Philippe Carrille en est convaincu : « Aujourd'hui, tout le monde est capable de faire du bon vin. Mais pour remporter un appel d'offres, il faut se différencier. » Le plus ? C'est le développement durable pour ce viticulteur à la tête du château Poupille (Gironde), dont toutes les vignes, soit 26 hectares en côtes-decastillon et saint-émilion (une production de 150 000 bouteilles par an), sont en bio depuis 2008. En 2009, il met en place, avec l'appui technique de la chambre d'agriculture, une chaudière à sarments pour chauffer les chais et la maison, soit 2 000 m. Il investit 100 000 euros (50 % d'aides de la région et du département). Juste après la taille, les sarments sont pressés en bottes, et stockés sous des bâches. Puis ils sèchent pendant neuf mois pour atteindre 15 % d'humidité. Avec ses 26 hectares, le château Poupille produit 35 tonnes de sarment par an. Au final, Philippe Carrille fait une économie de 7 000 à 8 000 euros sur le combustible. Et le retour sur investissement est relativement court.
Cette valorisation énergétique des sarments, c'est l'histoire que Philippe Carrille se plaît à raconter aux 500 à 600 visiteurs professionnels qui viennent dans sa propriété chaque année. « Ils visitent nos installations et je leur explique pourquoi et comment nous sommes allés vers le développement durable. C'est ma façon de communiquer », indique-t-il.
« J'ai pu faire passer des messages en interne »
De fait, pas de logos, pas de collerettes sur les bouteilles, pas de site internet non plus. Le viticulteur montre à ses visiteurs son silo de 50 m3 dans lequel les sarments sont broyés. Sans oublier un petit tour du côté du hangar semi-enterré doté de panneaux photovoltaïques. Au passage, il leur explique que la propriété est l'une des 27 entreprises viticoles qui ont adhéré au SME (Système de management environnemental) du vin de Bordeaux, une association certifiée ISO 14001, impulsée par l'interprofession.
« En étant au SME, j'ai pu faire passer des messages en interne à mes salariés qui avaient du mal à appréhender le suivi de l'entretien du matériel ou des consommations. Pour eux, c'était du flicage », lâche-t-il. Philipe Carrille vend 80 % de sa production au grand export. Lorsqu'il part en Asie, trois mois par an, il continue d'expliquer sa stratégie aux importateurs qu'il rencontre. « Le retour sur investissement apporté par le développement durable n'est pas quantifiable aujourd'hui, mais demain, ce sera une nécessité », estime le viticulteur bordelais.