À première vue, les chiffres du recensement agricole de 2010 sont bien tristes. À l'exception de la Champagne, toutes les régions ont perdu des exploitations viticoles par rapport à l'année 2000. Beaucoup de vignerons ont dû quitter le métier, d'autres sont partis à la retraite sans trouver de successeur. L'explication est connue : la chute des ventes, des prix, puis des rendements à partir de 2002-2003, a entraîné une telle perte de revenus qu'il a fallu en trouver ailleurs et que les vocations se sont effondrées.
En dix ans, quatre vignobles seulement se sont agrandis : le Cher, la Champagne, la Bourgogne et le Jura. Ils n'ont pas vraiment connu de crise. Les trois premiers valorisent bien leurs vins. Le quatrième peut compter sur une clientèle locale très fidèle. Quatre autres vignobles ont une surface stable. Et le reste recule. Le Languedoc-Roussillon, le Muscadet, Gaillac et le Beaujolais subissent la plus forte cure d'amaigrissement, perdant près d'un cinquième de leurs vignes.
Des exploitations plus fortes
Mais au-delà de ces chiffres, le recensement montre un renforcement des exploitations restantes. Celles-ci se sont soit agrandies, soit recentrées autour de leurs activités ou de leurs parcelles les plus rentables. Elles sont dirigées par des exploitants mieux formés. Elles sont plus souvent organisées en société. Elles font plus appel à des salariés et moins à la main-d'œuvre familiale, car parents et retraités de la viticulture ont désormais mieux à faire que de donner des coups de main pour tailler les vignes. Dans certaines régions, elles ont aussi davantage pris en main la commercialisation de leurs vins pour faire face aux défaillances du négoce.
C'est ce nouveau visage de la viticulture que nous révélons dans ce dossier, le premier à analyser en détail, région par région, tous les chiffres et les tendances du recensement général agricole de 2010. Et parce qu'une décennie, c'est de l'histoire et du vécu, bien plus qu'une somme de chiffres, nous avons demandé à des vignerons quels changements ils ont observés autour d'eux et apportés à leur exploitation. Leurs témoignages attestent de la vitalité et des ressources de la filière.