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DOSSIER - Fongicides : Les inusables

Soufre La tentation d'un retour

La vigne - n°240 - mars 2012 - page 23

Firmes et conseillers plaident pour un retour du soufre dans la viticulture conventionnelle pour renforcer les programmes et réduire les risques de résistance. Plus facile à dire qu'à faire.
Utilisé en début de saison, le soufre a un pouvoir curatif sur les premières contaminations d'oïdium. © J.-C. GUTNER

Utilisé en début de saison, le soufre a un pouvoir curatif sur les premières contaminations d'oïdium. © J.-C. GUTNER

Tout comme le cuivre, le soufre est utilisé en viticulture de façon ancestrale. Il agit, par contact et par effet vapeur, contre l'oïdium en bloquant sa respiration cellulaire et en inhibant la synthèse de protéines et de certains acides. « Utilisé en début de saison, il a un pouvoir curatif sur les premières contaminations d'oïdium, souvent difficiles à détecter, indique Jean-Baptiste Drouillard, expert national vigne chez Syngenta. Il présente aussi des effets complémentaires intéressants contre l'acariose, l'érinose et l'excoriose, et ce pour un coût acceptable. »

Elément nutritif

Outre son action contre plusieurs maladies, le soufre est un élément nutritif de première importance, ajoute Jean-Baptiste Drouillard, « il participe activement à la production de substances indispensables à la vie des plantes, tels que les albumines, enzymes, vitamines et régulateurs de croissance. Il joue un rôle important dans la synthèse de la chlorophylle ».

Comme les autres produits de contact, il n'est pas concerné par des phénomènes de résistance. « Ce produit d'origine naturelle est multisite, à la différence des fongicides de synthèse qui sont unisites », rappelle Gilbert Cazals, conseiller viticole à la chambre d'agriculture de l'Aude. Celui-ci préconise de réintégrer du soufre dans les programmes de traitement conventionnels anti-oïdium.

« On peut appliquer du soufre poudre à la floraison et à la nouaison. Cela permet de limiter l'usage d'IBS et de spiroxamine, par exemple, pour réduire les risques de résistances. On peut moduler les doses en fonction de la pression et cela apporte un peu de souplesse dans le programme. Lorsqu'on introduit du soufre dans un programme, on peut décaler le traitement suivant si les conditions météo ne sont pas bonnes. » Gilbert Cazals conseille d'utiliser plutôt le soufre poudre pour son « pouvoir couvrant intéressant après la fleur car la végétation est plus dense. Mais le soufre mouillable peut aussi être incorporé dans les programmes », ajoute-t-il.

Ce conseiller n'est d'ailleurs pas le seul à plaider pour un retour du soufre dans la lutte anti-oïdium. Des distributeurs et des conseillers d'autres régions font aussi des préconisations en ce sens, de même que les firmes phytos qui commercialisent des spécialités à base de soufre.

« Cela a toujours fait partie de nos recommandations », déclare Régis Harat, directeur marketing et développement chez Cerexagri. « Le soufre est loin d'être réservé à la viticulture biologique et il a toute sa place en conventionnel, note Catherine Gauthier, responsable marketing vigne chez BASF Agro. Il s'utilise dans énormément de programmes, notamment en début de saison. »

« Incontournable »

Même position chez Syngenta. « Nous l'avons toujours recommandé dans des programmes conventionnels, confie Jean- Baptiste Drouillard. Il est incontournable dans plusieurs régions. » Il conseille « un soufre fleur, à l'effet curatif puissant, à la floraison ou à la nouaison ». Et il constate que « l'application de soufre en fin de programme en cas de forte pression se développe chez les vignerons ».

Pour l'heure, le soufre n'est pas soumis à une restriction d'emploi mais certains observateurs n'excluent pas une évolution de la réglementation dans les années à venir. Des firmes développent des formulations moins dosées. « Nous travaillons à des ajustements de doses concernant plus particulièrement des spécialités pour poudrage », précise Régis Harat de Cerexagri. Les quantités de soufre nécessaire pour un traitement ne sont pas étrangères à la désaffection des vignerons pour ce produit. Rappelons que le soufre poudre est homologué à 25 kg/ha et que les soufres mouillables le sont à 10 kg/ha de matière active.

« Les molécules comme les IBS ou les strobilurines qui s'utilisent à de petites doses sont bien plus faciles à mettre en œuvre que le soufre qui, du coup, a été abandonné, remarque Gilbert Cazals. Aujourd'hui, on n'est plus habitué à mettre 8 kg/ha de soufre mouillable dans une cuve de pulvé. On redoute le risque de colmatage. Il faut un bon malaxage de la bouillie par un agitateur pour éviter de boucher les buses et ne pas s'arrêter en cours de traitement. Il y a aussi l'effet vapeur qui n'est pas commode. »

Le soufre poudre est encore plus difficile à appliquer : il faut une poudreuse et traiter en l'absence de vent. Reste que, malgré ces contraintes d'application, le soufre mérite d'être redécouvert…

Cet article fait partie du dossier Fongicides : Les inusables

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Utilisé en viticulture en France depuis 1853.

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