Retour

imprimer l'article Imprimer

DOSSIER - Maladies du bois : Ils réagissent

« La taille non mutilante, c'est le top »

La vigne - n°250 - février 2013 - page 17

Philippe Grenier pratique la taille guyot poussard depuis cinq ans. Il y passe plus de temps mais soutient que ses ceps meurent moins de l'esca. Les rendements sont aussi plus réguliers.
Philippe Grenier, du domaine des Amphores, à Chavanay (Loire). En médaillon, une vue de la taille guyot poussard, adoptée par le viticulteur pour lutter contre l'esca. © C. FAIMALI/GFA

Philippe Grenier, du domaine des Amphores, à Chavanay (Loire). En médaillon, une vue de la taille guyot poussard, adoptée par le viticulteur pour lutter contre l'esca. © C. FAIMALI/GFA

Philippe Grenier, du domaine des Amphores, à Chavanay (Loire), exploite 8 ha de syrah, viognier, roussanne, clairette et gamay en bio. Il pratique la taille guyot poussard, une taille non mutilante, depuis cinq ans. « Cela a révolutionné ma façon de travailler », assure-t-il. C'est en suivant une formation animée par François Dal, de la Sicavac, à Sancerre (Cher), qu'il a découvert la technique. « Cela faisait six à sept ans que certains de mes pieds de vigne mouraient. D'autres dépérissaient. Je ne savais pas quoi faire ! »

Taille plus facile

Au cours de la formation, François Dal a coupé des cornes sur quelques pieds. Les viticulteurs ont alors constaté que le bois était nécrosé à l'intérieur. En cause selon lui : les grosses plaies de taille. « Il m'a alors semblé évident qu'en les évitant, on favoriserait les flux de sève et que la vigne se porterait mieux. »

Suite à la formation, Philippe Grenier décide d'appliquer ce principe à toutes ses vignes. Il abandonne le sécateur électrique et ressort le sécateur classique des tiroirs. « Comme je ne taille plus au ras des yeux, le bois est moins gros au niveau de la coupe. C'est plus facile de tailler », explique-t-il. La taille non mutilante demande aussi davantage de concentration. « À chaque pied, il faut s'arrêter pour réfléchir à la façon dont on va s'y prendre. »

Le viticulteur rhodanien a développé ses propres règles. « Je taille loin des yeux, décrit-il. Je laisse des cônes de dessèchement deux fois plus longs que le diamètre du courson. Sur les pieds de syrah, je fais des essais de changement de côté, car le pied finit par être à plat si on le taille toujours du même côté. Enfin, je taille très tard, de préférence après l'Épiphanie.»

La vigne pousse mieux

Le jeu en vaut la chandelle. « J'ai observé des résultats rapides et prometteurs, quels que soient les terrains, les cépages et l'âge de la vigne, constate-t-il. Beaucoup moins de pieds meurent. La vigne pousse mieux. Elle est moins chétive et les bois sont très jolis. Enfin, les pieds ont tous la même vigueur, il n'y a plus de déséquilibre entre eux. Et les rendements sont plus réguliers. » Seul bémol : le temps passé à tailler est plus long. « Mon ouvrier et moi passons 60 à 65 heures sur un hectare, au lieu de 50 à 55 heures avant, calcule-t-il. Mais je compense en n'épandant plus de compost, car les vignes sont plus vigoureuses. De même, j'ai réduit l'ébourgeonnage. Avec la régulation des flux de sève, les pieds sont moins stressés et produisent moins de bourgeons. Seuls sortent les principaux. »

Premiers résultats prometteurs

La taille guyot poussard est une taille non mutilante. Il faut chercher à localiser les plaies de taille sur le dessus des bras afin que tout le bois en dessous soit vivant et que la sève circule sans entrave. Il faut aussi tailler loin des yeux pour éviter que le cône de dessèchement s'enfonce dans la souche.

On préserve ainsi la vascularisation des ceps, garante de leur longévité. En 2005, la Sicavac a mis en place la taille guyot poussard sur une parcelle nouvellement plantée. Elle n'y a, pour l'instant, relevé aucun symptôme de maladie du bois. Sur une autre parcelle plantée en 1999, elle compare depuis 2005 la taille guyot classique et la taille poussard. Les premiers symptômes d'esca y sont apparus en 2008. En cumulé depuis cette date, sur la partie taillée en poussard, 10 % des pieds ont été touchés par l'esca, contre 19 % sur la partie taillée classiquement. Des résultats à confirmer.

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :