« La France est le premier pays utilisateur de folpel au monde », indique Carine Reyniers, chef de produits insecticides et fongicides chez Makhteshim Agan, qui défend et produit cette matière active au niveau mondial. En début d'année, la firme a donc fêté les 50 ans du folpel sur le marché français. À cette occasion, elle a commandé à Biotransfert des études pour préciser les propriétés de sa matière active. Ces travaux révèlent un léger effet « stoppant » contre le mildiou, comme pour certains produits cupriques (voir article précédent).
« Le traitement avec du folpel six heures après contamination agit sur les zoospores alors qu'elles ont déjà germé à la surface des feuilles et tant qu'elles n'y ont pas pénétré. Mais des symptômes sont tout de même visibles », précise Makhteshim, qui insiste sur la nécessité de réaliser des traitements préventifs pour obtenir la meilleure efficacité possible.
La firme a aussi demandé à Biotransfert d'évaluer la résistance au lessivage du Folpan 80 WG, son produit renfermant 80 % de folpel. Conclusions : au laboratoire, le produit « ne décroche légèrement qu'après 60 mm de pluie intense et continue 24 heures après traitement. Il est légèrement plus résistant à la pluie lorsque celle-ci est intense et courte plutôt que légère et longue », détaille Carine Reyniers. Les conseillers viticoles préconisent généralement de renouveler un traitement au folpel, comme tout autre produit de contact, après 25 mm de pluie. Cette règle serait donc un peu trop stricte. Mais il faudrait des essais au champ pour le vérifier.
Concernant la toxicologie, le regard porté sur la molécule semble moins sévère que par le passé. Et cela même si elle est très irritante pour la peau et les yeux, ce qui impose de respecter un délai de rentrée dans les parcelles de 48 heures après traitement.
Lutte raisonnée
La molécule est classée Xn (nocif ) et supporte la phrase de risque R40 « effet cancérogène suspecté, preuves insuffisantes ». Makhteshim explique que, dans les années quatre-vingt, le captafol, appartenant à la même famille que le folpel, avait été jugé cancérogène. Par assimilation, tous les produits de cette famille ont été classés comme l'étant probablement. Mais le caractère cancérogène du captafol est en réalité dû à un métabolite qui n'apparaît pas lors de la dégradation du folpel.
« Le folpel est cancérogène sur la souris à partir d'une dose clairement identifiée (20 mg/ kg de masse corporelle et par jour), mais le produit ne montre aucun potentiel génotoxique in vivo », indique en 2009 un rapport de l'EFSA, l'Agence européenne de sécurité sanitaire. Ce à quoi Makhteshim répond : « L'effet cancérigène sur des souris n'est pas extrapolable à l'homme. »
La firme ajoute que la fiche toxicologique de l'INRS (Institut national de recherche et de sécurité) indique, au chapitre des effets cancérogènes, qu'il n'est « pas montré que l'exposition au folpel peut constituer un facteur de risque de mortalité ou d'une pathologie spécifique ». Makhteshim souligne aussi que le folpel est rapidement dégradé dans le sol et qu'il « s'intègre parfaitement dans les programmes de lutte raisonnée car il est neutre vis-à-vis des principaux auxiliaires de la vigne ». Pourtant, les spécialités à base de folpel portent la phrase de risque R50 « très toxique pour les organismes aquatiques ». Mais la firme soutient que si l'on respecte « les bonnes pratiques, la probabilité d'une migration de folpel vers les eaux souterraines ou supeficielles est très faible. Le risque d'exposition des organismes aquatiques est quasi nul ».
Makhteshim s'emploie aussi à balayer « l'idée reçue selon laquelle le folpel entraînerait des problèmes à la vinification, souligne Carine Reyniers. La molécule se dégrade sur les raisins dans les quinze jours qui suivent le traitement. Si on respecte la dose de 1 500 g/ ha et le délai avant récolte de 28 jours, les fermentations se déroulent sans problème, tant au niveau du démarrage que de la durée. Et il n'y a aucun résidu dans les vins. »