Retour

imprimer l'article Imprimer

VIN

La stabilisation tartrique trouve son modèle économique

José Martinez-Teruel - La vigne - n°251 - mars 2013 - page 52

L'Inra a comparé la stabilisation tartrique par électrodialyse couplée à l'osmose inverse au passage au froid. La première formule est un peu plus écologique et bien plus économique.
LE TRAITEMENT AU FROID CONSOMME huit fois plus d'électricité que l'électrodialyse couplée à l'osmose inverse. Il entraîne aussi des pertes bien supérieures en vin. © C. WATIER

LE TRAITEMENT AU FROID CONSOMME huit fois plus d'électricité que l'électrodialyse couplée à l'osmose inverse. Il entraîne aussi des pertes bien supérieures en vin. © C. WATIER

Des chercheurs de l'Inra de Pech Rouge, à Gruissan (Aude), associés à la société Eurodia industrie SA, à Pertuis (Vaucluse), et à ŒnEau conseil, à Armissan (Aude), ont comparé l'impact environnemental de la stabilisation tartrique par le froid, par électrodialyse seule et par électrodialyse couplée à l'osmose inverse.

On sait que la stabilisation tartrique par le froid consomme beaucoup d'eau et d'énergie. Mais l'électrodialyse utilise, elle aussi, beaucoup d'eau. Cette technique permet d'extraire les sels tartriques des vins – principalement le bitartrate de potassium – jusqu'à ce qu'ils soient stables au froid. « Les ions tartrate, potassium et calcium traversent une alternance de membranes et sont entraînés par un flux d'eau », explique Jean-Louis Escudier, ingénieur de recherche à l'Inra de Pech Rouge.

L'électrodialyse rejette ainsi une eau chargée de sels de tartrate de potassium et de tartrate de calcium. Pour réduire la consommation d'eau par ce procédé, ses concepteurs ont eu l'idée de le coupler à l'osmose inverse. Ils concentrent ainsi l'effluent de l'électrodialyse et récupèrent de l'eau pure nécessaire au fonctionnement du dispositif.

Pour leur étude, l'Inra, Eurodia et ŒnEau ont retenu quatre vins : trois blancs et un rouge. Ils ont stabilisé un blanc par électrodialyse seule, un blanc par électrodialyse couplée avec l'osmose inverse, un blanc et un rouge par le froid.

Ils ont travaillé sur un site pilote disposant d'une capacité de traitement de 15 hl de vin par heure, mais sur une installation industrielle semi-automatique pouvant traiter 30 hl de vin par heure.

« Le vin blanc stabilisé par le froid était un vin de Champagne. Ces 825 hl sont restés à - 4°C pendant sept jours », détaille Jean-Louis Escudier.

Plus rapide que le passage au froid

Les chercheurs ont mesuré trois paramètres pour dresser le bilan environnemental de la stabilisation tartrique : la consommation d'eau (process et nettoyage), la consommation d'électricité et la charge polluante des déchets.

L'électrodialyse suivie d'une osmose inverse consomme huit fois moins d'électricité que la stabilisation par le froid (0,21 kWh/hl de vin). Mais elle consomme beaucoup plus d'eau : 5,5 l/hl de vin traité contre 1,54 et 1,88 l/hl (pour laver le filtre à terre et les cuves) de vin stabilisé au froid. « La consommation d'eau est certes plus élevée, mais le traitement est bien plus rapide que par le froid », nuance Jean-Louis Escudier.

L'électrodialyse produit également des effluents dont la charge polluante est supérieure au traitement par le froid : 99,2 g de demande chimique en oxygène (DCO) par hectolitre de vin traité, contre 38,5 et 63,7 g DCO/hl pour les deux vins passés au froid.

Cependant, « le rejet par électrodialyse est un liquide clair qui peut être mélangé aux effluents de cave, contrairement aux terres de filtration qui ne sont ni recyclables, ni biodégradables. Selon nos essais, on génère 264 kg de terre humide pour 1 000 hl de vin traité. L'élimination physique de ces terres pose problème. Et, à terme, ces rejets seront probablement taxés », anticipe Jean-Louis Escudier.

Autre défaut de la terre, elle induit des pertes de vin se chiffrant à 0,14 l/hl de vin, contrairement à l'électrodialyse couplée à l'osmose inverse, où la déperdition est nulle. À l'arrivée, cette technique innovante l'emporte donc sur la méthode traditionnelle, davantage du point de vue économique qu'écologique. Selon Yannick Le Gratiet, directeur d'Œnodia, division œnologique d'Eurodia, le coût total de la stabilisation tartrique par l'électrodialyse tourne autour de 0,80 €/hl de vin traité.

Les gommes de cellulose, un bon profil

De 2003 à 2006, le Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC) a comparé l'impact environnemental des gommes de cellulose à celui du passage au froid. Les gommes remportent la comparaison. « Elles permettent de diviser au minimum par trois les émissions de gaz à effet de serre et par trois la consommation d'eau par rapport au passage au froid, souligne Michel Valade, responsable du service œnologie au CIVC. Elles sont aussi simples d'utilisation, adaptées à toutes les structures vinicoles et peu onéreuses. Elles présentent néanmoins un inconvénient car, à ce jour, elles ne sont pas efficaces sur des vins dont la température de stabilisation est supérieure à 19°C. » Il a pris en compte les émissions de gaz à effet de serre et la consommation d'eau depuis la fabrication jusqu'à l'utilisation des gommes et ajoute que « le coût du traitement de la stabilisation tartrique par les gommes de cellulose sous forme liquide est compris entre 0,50 et 1 €/hl de vin ».

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :