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DOSSIER - Millésime précoce : Ils sont prêts

Millésime précoce Ils sont prêts

MARINE BALUE - La vigne - n°233 - juillet 2011 - page 24

Avec la chaleur du printemps, la vigne a pris entre dix jours et un mois d'avance. Si la météo estivale est clémente, les vendanges seront très précoces. La filière, rodée par les millésimes 2003, ou 2007, anticipe ses préparatifs.
VENDANGES. En 2011, les vignerons français s'attendent à vendanger plus tôt que d'habitude, sauf incident météo pendant l'été. Depuis fin mai-début juin, ils ont planifié le recrutement de la main-d'œuvre, la préparation des chais ou la révision du matériel.

VENDANGES. En 2011, les vignerons français s'attendent à vendanger plus tôt que d'habitude, sauf incident météo pendant l'été. Depuis fin mai-début juin, ils ont planifié le recrutement de la main-d'œuvre, la préparation des chais ou la révision du matériel.

« Nous sommes sereins. » « Il n'y a pas de raison de paniquer »… La forte probabilité de vendanges très anticipées n'effraie pas les vignerons. Et pour cause : ils ont déjà connu, pour la plupart, des millésimes précoces. Alors, ils « commencent à avoir l'habitude ». Ils font donc preuve d'anticipation et d'organisation.

Dans le Bas-Rhin, François Koch, vigneron à Nothalten, ne s'inquiète pas trop de la précocité qu'affiche la vigne depuis juin. Il prévoit de commencer à vendanger ses parcelles de crémants vers le 25 août, soit avec trois semaines d'avance. Son expérience de 2003 et de 2007 l'aide à s'organiser. « Nous avions démarré les crémants début septembre, se souvient-il. Les étudiants, qui n'avaient pas encore repris les cours, ont pu y participer. Nous pourrons sûrement compter à nouveau sur eux cette année. » Et si les journées sont chaudes, comme en 2003, la récolte ne se fera que jusqu'à midi.

Ils seront d'attaque dès la mi-août

Des vendanges en août ? Jean-Hugues Goisot, exploitant en Bourgogne, en a aussi vécues en 2003 et 2007. « Dans les années quatre-vingt-dix, nous débutions les récoltes fin septembre. Courant 2000, c'était plutôt début septembre, analyse-t-il. Ce sera certainement encore plus tôt cette année, la vigne ayant, en juin, un mois d'avance sur 2010 ! » Depuis le mois de mai, le domaine anticipe les choses et met tout en œuvre pour être d'attaque aux alentours du 25 août.

En Champagne, le constat est proche. D'après Marc Gandon, directeur du vignoble de la maison Mumm Perrier Jouët, les vendanges pourraient commencer autour du 21 août. Il explique que dans la région, elles ont lieu en général entre quatre-vingt-huit et cent six jours après la floraison. « Exception faite de 1976 et de 2003, où ce délai a été de quatre-vingt-deux jours à cause de la sécheresse, note-t-il. Si le temps reste aussi sec cette année, il se peut que nous vendangions avant le 20 août. » Le responsable du vignoble tient bien compte de cette précocité. Il a déjà tout planifié pour que ses équipes soient opérationnelles dès la mi-août.

Sur le secteur de Touraine-Noble-Joué, c'est surtout la canicule de 2003 qui a marqué Rémi Cosson, vigneron à Esvres (Indre-et-Loire). Surpris par l'accélération du cycle végétatif, il avait entamé ses contrôles de maturité trop tard. Il avait dû annuler l'habituelle visite de vignes d'avant vendanges qu'il réalise avec le syndicat de ce cru, dont il est le président. Cette année, les producteurs ont assuré le coup, fixant cette visite beaucoup plus tôt.

La floraison a déclenché l'anticipation

Depuis le printemps, le Sud-Ouest, lui, conjugue précocité et sécheresse. A Cognac, à Bordeaux ou à Gaillac, l'avance est survenue très tôt dans la saison, rendant la situation exceptionnelle. De mémoire de vigneron, Jean Médeville, dans le Bordelais, n'avait jamais vu ça. « Dès que la vigne a commencé à fleurir, nous avons su que nous devrions être prêts en avance et nous avons anticipé », expose-t-il.

« Le débourrement et la floraison se sont produits très tôt », confirme Claude Houbart, le directeur de la cave de Labastide-de-Lévis (Tarn). De ce fait, les viticulteurs savent depuis longtemps qu'ils ont environ deux semaines d'avance. Mais l'assèchement des sols pourrait encore bouleverser la donne. Ce qui ennuie également Stéphane Roy, producteur de cognac : « La sécheresse peut provoquer des blocages de maturité et la chaleur peut accélérer la maturation. » Pour le vigneron, qui cherche à la fois acidité et faible degré dans ses raisins, l'équilibre risque d'être difficile à trouver cette année. Pour se préparer à ce millésime qui s'annonce des plus précoces, les viticulteurs peuvent en tout cas compter sur leurs laboratoires et leurs prestataires. En effet, beaucoup ont déjà prévu de décaler leurs congés et de renforcer leurs équipes ou leur matériel. « Nous aurons deux ou trois machines à vendanger en plus pour le Sud-Ouest, car les vendanges vont sans doute se chevaucher avec celles du Midi », illustre Etienne Barrère, directeur d'une grande entreprise de travaux viticoles dans le Gers.

Le Midi est peut-être la région où la situation se rapproche le plus de la normale. Certes, la floraison a été un peu précoce. Mais Jean Daurat-Fort, vigneron à Tuchan (Aude), doute que le millésime soit comme 2003. « S'il fait vraiment chaud cet été, nous avancerons peut-être les vendanges de deux semaines, tout au plus », rassure-t-il. Rien de bien nouveau pour le Languedoc, qui a souvent démarré les vendanges avant mi-août, ces dernières années. De toute façon, comme le souligne Jean Daurat-Fort, « il faut toujours bien se préparer aux vendanges, précoces ou non. »

Le Point de vue de

François Vinit, ingénieur d'études à la direction de la climatologie, à Météo France.

« Un été plus chaud que la normale »

François Vinit, ingénieur d'études à la direction de la climatologie, à Météo France.

François Vinit, ingénieur d'études à la direction de la climatologie, à Météo France.

« A la fin de chaque mois, nous analysons les résultats des modèles de Météo France et des modèles internationaux. Nous étudions l'état de la surface des océans et de l'atmosphère, qui sont à la base de prévisions saisonnières, pour les trois mois suivants. Celles-ci sont différentes des prévisions météo classiques, qui prévoient le temps à quelques jours. Elles n'indiquent qu'une tendance moyenne pour un trimestre, donnant le scénario le plus probable parmi les suivants : dans la normale, supérieur ou inférieur à la normale. Pour juillet-août-septembre, quasiment tous les modèles donnent température au-dessus de la normale de saison. Nous pensons qu'il risque d'y avoir une situation de blocage anticyclonique au niveau de l'Europe du Nord ou centrale, ce qui peut-être lié à de fortes chaleurs. Mais nous ne pouvons pas dire plus. Une canicule, par exemple, n'est prévisible qu'une dizaine de jours avant, au mieux. Il faut savoir que, l'Europe étant dans une zone tempérée, les prévisions sont moins fi ables qu'en zone tropicale. La fiabilité est aussi moins bonne en été qu'en hiver et pour les précipitations que pour les températures. En bref, prévoir la pluviométrie à trois mois, en Europe, est quasi impossible. »

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