En 2010, le vignoble bourguignon recouvre 31 500 ha. La Saône-et-Loire rassemble 42 % de cette surface, suivie de près par la Côte-d'Or (30 %), puis l'Yonne (22 %) et la Nièvre (5 %). Ce vignoble a connu une croissance de 4 % entre 2000 et 2010. Il s'est beaucoup développé dans l'Yonne, avec 1 000 ha de plus en dix ans, et un peu dans la Nièvre, avec 200 ha supplémentaires. En revanche, il est resté stable en Côte-d'Or et en Saône-et-Loire.
En Bourgogne, une exploitation agricole sur cinq est viticole, bien que la vigne occupe à peine 2 % des terres agricoles. Parmi les 4 100 exploitations détenant des vignes, 91 % sont spécialisés en viticulture (contre 83 % en 2000). Et ces exploitations spécialisées cultivent 98 % des vignes.
L'emploi se maintient
Malgré la croissance du vignoble, une exploitation spécialisée en viticulture sur cinq a disparu. Cette baisse concerne principalement les petites structures. Ainsi, celles qui cultivent moins de 10 ha sont en chute de 36 % en dix ans, alors que les unités de plus de 10 ha affichent une croissance de leurs effectifs (+19 %) et de leur surface (+23 %).
« Il semble logique que les petites exploitations disparaissent, observe Claude Chevalier, président de la Confédération des vignerons de Bourgogne. Les frais fixes sont de plus en plus importants et il faut arriver à investir. D'autre part, le meilleur contrôle des rendements n'a pas toujours été associé à une hausse des prix. Les revenus viticoles ont été touchés. Les petits domaines ont du mal à faire face à tous ces changements. Il faut rester vigilant sur ce phénomène. À quoi notre viticulture ressemblera-t-elle dans vingt ans si cette tendance se maintient ? »
L'avenir le dira. Pour l'instant, elle reste l'affaire de petits domaines dont la taille moyenne s'établit à 7,6 ha, contre 9 ha pour l'ensemble de la France. En terme d'emploi, la viticulture est la seule filière agricole de Bourgogne à offrir plus de travail (+2 %). Pourtant, la récolte mécanique progresse fortement (+20 % des surfaces entre 2000 et 2010). Désormais, plus de la moitié des vignes sont vendangées à la machine (55 %).
La récolte mécanique est très répandue dans la Nièvre et l'Yonne, mais elle reste minoritaire en Côte-d'Or.
Succession en famille
Si le volume d'emploi se stabilise, c'est en raison de l'augmentation de la surface du vignoble et du développement de pratiques nécessitant plus de main-d'œuvre, comme l'agriculture biologique, le désherbage mécanique ou encore le tri des vendanges, un secteur dans lequel les propriétés ont fortement investi.
Cet emploi est de moins en moins familial. Entre 2000 et 2010, la participation familiale décroît de 11 %, pour ne plus assurer que 41 % du travail viticole. L'emploi salarié est en forte croissance (+16 %). « Les viticulteurs prennent plus de temps pour vendre eux-mêmes leurs vins, explique Claude Chevalier. Ils font donc appel à une aide extérieure pour les travaux viticoles. » La vente en bouteilles progresse très fortement en Côte-d'Or et en Saône-et-Loire, mais régresse dans l'Yonne.
« L'activité de négoce développée par les viticulteurs est en essor depuis dix ans, indique Jérôme Prince, président du syndicat des courtiers bourguignons. Par ailleurs, le négoce a la volonté d'acheter en raisins frais et en moûts, plutôt qu'en vins en vrac. Il veut maîtriser la vinification. Ce changement s'explique également par la demande croissante en vins effervescents. »
Le recensement agricole en mesure l'importance : 16 % de la récolte 2010 s'est échangée en raisins ou en moûts, contre 10 % de la récolte 2000. De ce fait, la proportion de récolte vinifiée en cave particulière baisse (55 % en 2010, contre 62 % en 2000), alors que la proportion de récolte vinifiée en coopérative reste stable.
Le recensement, dont les premiers résultats sont parus fin décembre dans une note de quatre pages d'Agreste Bourgogne, révèle d'autres informations. Ainsi, la famille reste privilégiée dans le cadre des successions. Seuls 9 % des exploitants ne connaissent pas leur successeur. Lorsque le dernier est connu, il appartient à la famille dans 90 % des cas. L'âge moyen des exploitants reste stable (49 ans) depuis 2000. La viticulture représente une des filières les plus féminisées, avec une légère progression de la proportion d'exploitantes. Elles sont 26 % en 2010, contre 24 % en 2000, et ont en moyenne 52 ans.
Enfin, la Bourgogne reste une région presque exclusivement tournée vers l'AOC : seuls 110 ha de vigne sont sans indication géographique.
Le Point de vue de
Jean-René Nudant, domaine Nudant à Ladoix-Serrigny (Côte-d'Or). 13 ha en 2000, 15,9 ha en 2010
« Nous avons pu nous agrandir »
« La surface de notre exploitation a augmenté depuis dix ans, notamment depuis l'entrée de mon fils Guillaume, qui est aujourd'hui associé. Lorsqu'il est arrivé en 2005, dans le cadre de son statut de jeune exploitant, nous avons pu acquérir des vignes à Nuits-Saint-Georges, ce qui nous a permis de passer de 13 à 15,89 hectares aujourd'hui. Nos vignes sont entièrement en appellation d'origine. Notre exploitation a un statut d'EARL. Il a succédé au Gaec mis en place par mes parents il y a une vingtaine d'années. Depuis dix ans, tous les domaines de Ladoix connaissent un accroissement faible mais significatif de leur taille. Nous sommes bien conscients qu'avec les contraintes actuelles, nous avons tout intérêt à grandir, mais cela reste très difficile en Côte-d'Or car les occasions sont extrêmement rares. Les domaines sont familiaux et se transmettent de génération en génération.
Donc peu de vignes se vendent. Dans notre cas, c'est Guillaume qui va nous succéder. En ce qui concerne l'emploi, nous avons un salarié permanent, ce qui n'était pas le cas il y a dix ans.
Au niveau de l'emploi familial, c'est stable : mon fils est arrivé et ma mère est partie. Concernant les techniques viticoles, nous sommes passés à la machine à vendanger en 2000. C'est également le cas pour quatre viticulteurs sur douze à Ladoix-Serrigny. Nous faisons aussi une utilisation beaucoup plus raisonnée des produits phytosanitaires depuis dix ans. En terme de vente, nous ne constatons pas de réel changement. Nous vendons entièrement notre production en bouteilles, avec la répartition suivante : 65 % en direct aux particuliers, 25 à 30 % à l'export (principalement le Québec et l'Asie) et 5 à 10 % en restauration et aux cavistes.
Nous participons à des salons pour les particuliers, c'est là que notre vin se vend le mieux. Ce qui a changé chez les acheteurs, c'est une meilleure connaissance des vins. Depuis l'avènement d'internet, ils sont plus informés. Ils sont aussi très sensibles à l'accueil que le viticulteur leur propose et au temps qu'il passe avec eux. Le développement de l'œnotourisme est pour nous le futur de la viticulture. »