Tous les viticulteurs le savent : les attaques de mildiou sur grappes pénalisent les rendements. Mais qu'en est-il de la qualité des vins ? Pour le savoir, la chambre d'agriculture de Gironde a réalisé des essais en 2008 et 2009 sur une vendange de rouge, en vue de définir un seuil de nuisibilité des attaques de rot brun.
Rappelons que ce faciès résulte d'attaque tardive du mildiou. Les grains prennent une teinte brune et le parasite se développe à l'intérieur des raisins.
En 2008, les expérimentateurs ont récolté des grappes saines et incorporé 5, 10, 20, 30 ou 50 % de grappes atteintes à 100 % par le mildiou. Ils ont éraflé la vendange puis réalisé une vinification standard (macération de quinze jours à 28°C, conservation des gouttes seules). Vingt-huit dégustateurs ont goûté les vins à l'aveugle.
Un caractère végétal plus marqué
« Dès 5 % de grappes atteintes à 100 %, ils détectent une dépréciation de la qualité organoleptique. Ils notent une impression de défaut avec un caractère végétal plus marqué. Dès 20 %, ils rejettent les vins », rapporte Ludivine Davidou, de la chambre d'agriculture de Gironde.
L'année suivante, les expérimenteurs affinent le protocole. « Pour nous rapprocher au mieux de ce qui se passe sur le terrain, nous avons travaillé en intensité d'attaque », précise Ludivine Davidou, c'est-à-dire en pourcentage de baies attaquées. Les expérimentateurs ont ainsi vinifié une vendange issue de grappes présentant 0, 2, 5, 10, 15 ou 20 % de baies touchées par le rot brun (intensité d'attaque). Là encore, dès 5 % d'attaque, vingt dégustateurs ont constaté une dépréciation des vins qui se traduit par une altération de la qualité des tanins. A partir de 10 %, ils mettent en évidence une dégradation de la qualité des arômes au nez et en bouche, avec des notes végétales exacerbées.
En dessous de 5 %, pas de préjudice
« 2 à 3 % d'attaque de rot brun n'ont pas d'impact sur la qualité des vins. Jusqu'à 5 %, les dégustateurs détectent des modifications organoleptiques, mais elles ne sont pas préjudiciables. A partir de 10 %, la qualité des vins rouges est nettement déprécié », résume Ludivine Davidou.
Les expérimentateurs vont poursuivre leurs essais. « Nous allons essayer d'identifier la molécule responsable du goût “mildiou”, qui se rapproche du caractère végétal, et travailler sur les vins blancs », annonce-t-elle.