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Essor des baux de vingt-cinq ans

Aude Lutun - La vigne - n°239 - février 2012 - page 77

Le bail de vingt-cinq ans se développe dans les vignobles prisés, souvent dans le cadre hors familial. Au terme des vingt-cinq années, le propriétaire peut reprendre les vignes sans donner de motif.
LA BOURGOGNE, est l'une des régions où se développe ce bail. Le coût du foncier et sa faible rentabilité pour les propriétaires expliquent cet engouement. © P. ROY/ARCHIVES

LA BOURGOGNE, est l'une des régions où se développe ce bail. Le coût du foncier et sa faible rentabilité pour les propriétaires expliquent cet engouement. © P. ROY/ARCHIVES

Si les baux de neuf ou dix-huit ans sont encore largement majoritaires en viticulture, les notaires observent un développement des baux de vingt-cinq ans à long préavis. Comment s'explique cette recrudescence ? Par les modalités de sortie du bail, qui sont beaucoup plus avantageuses pour le propriétaire que dans le cadre d'un bail de dix-huit ans. En effet, au terme des vingt-cinq ans, le propriétaire retrouve son bien sans avoir à justifier son congé, qu'il doit donner la vingt et unième année au fermier. Ce n'est pas le cas pour un bail de neuf ou dix-huit ans, où le congé ne peut être signifié que si le propriétaire ou l'un de ses descendants reprend l'exploitation des vignes.

Plus connu en Bourgogne qu'en Gironde

« Cette liberté de reprendre le bien sans motif vaut bien un fermage de sept ans plus long que le bail à long terme de dix-huit ans, souligne Me Philippe Laveix, notaire à Sauveterre-de-Guyenne, en Gironde, et président de Jurisvin. En Gironde, les propriétaires restent souvent sur le principe du bail de dix-huit ans dans le cadre familial. En revanche, on voit le bail de vingt-cinq ans se développer depuis quatre à cinq ans hors cadre familial. »

En Bourgogne et en Champagne, ce bail semble plus connu. Il est parfois appliqué au sein des familles. Le coût du foncier et sa faible rentabilité pour les propriétaires expliquent ce développement.

« Aujourd'hui, les personnes parties prenantes d'un bail se renseignent davantage, précise Me Gilles Séraphin, notaire à Beaune (Côte-d'Or). Je connais une société d'exploitation qui, lors du départ à la retraite de l'exploitant, a transformé le bail de dix-huit ans en bail de vingt-cinq ans. Le frère du retraité, copropriétaire des vignes, souhaitait que ses enfants aient une sortie de bail assurée. En Bourgogne, on voit ce bail se développer depuis un peu plus de dix ans. Ce sont surtout les investisseurs extérieurs qui le contractent avec leur fermier, notamment lors de la création de groupements fonciers viticoles constitués de petits porteurs qui font un achat plaisir. » La signature d'un bail de vingt-cinq ans se fait presque toujours à l'initiative du propriétaire. Le fermier a plutôt intérêt à privilégier le bail de neuf ou dix-huit ans, qui lui assure plus de visibilité. Vingt-cinq ans, c'est loin de faire une carrière… C'est donc dans les régions où règne une compétition pour obtenir des fermages que se multiplient ces baux. C'est l'éternelle loi du rapport de force, ici favorable aux propriétaires. « C'est sûr que le fermier préfère un bail de dix-huit ans, confirme Gilles Séraphin. Mais il n'a pas le choix. Il est donc satisfait de signer un bail de vingt-cinq ans. » Un peu plus au sud, dans le Beaujolais, la donne est différente. « Je vois très peu de baux de vingt-cinq ans, témoigne Me Colette Gasselin, notaire à Romanèche-Thorins (Saône-et-Loire). Culturellement, cette région est attachée au bail de dix-huit ans. Selon l'âge de leurs enfants, les propriétaires ont parfois des hésitations entre le bail de neuf ans et celui de dix-huit plutôt que d'opter pour celui de vingt-cinq ans qui leur paraît long. De toute façon, il est assez rare dans le Beaujolais que le propriétaire souhaite reprendre ses vignes. »

Développement de l'achat d'usufruit temporaire

En marge du bail de vingt-cinq ans, un autre mode d'exploitation se met en place, de manière encore très confidentielle. Il s'agit de l'achat temporaire d'usufruit, qui commence à se développer en Champagne. Concrètement, un propriétaire cède à un viticulteur le droit d'exploiter ses vignes durant une période définie au bout de laquelle il récupère entièrement son bien.

« Dans notre région, le prix de la vigne n'est plus corrélé à sa rentabilité, résume Stéphane Billard, avocat spécialisé en droit agricole et viticole à Reims (Marne) au cabinet Juriter. Il existe de nouvelles formes d'acquisition temporaire qui peuvent faire peur par méconnaissance. Mais qu'est-ce qui est préférable ? Avoir un bail de vingt-cinq ans et prendre ses valises à son terme sans droit de suite ou faire un achat d'usufruit temporaire de vingt-cinq ans ? Toutes les solutions doivent être envisagées. »

Les règles du bail de vingt-cinq ans

Le bail de vingt-cinq ans est un bail à long terme et bénéficie à ce titre des avantages fiscaux liés aux baux à long terme. Pour que le propriétaire puisse retrouver la libre disposition de son bien au terme des vingt-cinq années, le bail doit comporter une clause de tacite reconduction incluant la délivrance du congé quatre ans avant la fin du bail, soit la vingt et unième année.

Avec cette clause, le bail se renouvelle à son terme par tacite reconduction par période d'un an, sans limitation de durée. Chacun des signataires du bail peut y mettre fin quand il le souhaite, sans motif, sous réserve d'avoir délivré son congé par voie d'huissier quatre ans avant l'échéance.

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