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Retraites : ce qui change avec la loi votée en octobre

Aude Lutun - La vigne - n°226 - décembre 2010 - page 78

La réforme des retraites allonge la durée de cotisations à 41,5 années. Elle prend en compte la pénibilité du travail en agriculture, en contrepartie de quoi il faudra bientôt tenir une fiche individuelle de suivi des risques pour tous les salariés.
La viticulture fait partie des métiers considérés comme pénibles. Les employeurs viticoles devront donc tenir une fiche individuelle de suivi des risques pour leurs salariés. Ces derniers la récupéreront lors de leur départ à la retraite. © PH. ROY

La viticulture fait partie des métiers considérés comme pénibles. Les employeurs viticoles devront donc tenir une fiche individuelle de suivi des risques pour leurs salariés. Ces derniers la récupéreront lors de leur départ à la retraite. © PH. ROY

Comment se calcule la retraite ?

La pension de retraite des exploitants agricoles est composée de trois éléments : la retraite forfaitaire, la retraite proportionnelle et, depuis 2003, la retraite complémentaire obligatoire (RCO).

La retraite forfaitaire s'élève à 3 181,67 euros par an, soit 265,13 euros par mois. Ce forfait n'est pleinement versé qu'aux personnes ayant cotisé pendant la durée requise. A défaut, il est versé au prorata du nombre de trimestres cotisés.

La retraite proportionnelle se calcule en points (3,739 €/point), collectés selon le revenu de l'exploitant. La retraite forfaitaire et la retraite proportionnelle forment la retraite de base.

Quant à la retraite complémentaire obligatoire, elle se calcule également en point, valorisé à 0,3159 €/point en 2010. Les cotisations s'élèvent à 3 % du revenu agricole.

Quels sont les changements apportés par la loi votée en octobre 2010 ?

La réforme des retraites recule l'âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans à compter de 2018, pour les assurés nés après le 1er janvier 1956. Pour les assurés n'ayant pas validé tous leurs trimestres, l'âge du taux plein recule également de deux ans, passant de 65 à 67 ans. La durée de cotisations augmente elle aussi. La durée de carrière s'élevait à 37,5 années (150 trimestres) pour un cotisant né avant 1944. Depuis 2003, elle augmente progressivement pour atteindre 165 trimestres (41,5 ans) pour les assurés nés à partir du 1er janvier 1953.

Pour les exploitants, le calcul de la retraite continue de se faire sur les revenus de la carrière complète, et non sur les vingt-cinq meilleures années, comme c'est le cas pour les salariés du privé et les indépendants.

Qu'en est-il des minorations et surcotes ?

Un assuré n'ayant pas cotisé le nombre requis de trimestres perçoit une pension minorée de 1,25 % par trimestre manquant, soit 5 % par année manquante. Quand un actif prend sa retraite avant d'atteindre les trimestres exigés, la minoration est définitive. Outre la minoration de la pension, le fait de ne pas avoir atteint le quota de trimestres cotisés ferme l'accès au minimum vieillesse (7 600 €/an) et rend plus difficile la possibilité d'être éligible à un cumul emploi-retraite.

A l'inverse, une personne ayant cotisé à taux plein et poursuivant sa carrière après 62 ans verra sa retraite de base majorée de 5 % par année supplémentaire. De plus, ces actifs continuent d'acquérir des points pour leur retraite proportionnelle.

Les règles concernant le minimum vieillesse ont-elles changé ?

Oui. Avant la réforme de 2010, 30 % de la valeur des terres agricoles et du corps de ferme entraient dans le calcul de l'actif net successoral. Les ayants droit de l'exploitant retraité décédé devaient rembourser le minimum vieillesse dans le cas où l'actif successoral dépassait 39 000 euros. « Maintenant, les terres et le corps de ferme sont exclus de ce calcul, précise Marie-Odile Devresse, responsable questions sociales à la FDSEA de la Marne. Davantage d'exploitants oseront le demander, sans crainte de pénaliser leurs enfants ».

Que se passe-t-il pour un exploitant ayant été salarié ?

Pour bénéficier de la retraite à taux plein, un assuré ayant cotisé dans différents régimes doit totaliser le bon nombre de trimestres. Il touchera sa retraite au prorata des trimestres cotisés dans chaque régime. Et s'il n'a pas suffisamment cotisé, la décote s'appliquera à la retraite des deux régimes.

La majoration pour les mères de famille est-elle maintenue ?

Oui. La loi prévoit toujours d'ajouter deux années d'activité par enfant élevé. Depuis le 1er avril 2010, la mère bénéficie automatiquement d'une majoration de quatre trimestres au titre de la grossesse et de l'accouchement. Les quatre autres trimestres peuvent être attribués à la mère ou au père, mais ils peuvent aussi se les partager. Sans demande particulière, c'est la mère qui bénéficie des huit trimestres.

A noter que si vous avez travaillé ne serait-ce que quelques semaines de votre vie dans le régime général (animatrice en colonie, caissière, etc.), c'est ce régime qui prévaudra dans le calcul des points des deux années gratuites.

Les pères et mères de trois enfants bénéficient chacun d'une bonification de 10 % de leur retraite forfaitaire et proportionnelle.

La pénibilité du travail sera-t-elle prise en compte ?

Oui. La viticulture fait partie des métiers retenus au critère de pénibilité. Cela signifie qu'en cas d'incapacité de 10 % liée à une maladie professionnelle ou à un accident du travail – au lieu de 20 % dans les métiers non reconnus – un exploitant agricole pourra partir à soixante ans à taux plein, sans minoration.

En contrepartie, les cotisations pour les accidents du travail et les maladies professionnelles vont être revues à la hausse. Et surtout, les employeurs des branches reconnues pénibles devront tenir une fiche individuelle de suivi pour leurs salariés à leur remettre lors de leur départ à la retraite. En cas de décès du salarié, ses ayants droit pourront légalement obtenir une copie de la fiche.

Cette fiche individuelle de suivi sera obligatoire à compter du 1er janvier 2012. Ses modalités seront prochainement publiées par décret. Mais il est déjà prévu qu'elle doive mentionner les conditions d'exposition aux risques (physiques, aux produits phytosanitaires, etc.) et ce qui est mis en œuvre par l'exploitant pour faire disparaître ou réduire ces risques.

Le Point de vue de

Odile Devresse, responsable questions sociales à la FDSEA de la Marne

« Plusieurs formules pour améliorer votre pension »

Odile Devresse, responsable questions sociales à la FDSEA de la Marne

Odile Devresse, responsable questions sociales à la FDSEA de la Marne

« Le premier conseil que je donne aux exploitants pour optimiser leur retraite, c'est de vérifier en détail leur relevé de carrière ! Il arrive qu'il y ait eu des erreurs de saisie lors du passage à l'informatique de la MSA. Il faut donc garder tous les appels de cotisations sociales de la MSA et tous ses bulletins de paie. La mise en place d'un PEE (plan d'épargne entreprise), puis d'un Perco (plan d'épargne retraite collectif), accessibles uniquement si vous avez au moins un salarié, est un outil précieux pour épargner avec des avantages fiscaux et sociaux.

Dans le PEE, l'épargne est bloquée pendant cinq ans. Celle du Perco n'est débloquée que lors du départ à la retraite, sous forme de rente ou de capital, au choix du souscripteur. La retraite facultative (ex Coreva) est également un produit intéressant, car les sommes placées sont déductibles du revenu agricole, tant sur le plan fiscal que social. La sortie ne se fait qu'en rente. Il est intéressant de mixer les deux types de sorties dans le choix de son épargne. Une sortie en capital protège le conjoint et les enfants. Une sortie sous forme de rente est rassurante dans le cas où l'on vit longtemps. Le foncier constitue également une source de revenus pour les exploitants à la retraite, de même que la cession de leurs exploitations, sous réserve qu'il y ait des repreneurs. »

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