Des teneurs élevées en chlorures de sodium et de potassium dans le vin peuvent modifier son goût. Des chercheurs de l'Inra se sont intéressés à ce phénomène, fréquent dans les vins produits en bord de mer ou sur des terres irriguées avec de l'eau saumâtre, comme en Australie. « Là-bas, certains vins trop riches en chlorures perdent leur qualité ou sont même impropres à la vente », indique Alain Samson, chercheur à l'Inra de Montpellier (Hérault). Les chercheurs indiquent que les vins rouges australiens peuvent contenir en moyenne 74 mg/l de chlorures et les blancs 242 mg/l. Mais dans certains cas, les teneurs grimpent jusqu'à 1 800 mg/l de chlorures, la limite maximale autorisée en Europe et en Océanie étant de 607 mg/l.
Un seuil de détection autour de 200 mg/l
Dans un premier temps, les chercheurs ont voulu déterminer à partir de quelle quantité de chlorures le goût du vin changeait. Ils ont ajouté entre 50 et 250 mg/l d'un mélange de 50 % de chlorure de potassium (KCl) et de 50 % de chlorure de sodium (NaCl, le sel de cuisine) à un vin blanc de sauvignon et bourboulenc, puis de 50 à 350 mg/l de ce mélange salin à un vin rouge de merlot.
Ces deux vins, élaborés en 2009, avaient des teneurs initiales faibles en chlorures. Dix-huit experts ont alors dégusté les échantillons obtenus, en tests triangulaires. Les chercheurs ont ainsi pu montrer que le seuil de détection des chlorures se situe à 190 mg/l (+/- 10 mg/l) dans le vin blanc et à 288 mg/l (+/- 11 mg/l) dans le rouge. Ils ont ensuite réalisé des tests de « napping » (méthode d'analyse sensorielle) : ils ont fait déguster aux experts un vin blanc de viognier et un rouge de merlot auxquels ils ont ajouté une quantité croissante de chlorures, jusqu'au-dessus du seuil de détection.
À la dégustation, il apparaît que les sels ont tendance à diminuer la sensation d'acidité et à augmenter à la fois la sucrosité et l'amertume, dans le vin blanc comme le rouge. Dans les vins rouges, l'astringence et la perception de l'alcool sont aussi renforcées.