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DOSSIER - ŒNOTOURISME : Les régions vont de l'avant

TOURAINE La manne des châteaux

Guillaume Lapaque - La vigne - n°227 - janvier 2011 - page 60

Profitant depuis longtemps de l'attrait des châteaux de la Loire, les vignerons de Touraine améliorent la qualité et la diversité de leur offre œnotouristique.

«Nos roys l'ont aimé », proclame le logo de la petite appellation Touraine-Amboise, située au cœur des châteaux de la Loire. Ce slogan rappelle qu'en Touraine l'histoire, les châteaux et le vin ont toujours été entremêlés, posant les prémices de l'œnotourisme.

De Louis XI, donnant ses lettres de noblesse au touraine Noble Joué, à François 1er, implantant le cépage romorantin à Cour-Cheverny, sans oublier Rabelais, Ronsard ou Balzac, l'histoire a laissé aux Tourangeaux un volumineux dossier de presse. Ils n'ont qu'à y puiser pour susciter l'envie des touristes de venir goûter leurs vins qui vieillissent dans les caves de tuffeau d'où ont été extraites les pierres blanches des châteaux.

Sept des vingt châteaux les plus visités de France

En Indre-et-Loire et dans le Loir-et-Cher, on a fait de l'œnotourisme bien avant qu'Hervé Novelli, secrétaire d'Etat originaire de Chinon, aille développer le concept au gouvernement. Il faut dire que les deux départements concentrent, au cœur de leurs vignobles, sept des vingt monuments les plus visités de France : les châteaux de Chenonceau, Chambord, Blois, Amboise, Cheverny, Villandry et Azay-le-Rideau.

Pour le seul département d'Indre-et-Loire, les châteaux, les sites et les monuments voient défiler chaque année 3 millions de visiteurs. Et les vignerons ont appris à en profiter : plusieurs centaines des 1 500 exploitations viticoles de Touraine sont ouvertes au public. C'est l'une des raisons pour laquelle la région figure parmi les championnes de la vente directe avec 53 % des vins mis en marché par les vignerons.

Avant la mode de l'œnotourisme, les producteurs ont cherché à se rapprocher du flux touristique. Au bord de la route qui sépare les châteaux d'Amboise et de Chaumont-sur-Loire, une douzaine de vignerons et de coopératives ont investi des caves troglodytiques pour y proposer leurs vins. Ainsi, depuis quinze ans, des producteurs se sont installés dans les caves situées sous le château d'Amboise pour faire découvrir leurs vins aux 400 000 visiteurs annuels. Les collectivités locales soutiennent largement le développement de l'œnotourisme. C‘est une des priorités du programme « Cap viticulture » signé en 2009 avec la région Centre. De son côté, le comité départemental du tourisme d'Indre-et-Loire communique autour du slogan « Ici, vivre est un art », pour valoriser la gastronomie et les vins locaux en complément de châteaux déjà bien connus.

Aidés par InterLoire, les vignerons ont pris conscience de la nécessité de professionnaliser leur offre. Ainsi, ceux de la vallée du Cher ont compris que leur route des vins, fut-elle la plus longue de France, avait peu d'intérêt si elle n'était pas animée. Depuis sept ans, ils organisent tous les étés des « soirées dans les vignes ». Les touristes s'inscrivent à l'office du tourisme de Saint-Aignan-sur-Cher. A partir de 17 h 30, ils sont accueillis sur les exploitations pour une visite des vignes, du chai, des explications et une dégustation. Cet été, leurs collègues de Chinon ont repris l‘idée.

A Cheverny, les trente-trois vignerons ont mobilisé 370 000 euros pour aménager en 2008 une maison des vins dans les dépendances du château. Le succès est au rendez-vous : dès la deuxième saison, ils ont dénombré 75 000 entrées, soit un quart des visiteurs du château, et vendu près de 50 000 bouteilles. Et au-delà de ces exemples collectifs, dans toute la région, des vignerons commencent à étoffer les activités qu'ils proposent aux touristes : au-delà de la traditionnelle dégustation-vente, les uns ouvrent des aires de pique-nique dans les vignes, les autres organisent des promenades en calèche dans le vignoble, des réceptions de groupes de cyclotouristes ou de promeneurs équestres…

Une nécessité

Ce n'est donc pas un hasard si la Touraine compte deux des dix premiers sites de la marque Vignobles & découvertes. L'un de ces sites se trouve dans la vallée du Loir et l'autre sur les secteurs de Chinon, Bourgueil et Azay-le-Rideau.

Mais en Touraine, l'œnotourisme est aussi une nécessité, « parce qu'il est difficile de valoriser sa production via le négoce », déplore Jean-Max Manceau, président de la Fédération des associations viticoles d'Indre-et-Loire.

850 000 C'est le nombre de visiteurs

C'est le nombre de visiteurs annuels du château de Chenonceau, situé au milieu des vignes de la future appellation Touraine-Chenonceau. Si elle compte sur ses châteaux, dont beaucoup accueillent plus de 300 000 visiteurs, la région a aussi développé d'autres attractions comme le circuit « La Loire à vélo » qu'empruntent chaque année près de 70 000 cyclotouristes.

Jean-Louis Chevallier, président de la cave de Montlouis-sur-Loire. 115 ha de vignes. « L'accueil des touristes nous apporte plus du tiers de notre chiffre d'affaires »

Sa stratégie

Née en 1961, la cave coopérative de Montlouis n‘a cessé d‘accroître son offre en direction du public. Ses seize adhérents veulent toucher une clientèle variée de touristes étrangers et de locaux avec pour mot d'ordre la disponibilité. En 2005, la cave a ouvert « L'espace des producteurs », un magasin où l'on peut déguster et acheter ses vins ainsi que des produits alimentaires et artisanaux locaux. « Trois ans plus tard, nous avons obtenu le label cave touristique délivré par InterLoire. En 2009, nous avons été très fiers de recevoir le prix d'excellence pour la qualité de l'accueil », se félicite Jean-Louis Chevallier, président de la cave.

Son offre

Creusée dans le coteau de tuffeau, la cave est ouverte tous les jours de l'année sans exception et deux week-ends de portes ouvertes sont organisés par an. Elle reçoit des individus et des groupes, sans réservation préalable. Avec réservation, les groupes se voient proposer une dégustation de vins plus complète. Projeté dans un coin du caveau, un film de présentation sur l'établissement diffusé en plusieurs langues permet aux touristes de comprendre la méthode de production et de découvrir l'appellation.

Son organisation

« Nous travaillons avec les offices de tourisme, les autocaristes et les hôteliers du département et de la région Centre pour faire connaître notre offre », détaille Jean-Louis Chevallier. La cave compte aussi sur son site web, des insertions dans la presse ou les guides comme celui du Routard. L'accueil est assuré par deux des quinze salariés, qui parlent parfaitement l‘anglais, et font visiter le site et animent la dégustation.

Ses investissements

En 2005, pour ouvrir l'espace des producteurs et aménager le site, la cave a déboursé 220 000 €. « Demain, nous débloquerons une nouvelle enveloppe pour aménager de nouveaux parkings, notamment pour les bus, car celui qui existe est trop petit. Sur la route des châteaux, l'accessibilité aux autocars est un atout majeur. » Une troisième personne pour l'accueil en cave sera bientôt recrutée. Par ailleurs, la cave a réalisé des investissements pour recevoir les personnes à mobilité réduites (rampes, toilettes handicapés).

Ses résultats

La cave reçoit chaque année plus de 30 000 visiteurs. Le panier moyen s'élève à 61 €. Grâce à la vente directe et par correspondance, la cave réalise un chiffre d'affaires de 1,3 million, sur un total de 3,3 M€.

L'essentiel de l'offre

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