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VIGNE - POUR APPROFONDIR

Les nématodes Vecteurs du court-noué

CHRISTELLE STEF - La vigne - n°257 - octobre 2013 - page 36

Deux espèces présentes dans quasiment tous les vignobles peuvent transmettre le court-noué. L'une d'elles, X. index, est capable de survivre et de garder son potentiel infectieux pendant au moins quatre ans sans se nourrir.
Xiphinema index. Les adultes mesurent entre 2,90 et 3,30 mm. Les mâles sont extrêmement rares. © INRA SOPHIA ANTIPOLIS

Xiphinema index. Les adultes mesurent entre 2,90 et 3,30 mm. Les mâles sont extrêmement rares. © INRA SOPHIA ANTIPOLIS

Xiphinema diversicaudatum. Cette espèce se distingue par sa grande taille. Les adultes mesurent 4 à 5, 50 mm de long. © VITINNOV

Xiphinema diversicaudatum. Cette espèce se distingue par sa grande taille. Les adultes mesurent 4 à 5, 50 mm de long. © VITINNOV

Les racines de vigne piquées des Xiphinema (ci-contre) développent des galles, sortes de boursouflures. À l'inverse, les racines indemnes sont lisses (ci-dessous). © GÉRARD DEMANGEAT-INRA COLMAR

Les racines de vigne piquées des Xiphinema (ci-contre) développent des galles, sortes de boursouflures. À l'inverse, les racines indemnes sont lisses (ci-dessous). © GÉRARD DEMANGEAT-INRA COLMAR

Les racines de vigne piquées des Xiphinema (ci-contre) développent des galles, sortes de boursouflures. À l'inverse, les racines indemnes sont lisses (ci-dessous). © GÉRARD DEMANGEAT-INRA COLMAR

Les racines de vigne piquées des Xiphinema (ci-contre) développent des galles, sortes de boursouflures. À l'inverse, les racines indemnes sont lisses (ci-dessous). © GÉRARD DEMANGEAT-INRA COLMAR

Particules virales de GFLV photographiées par microscopie électronique. Ce pathogène appartient à la famille des népovirus et mesure 30 nanomètres (milliardièmes de mètre). © PASCALE SCHELLENBERGER-INRA COLMAR

Particules virales de GFLV photographiées par microscopie électronique. Ce pathogène appartient à la famille des népovirus et mesure 30 nanomètres (milliardièmes de mètre). © PASCALE SCHELLENBERGER-INRA COLMAR

Symptômes du court-noué. Les feuilles jaunissent (en haut) et les entrenoeuds raccourcissent, les rameaux se divisent en « balais de sorcière » et la végétation languit au printemps (en bas). © GÉRARD DEMANGEAT-INRA COLMAR © IFV SUD-OUEST

Symptômes du court-noué. Les feuilles jaunissent (en haut) et les entrenoeuds raccourcissent, les rameaux se divisent en « balais de sorcière » et la végétation languit au printemps (en bas). © GÉRARD DEMANGEAT-INRA COLMAR © IFV SUD-OUEST

Symptômes du court-noué. Les feuilles jaunissent (en haut) et les entrenoeuds raccourcissent, les rameaux se divisent en « balais de sorcière » et la végétation languit au printemps (en bas). © IFV SUD-OUEST

Symptômes du court-noué. Les feuilles jaunissent (en haut) et les entrenoeuds raccourcissent, les rameaux se divisent en « balais de sorcière » et la végétation languit au printemps (en bas). © IFV SUD-OUEST

Diagnostic nématode. Proposé par Vitinnov, il consiste à réaliser des fosses pédologiques dans les parcelles, à y prélever des échantillons de terre, puis à dénombrer et identifier les nématodes. © VITINNOV

Diagnostic nématode. Proposé par Vitinnov, il consiste à réaliser des fosses pédologiques dans les parcelles, à y prélever des échantillons de terre, puis à dénombrer et identifier les nématodes. © VITINNOV

Quels sont les nématodes capables de transmettre le court-noué ?

Xiphinema index, vecteur du GFLV (Grapevine fanleaf virus), et Xiphinema diversicaudatum, vecteur de l'ArMV (Arabis mosaic virus ou virus de la mosaïque de l'arabette), plus rare mais également responsable du court-noué. Ces nématodes sont de petits vers microscopiques à l'aspect filiforme. Leur taille est plus élevée que les autres nématodes phytophages : la femelle adulte de X. index mesure 3 mm et celle de X. diversicaudatum 5 mm.

Comment le transmettent-ils ?

Ces nématodes se nourrissent des racines de la vigne. S'ils piquent un pied infecté par le court-noué, ils acquièrent le virus. Ils peuvent alors le transmettre à un cep sain. L'Inra de Colmar (Haut-Rhin) a identifié récemment un motif en forme de cavité à la surface des particules virales. C'est lui qui permet la fixation du virus sur le nématode.

Provoquent-ils des dégâts directs à la vigne ?

Sur les racines piquées par les nématodes apparaissent des protubérances (galles). Mais en l'absence de virus, ces dégâts ne sont pas dommageables. Ils n'affectent que faiblement la croissance de la vigne.

D'où viennent-ils ?

« On pense que X. index est originaire du Moyen-Orient et qu'il a été introduit puis dispersé sur l'ensemble du Bassin méditerranéen par les Phéniciens, les Grecs, les Romains et plus récemment par les Croisés. Mais on ne connaît pas trop l'origine de X. diversicaudatum », rapporte Daniel Esmenjaud, de l'Inra de Sophia-Antipolis (Alpes-Maritimes).

Sont-ils présents dans tous les vignobles ?

Oui, on peut trouver X. indexOui, on peut trouver dans tous les vignobles français. X. diversicaudatum se retrouve plus rarement dans les vignobles méditerranéens. « C'est une espèce plus adaptée aux zones froides et humides », précise Daniel Esmenjaud.

Sont-ils inféodés à la vigne ?

Oui, en ce qui concerne X. index. La vigne est sa principale plante hôte mais ce nématode peut aussi se développer sur le figuier, le jasmin et le peuplier. En revanche, X. diversicaudatum a une gamme d'hôtes beaucoup plus large. Outre la vigne, il peut aussi parasiter de nombreuses autres espèces pérennes comme les arbres fruitiers à noyaux, les arbustes, les arbres à petits fruits (comme les framboisiers) et des plantes annuelles.

Préfèrent-ils certains sols ?

X. index se rencontre dans tous les types de sol mais il a une petite préférence pour les sols lourds, riches en argile et en limons, même s'ils sont humides. Il survit dans les horizons profonds. À l'inverse, X. diversicaudatum préfère les sols plus légers et sableux.

À quelle profondeur les trouve-t-on ?

Des études menées dans différents vignobles montrent que X. index est très peu présent dans les horizons superficiels. « Les sols sont travaillés en surface et soumis à d'importantes variations de températures, ce qui est néfaste pour les nématodes », observe Gérard Demangeat, de l'Inra de Colmar. Les effectifs sont plus élevés à partir de 30 cm de profondeur et atteignent un maximum vers 50 à 60 cm. Mais si des racines plongent plus profondément, on trouve le nématode au même niveau, c'est-à-dire jusqu'à 1,50 m de profondeurs, voire même au-delà.

Quel est leur cycle de développement ?

Les deux espèces de Xiphinema pondent leurs œufs dans le sol. Les jeunes larves se développent à proximité des racines. Elles passent par quatre stades larvaires avant de se transformer en adulte. « À chaque mue, le virus est perdu, mais comme le nématode vit près des racines, il se recontamine très vite », affirme Gérard Demangeat. Chez X. index, la reproduction est asexuée et l'on trouve principalement des femelles. La reproduction de X. diversicaudatum est sexuée et l'on compte autant de mâles que de femelles.

X. index effectue son cycle complet en deux à trois mois lorsque les conditions sont optimales, c'est-à-dire en pot à 25°C. Mais si les conditions sont limitantes, il va effectuer son cycle en sept à neuf mois, voire en plusieurs années selon l'ouvrage « Les ravageurs de la vigne », paru aux éditions Féret.

Combien de temps peuvent-ils survivre sans s'alimenter ?

Des travaux de Gérard Demangeat et Daniel Esmenjaud ont montré que X. index peut survivre au moins quatre ans sans s'alimenter, car il se met dans un état de dormance et attend que les conditions redeviennent favorables pour finir son cycle. Durant cette période, il conserve le virus du court-noué dans son organisme. Il garde donc son potentiel infectieux.

Comment savoir si une vigne est infestée ?

« Détecter les nématodes est difficile parce qu'ils sont minuscules et que leur densité est faible au sein d'une parcelle », indique Daniel Esmenjaud. Pour les mettre en évidence, il faut avant tout repérer les symptômes de court-noué, puis prélever un échantillon de terre au niveau des ceps atteints.

Dans le Bordelais, la cellule de transfert Vitinnov propose depuis 2009 le diagnostic nématodes. « Nous creusons des fosses pédologiques (dix par hectare) dans lesquelles nous prélevons des échantillons de terre, explique Coralie Laveau, la directrice de Vitinnov. Dans chaque échantillon recueilli, nous extrayons les nématodes, les comptons et les identifions. Selon les résultats, nous estimons le temps de repos du sol pour éviter la contamination de la nouvelle vigne par le court-noué. » Le coût est de 150 euros HT par fosse.

Combien de temps mettent-ils pour coloniser l'ensemble d'une parcelle ?

Les nématodes se déplacent très peu. « Des mathématiciens ont modélisé leurs mouvements et évalué qu'ils ne se déplacent que de 20 cm par an. Mais leur vitesse de propagation au vignoble n'a jamais été mesurée », admet Gérard Demangeat. De leur côté, les racines de vigne s'étendent, venant au contact des nématodes qu'elles attirent en émettant des molécules.

Au final, « il faut plusieurs générations de nématodes pour qu'une parcelle soit totalement colonisée », rapporte Daniel Esmenjaud. En revanche, les nématodes peuvent être dispersés rapidement par les labours profonds ou par l'érosion dans les parcelles en pente. Ils peuvent également être apportés dans une vigne via des apports exogènes de terre.

Comment peut-on lutter contre eux ?

Actuellement, le moyen de lutte le plus sûr consiste à dévitaliser les ceps de vigne avant de les arracher, puis laisser le sol au repos avant de replanter. Des recherches sont effectuées avec des plantes nématicides pour voir si leur implantation permet de réduire le temps de repos du sol.

En 2011, le Nemadex Alain Bouquet a été inscrit au catalogue officiel des variétés de vigne. Ce porte-greffe retarde la contamination par le court-noué, car ses racines sont moins appétentes pour les nématodes. Les premiers plants greffés avec ce porte-greffe seront disponibles en 2014. Toutefois, étant donné ses exigences agronomiques, il devrait rester un porte-greffe de niche (voir « La Vigne » n° 254 de juin 2013, p. 37).

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