En 2010, Ubifrance a réalisé une étude sur le potentiel des vins bios français sur quatorze marchés clés. Voici ce qu'il faut en retenir pour les ventes françaises, complété de commentaires de professionnels aguerris.
Pays scandinaves : Les monopoles très intéressés
En Suède, Finlande et Norvège, l'accueil fait par les consommateurs au bio et au commerce équitable est très positif. Dans ces trois pays, la distribution des boissons alcoolisées est contrôlée par des monopoles d'État. Tous sont ouverts aux vins bios et lancent des appels d'offres pour en inclure dans leurs gammes. Cependant, ces marchés sont orientés sur des produits (Bag-in-box par exemple) et des niveaux de prix qui correspondent peu à l'offre française. C'est en Suède que la position des vins bios est la plus forte, avec 3,5 % des ventes. Les vins français sont peu représentés (5 % des ventes). Les vins argentins et italiens dominent l'offre. En Finlande, le consommateur est peu sensible au vin bio, sa part y est donc minime. Cependant, le monopole a lancé dès 2010 des appels d'offres spécifiques. Ceci devrait favoriser un développement de la consommation. En Norvège, ces vins ne représentent que 1 % de la consommation, mais leurs ventes sont en hausse.
Allemagne : Les Français à la peine
70 % des Allemands achètent des produits bios de façon régulière ou occasionnelle. Dans son étude, Ubifrance annonçait une croissance de 10 % en 2010. Des chiffres confirmés par Peter Riegel, leader allemand des vins bios : « Mes ventes augmentent de 10 à 12 % par an. Mais en cinq ans, les vins français n'ont cessé de perdre du terrain, passant de 30 à 18 % des volumes. Les prix des entrées de gamme sont trop élevés. En Espagne, on trouve de jolis vins bios à 60 €/hl et l'Italie en propose de très bons à 80-90 €/hl. Les vins français, qui se situent entre 120 et 140 €/hl en rouge et à 160 €/hl en blanc, ne sont pas compétitifs. Et les Français s'adaptent moins à la demande que les Espagnols et les Italiens. Les Allemandes consomment le vin en dehors du repas. Il leur faut des vins ronds et souples, issus de macération courte et légèrement édulcorés. Difficiles d'en obtenir des producteurs français. »
États-Unis : Marché naissant
La consommation de vins bios aux États-Unis ne représente encore que 0,5 à 1 % de la consommation totale de vin. Elle concerne surtout des vins locaux. Cependant, le consommateur apprécie le bio. « Les États-Unis peuvent représenter un gros potentiel pour les vins bios. La population est à l'écoute », confirme Gilles Louvet, premier opérateur français en vin bio, qui a ouvert une filiale à New York en 2010. « Jusqu'ici, je m'étais cassé le nez sur le marché américain, témoigne Marie Teisserenc, des vignobles Louis Fabre, dans l'Aude. Cet hiver, j'y suis rentrée sans difficulté. Le vin bio commence à être à la mode chez les Américains. »
Royaume-Uni : Mauvais temps
Le vin bio ne séduit pas les Britanniques. « La crise a eu un impact sur les ventes de bio en général car les consommateurs ont limité leurs dépenses. Ils manquent aussi de repères pour choisir », indique Ubifrance. Les enseignes leaders de la distribution, qui assurent plus des trois quarts des ventes de vins, ne semblent pas s'intéresser à ce segment. Début janvier, l'importateur Berry Bros annonçait que ses ventes de vins bios avaient plongé de 63 % en volume en 2011, celles des vins en biodynamie reculant de 54 %.
Thierry's, premier importateur de vins français au Royaume-Uni, confirme l'insuccès des vins bios sur le marché anglais. « Ce n'est pas une question de prix, car les vins labélisés commerce équitable, qui sont vendus 15 à 20 % plus chers, sont en plein essor. C'est un problème de communication, assure Matthew Dickinson, directeur commercial de la société. Les Britanniques ne comprennent pas qu'un vin ne soit pas bio. Il y a cinq ans, nous avions lancé une gamme de vins bios que nous ne sommes pas arrivés à vendre. » Bravant ces vents contraires, le distributeur Marks & Spencer revoit son rayon vin sous le prisme du développement durable avec des références en bio.
Asie : L'effet Fukushima
En Asie, la consommation des vins bios est encore timide. Jusqu'ici, le Japon n'était pas très demandeur, mais la catastrophe de Fukushima a changé la donne. « Depuis cet accident nucléaire, la demande en vin bio a explosé. Mais le différentiel de prix avec les vins conventionnels est un frein pour les importateurs », constate Marie Teisserenc. En Chine, le timide développement de la production de vins biologiques par des producteurs locaux pourrait faciliter la pénétration des vins bios importés. Mais pour le moment, le concept bio est mal connu des importateurs.