CHEZ YEALANDS, une fois toutes les parcelles clôturées et le troupeau agrandi, les moutons babydolls assureront la totalité du désherbage.
LA DURABILITÉ prend en compte les conditions de travail des salariés. Chez Villa Maria, ils portent tous un casque et un gilet fluorescent pour leur sécurité.
FABIAN YUKICH, le directeur de la winery Villa Maria d'Auckland, où la lumière naturelle fournit l'essentiel de l'éclairage.
LES SARMENTS DE VIGNES sont brûlés dans de petites chaudières sur le domaine de Yealands. Une économie de 22 tonnes de GPL par an.
PILOTÉES PAR ORDINATEUR, les températures des cuves et des salles sont affichées sur des écrans de contrôle.
Qu'on se le dise, la Nouvelle-Zélande produit du vin de manière durable. « Nous allons communiquer sur ce sujet dans les pays où c'est un critère d'achat », affirme David Cox, directeur du bureau londonien de NZ Wines, l'organisme qui regroupe tous les producteurs du pays pour promouvoir leurs vins. Cette déclaration intervient alors que la récolte 2012 est annoncée 100 % durable.
« Tous nos adhérents se sont engagés dans cette démarche », souligne Philip Mason, en charge du dossier chez NZ Wines. Il est vrai qu'ils y sont fortement incités, car c'est une condition requise pour participer aux concours et aux actions de promotion organisées par cet organisme.
Pour être déclarées durables, les wineries doivent satisfaire à un ensemble d'exigences quant aux produits de traitements utilisés, au nombre de traitements réalisés, à la gestion des déchets et à la consommation d'eau et d'énergie. Mais il s'agit plus de préconisations que d'obligations. Beaucoup de produits conventionnels restent autorisés, comme le Round Up, admis pour désherber sous les rangs. « Vu la diversité de nos climats, nous ne pouvions pas être trop directifs. De plus, pour que tout le monde adhère, il était préférable de commencer modestement », explique Philip Mason. Mais les règles se renforcent progressivement et NZ Wines tient à voir ses membres progresser au fil du temps.
Des étangs pour la faune, la flore et… pour l'irrigation
Yealands est un domaine de 990 ha d'un seul tenant créé dans la région de Marlborough à partir de 2002. L'exploitation n'emploie que du cuivre et du soufre contre l'oïdium et le mildiou, mais utilise des fongicides chimiques contre le botrytis. Elle fabrique son compost à partir d'algues, de déchets de conserveries de moules et de son marc de raisin. Quant à l'irrigation, comme partout, elle est réduite au minimum grâce à un suivi de l'humidité du sol. En cas de sécheresse, l'exploitation prélève de l'eau dans les étangs de ses zones humides. Peter Yealands, le propriétaire, en a créé 25 sur ses terres, « avant tout pour régénérer la faune et la flore locale », tient-il à préciser. Ainsi, il n'a pas à pomper dans la rivière.
À l'inverse des autres exploitations, Yealands ne pose aucun filet sur les vignes pour empêcher les oiseaux de manger les raisins. « Les pertes n'excèdent pas le coût de l'installation car nous avons 3 500 km de rangs », indique Peter Yealands. Le désherbage est en partie effectué par 300 moutons nains babydolls, trop petits pour atteindre les feuilles de vignes.
Te Mata, un domaine de 120 ha de la région Hawkes Bay, utilise les moutons en hiver, puis après la floraison. « Mais comme ils sont normaux, il faut les surveiller de près. Deux jours suffisent à 150 bêtes pour désherber un hectare. Après, elles attaquent les feuilles les plus basses », précise Larry Morgan, le responsable du vignoble. En même temps qu'ils désherbent, ces moutons fertilisent le sol.
Le reste du désherbage inter-rang est réalisé à la tondeuse avec un modèle qui rejette la coupe sous les rangs pour fertiliser et ralentir la pousse de l'herbe en l'étouffant. Des essais de désherbage mécanique sont en cours. Mais Te Mata emploie encore des herbicides.
Lutte bio contre une pyrale
Pour lutter contre une pyrale qui s'attaque aux feuilles (Epiphyas postvittana), Larry Morgan expérimente une fleur, l'alyssum, qui attire une guêpe parasitant le ravageur. « J'ai découvert cette technique lors d'une des réunions que NZ Wines organise une ou deux fois l'an sur la viticulture durable. »
Chez Villa Maria, qui possède quatre domaines dans différentes régions du pays, on a recours a du compost maison et à la lutte raisonnée. Le désherbage est mécanique ou réalisé par des moutons. L'entreprise a choisi des pulvérisateurs qui traitent deux rangs face par face et elle envisage de se doter de panneaux récupérateurs.
Datant de 2005, la winery d'Auckland est au top de la durabilité. « Pour notre nouveau bâtiment, nous avons employé des matériaux naturels et recyclé ceux de l'ancien édifice dans les fondations, déclare le manager, Fabian Yukich. Les échanges d'air entre l'extérieur et l'intérieur sont pilotés par des capteurs de température. Ainsi, dès qu'il fait plus froid dehors que dedans, l'air vient rafraîchir le chai. Climatisation et chauffage sont réduits. »
Rapport annuel
La chaleur produite par les installations de réfrigération est récupérée et l'éclairage est avant tout assuré par la lumière naturelle. Même chose chez Yeadlands, qui dispose en outre de panneaux solaires, d'éoliennes et d'une installation de chauffage brûlant des sarments. Côté emballage, l'utilisation de carton recyclé, de bouteilles allégées et de capsules à vis est la règle partout.
Par ailleurs, tout le monde privilégie les véhicules les moins émetteurs de CO2 pour les travaux des vignes, la manutention, l'expédition des vins et les déplacements des salariés. Selon ce principe, Villa Maria utilise avant tout des voitures hybrides, Yealands des tracteurs roulant au biodiesel et tous ont des chariots élévateurs électriques.
Chaque année, les wineries envoient leur rapport de viticulture durable à NZ Wines qui n'effectue des visites de contrôle que tous les trois ans, à moins de suspecter des anomalies. Pour Nicolas Buck, le directeur marketing de Te Mata, « ce rapport annuel est une tâche prenante. La certification en viticulture durable a engendré une hausse de 10 à 20 % de nos coûts. Mais cela a amélioré la qualité de nos vins et nous avons pu la répercuter sur nos prix ».
Simon Fell, œnologue chez Villa Maria, affirme : « Il y a peu de surcoût une fois que tout est mis en place. La durabilité est un atout, surtout en Scandinavie, mais les clients ne sont pas prêts à payer plus cher. » Peter Yealands abonde : « Les Pays-Bas sont devenus notre premier marché grâce à notre démarche durable. »