'éliminer minutieusement le maximum de racines.

La dévitalisation consiste à appliquer du glyphosate juste après la récolte. Le triclopyr (Garlon inov) peut également être utilisé. Pour que le glyphosate ait le temps de migrer dans le cep, les fabricants préconisent de patienter six mois avant d'arracher. Il faut aussi attendre que l'herbicide aille dans les racines, afin qu'elles meurent et les nématodes avec elles, ce qui amène au printemps suivant. Si vous avez besoin de réduire ce délai, vous pouvez arracher dans l'hiver, mais ne renoncez pas à dévitaliser.

2. Respectez les horizons du sol

Les techniciens conseillent aujourd'hui de ne pas bouleverser les horizons du sol, pour éviter d'enfouir en profondeur la couche qui a été améliorée par l'enherbement et les apports de matière organique. De ce fait, adaptez la profondeur des labours à celle de l'horizon de surface.

Les techniciens conseillent également de creuser des fosses, avant toute intervention, pour observer la structure du sol. « Si vous découvrez une couche compacte qui risque de gêner l'enracinement en profondeur, fissurez-la avec un outil à dent, plutôt que de tout retourner », recommande Nicolas Besset, du comité de développement du Beaujolais.

La culture d'un engrais vert donne aussi de bons résultats. « Certaines graminées ou crucifères ont un système racinaire puissant et ameublissent bien le sol », relève Maxime Christen. Après enfouissement, ces engrais verts apportent aussi de la matière organique et stimulent l'activité biologique du sol. Choisissez les espèces en fonction du sol et du climat. Parmi les plus utilisées, on peut citer le seigle, l'avoine, la phacélie, la moutarde blanche ou la féverole.

3. Redressez le pH et la matière organique

« La préparation avant plantation est le moment de remettre à niveau le pH et le taux de matière organique. On peut apporter les amendements de façon homogène sur toute la parcelle lorsqu'elle est nue, alors qu'en cours de culture, seuls des apports dans l'interrang sont réalisables », relève Nicolas Besset, qui s'alarme de voir le pH descendre à quatre dans certains sols, faute d'entretien régulier. « Le niveau doit être remonté au moins à six avec un apport de calcaire et, si nécessaire, de magnésie », précise-t-il.

Si le taux de matière organique est inférieur à 1 %, des apports massifs s'imposent. Privilégiez les composts. N'utilisez surtout pas de marcs frais. « Ils acidifient les sols. Dans des terrasses sableuses, cela peut provoquer des brûlures des plants », souligne Thierry Grimal, de la chambre d'agriculture de l'Aude.

Vous ne pouvez pas apporter les amendements calciques et organiques en même temps, car il faut chauler sur 20 à 30 cm et apporter les composts sur les 10 à 15 premiers centimètres seulement, étant donné qu'ils ont besoin d'oxygène pour se décomposer. « Dans des vignes plantées il y a trente ans, j'ai pu observer de la matière organique qui n'avait pas évolué, car elle avait été enfouie trop profondément », relève Maxime Christen.

4. Sachez patienter si les conditions sont humides

Quand les délais entre l'arrachage et la plantation de la nouvelle vigne se réduisent à quelques mois, il peut s'avérer difficile de trouver le bon moment pour travailler le sol. Or, « travailler un sol humide est une prise de risque, rappelle Thierry Grimal. Les outils créent des zones lissées qui gênent l'enracinement des plants. La mortalité immédiate peut être très significative. N'oubliez pas que pour percevoir la prime de plantation, le taux de reprise doit être d'au moins 80 % ».

« Les plants qui ont du mal à s'enraciner poussent plus lentement. Leur potentiel de rendement est entamé », ajoute Maxime Christen.

Leur longévité également. S'il reste une zone humide, même en profondeur, elle risque de se compacter sous le poids des engins, ce qui perturbera ensuite l'évacuation de l'eau.

Or, l'humidité excessive favorise les champignons et les nématodes. Elle entraîne aussi des problèmes d'asphyxie racinaire. On explique ainsi que des dépérissements apparaissent lors d'années pluvieuses sur des vignes adultes et mal installées. « C'est ce que nous avons constaté en Beaujolais après 2007 et 2008, des années très humides », relève Nicolas Besset.

5. Améliorez la circulation de l'eau

Profitez de la replantation pour améliorer l'évacuation de l'eau de la parcelle. Des banquettes ou des chemins enherbés peuvent être créés pour la canaliser et limiter l'érosion dans les parcelles en pente.

« C'est aussi le moment de remettre en état des fossés qui n'étaient plus entretenus et d'en créer de nouveaux si nécessaire », souligne Thierry Grimal.

Si cela ne suffit pas, un drainage partiel ou total peut être envisagé. Dans tous les cas, il faut regarder où débouchent les fossés ou les drains. Il ne s'agit pas d'envoyer l'eau dans la parcelle du voisin, mais de se connecter à un réseau en bon état qui rejoint un cours d'eau.

Le Point de vue de

Benoît Escarguel, vigneron à Arzens, dans l'Aude

« J'ai préféré le décompactage au défonçage »

Benoît Escarguel, vigneron à Arzens, dans l'Aude

Benoît Escarguel, vigneron à Arzens, dans l'Aude

« Mon objectif est d'ameublir le sol en profondeur pour faciliter l'enracinement de la vigne et améliorer sa résistance à la sécheresse. Jusqu'à présent, je faisais effectuer un défonçage sur 60 ou 70 cm de profondeur. Mais la charrue remontait en surface un horizon plus clair avec de la terre pauvre en matière organique et enfouissait la terre fertile loin des racines des jeunes plants. Une année, j'ai fait passer un ripper. J'ai vu que cet outil décompactait bien en profondeur sans remonter de terre. Comme j'étais satisfait du résultat, j'en ai acheté un d'occasion pour 2 000 euros, avec cinq dents. Je suis équipé d'un tracteur de 140 CV avec lequel je peux le tirer, car je cultive des céréales en complément des vignes. Cela me permet d'intervenir moi-même au meilleur moment. Le sol doit être ressuyé, mais pas trop sec, pour que les vibrations des dents se propagent bien. Cet automne, je vais apporter du compost, puis décompacter à 60 cm au ripper une parcelle que je vais planter en 2011. J'ai dévitalisé, puis fait arracher cette vigne, il y a trois ans. Ensuite, j'y ai cultivé du blé dur pendant deux ans. Au printemps, je n'aurai plus qu'à niveler et affiner la terre avec un passage de vibroflex juste avant de planter. »

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :