Le cognac est l'un des spiritueux les plus connus au monde. Sa région bénéficie de son prestige et de son attrait. A cela s'ajoute la proximité du littoral charentais, le deuxième de France après le Var pour l'afflux touristique, avec ce que cela entraîne comme demande d'animations, de découvertes et de visites.
Les grandes maisons de Cognac l'ont bien compris. Elles organisent depuis longtemps déjà des visites de leurs chais, pour leurs clients comme pour les touristes. Ces curieux peuvent aussi visiter des tonnelleries comme Vicard, Taransaud ou Seguin-Moreau, le musée des arts du cognac à Cognac, la verrerie de Saint-Gobain à Châteaubernard, la Maison de la vigne et des saveurs à Archiac. Ils peuvent aussi descendre la Charente en gabarre… Quand, il y a une quinzaine d'années, les viticulteurs de la région ont décidé de se lancer dans l'aventure de l'œnotourisme, ils ont donc avancé sur un terrain déjà en partie jalonné. Mais ils ont rencontré des obstacles inattendus. Ils ont ainsi découvert que l'expression « Route du cognac » avait été déposée à l'Inpi (Institut national de la propriété industrielle) par une obscure société de communication qui n'était prête à la céder que contre de conséquentes royalties. La « Route » s'est donc transformée en Etapes du cognac. Elle rassemble les grandes maisons, une centaine d'exploitations viticoles, quelques musées, des restaurateurs, des gîtes et des hôteliers.
Autour des alambics
Pour les exploitations et les entreprises labellisées, l'année est marquée par deux temps forts, l'un en été, l'autre en l'hiver. Le premier coïncide avec l'aflux des touristes, très demandeurs de sorties et de découvertes. Les viticulteurs des étapes ouvrent donc leurs chais chaque mardi et proposent une gamme très diverse d'animations, liées aux autres activités de l'exploitation ou aux passions de ses propriétaires.
En hiver, les vignerons jouent sur ce moment fort de leur vie professionnelle qu'est la distillation des eaux-de-vie. Alors que la campagne charentaise semble doucement hiberner, les filets de fumée qui s'échappent des distilleries sont comme des fanions appelant à la visite. Ce contraste entre le froid extérieur et la douce chaleur que dégage la chaudière est un bon moment à partager, d'autant que le viticulteur est presque tout le temps auprès de l'alambic et que l'odeur de l'eau-de-vie embaume l'atmosphère. Ainsi, pendant trois mois, les viticulteurs des Etapes du cognac ouvrent leurs portes chaque week-end et même chaque jour lors des vacances scolaires.
En plus des exploitations et des entreprises adhérentes, l'association des Etapes du cognac réunit l'interprofession du cognac (BNIC), les collectivités locales, le comité régional et les comités départementaux du tourisme, ainsi que les offices de tourisme. Toutes les activités proposées sont relayées localement par les offices du tourisme, une cinquantaine en tout, et nationalement et internationalement par les comités départementaux et l'interprofession.
En 2007, une étude a permis de faire le bilan du fonctionnement des Etapes et de supprimer les doublons en matière de communication. « Aujourd'hui, il est clair que la communication n'est pas notre rôle, indique Pierre Hitier, le président des Etapes, lui-même viticulteur et éleveur d'autruches. Ce n'est pas à nous d'éditer des dépliants ou de nous inscrire à des salons du tourisme. Notre rôle à nous, c'est l'animation de terrain. Mais si les comités départementaux du tourisme ou l'interprofession nous sollicitent, nous sommes évidemment à leurs côtés pour apporter nos compétences. »
La marque Vignobles & découvertes
Dernier événement qui n'est pas le moindre, les Etapes viennent d'obtenir la marque d'œnotourisme Vignobles & découvertes. Sur les quarante-deux candidats, dix seulement ont été agréés. « Le label n'apporte pas un sou, explique Pierre Hitier. Mais il permet de faire parler de nous en matière d'œnotourisme. Et il fournit une garantie de qualité aux visiteurs. »
230 000
230 000 visiteurs se sont arrêtés dans l'une des cent cinquante Etapes du cognac, en 2010. A ces touristes s'ajoutent ceux qui se rendent sur l'île de Ré et celle d'Oléron. En été, chacune des îles voit sa population décupler pour atteindre 150 000 habitants. Beaucoup de ces estivants visitent les caves sans être comptabilisés comme œnotouristes.
Le Point de vue de
Juliette et Jean-François Quéron, viticulteurs sur 67 ha à Macqueville (Charente)
« Le Cep enchanté est devenu le premier client de notre exploitation »
Leur offre
« Sur 1,5 ha de vignes, nous avons créé un petit parc à thème dédié à la vigne et à ses produits, indique Juliette Quéron. On le parcourt en neuf stations qui retracent le travail de la vigne, des vins et des eaux-de-vie. A l'entrée, les visiteurs reçoivent un guide audio en français ou en anglais où nous répondons à des questions posées par nos enfants. » Le parc est ouvert de mai à septembre, aux individus et aux groupes. Plusieurs animations s'ajoutent aux visites classiques : découverte nocturne deux fois par semaine, visites des chais et de la distillerie sur demande, soirées dégustation gratuites une fois par semaine sur réservation. « Cette année, nous avons ouvert un parcours de swingolf, une variante du golf classique, poursuit la viticultrice. Depuis, les visiteurs peuvent passer la journée entière au Cep enchanté, en déjeunant sur l'aire de pique-nique à midi. Nous proposons aussi une animation qui s'adresse plus particulièrement aux scolaires, au moment des vendanges. Les enfants cueillent les grappes que Jean-François presse pour eux. Ils emportent avec eux leur jus de raisin. »
Le nombre de visiteurs
Cette année, Juliette et Jean-François Quéron ont enregistré près de 3 000 entrées payantes. Les prix sont volontairement raisonnables, de 3,50 à 7 euros par personne selon la formule choisie, de façon à favoriser plutôt les ventes de cognac, de pineau et de vins en fin de visite.
Leur organisation
« Pour nous faire connaître, nous avons déposé des prospectus du Cep enchanté dans 200 points de distribution, notamment les campings et les offices de tourisme du littoral charentais. En pleine saison, l'activité occupe deux à trois personnes : nous (ou l'un d'entre nous) et une jeune femme que nous avons embauchée pour s'occuper des visiteurs et soigner leur accueil. Lorsque nous prenons en charge des visiteurs, nous leur demandons toujours d'où ils viennent et qui leur a conseillé l'adresse. »
Leur investissement
En 2009, l'aménagement du parc et du swingolf ont représenté un investissement de 120 000 euros, financés à parts égales par un emprunt, des subventions de la région et de l'Europe et de l'autofinancement.
Ce que ça leur rapporte
Jean-François se déclare incapable de le chiffrer précisément. Mais la SARL, le Cep enchanté, est devenue le premier client de l'exploitation qui commercialise 60 000 bouteilles par an de vins de pays, de pineau des Charentes et de cognac.