L'Opti-Grape, monté sur la série 9000 de New Holland, coûte 35 000 euros, contre 20 000 pour l'égreneur de la marque. PHOTOS M. CAILLON
Les goulottes des extracteurs hauts envoient les déchets vers l'arrière. Les bennes, plus avancées et profondes, améliorent le centre de gravité de la machine.
Il est huit heures du matin ce 13 septembre. Nous sommes au domaine de l'Herbe sainte, à Mirepeisset (Aude). Dirigée par Charles Greuzard, l'exploitation accueille « La Vigne » pour une démonstration de l'une des premières machines à vendanger New Holland équipée du nouveau système de tri de la vendange Opti-Grape.
Cette machine, une 9060 L, présente un profil inédit. Les goulottes, qui évacuaient jusqu'à présent les déchets vers le sol sur les côtés de la machine, sont désormais situées en hauteur et orientées vers l'arrière pour soulever moins de poussière. Les bennes profitent de l'espace libéré à l'avant. Elles adoptent une forme plus courbe et deviennent plus longues et profondes.
Plus étonnant, une turbine enveloppée dans un caisson noir se trouve à l'avant de ces bennes. « Cette turbine envoie un flux d'air pulsé qui passe dans une grille microperforée pour éliminer tous les déchets autres que les baies rondes », détaille Alexandre Colmart, responsable produit machines à vendanger chez New Holland.
On le voit, l'Opti-Grape n'est pas une troisième version de l'égreneur New Holland. Cette innovation a d'ailleurs reçu une médaille d'or au palmarès de l'innovation du Sitevi. Pour la mettre au point, le constructeur a revu l'ensemble du dispositif de nettoyage de la vendange, provoquant d'importants changements dans l'architecture de ses machines.
Réglage de la turbine. Passée cette première inspection, Charles Greuzard nous conduit à la vigne avec l'équipe de New Holland. La machine arrive dans une parcelle de chardonnay plantée à 2 m de largeur, irriguée et conduite en taille rase de précision depuis quatre ans. La parcelle porte environ 9 000 kg de raisins par hectare selon les estimations du viticulteur.
Avant de démarrer, le chauffeur descend de la machine. Il accroche un plateau en inox en forme de jardinière sur le côté de la benne, sous la sortie des déchets. Ce récipient va collecter une partie des impuretés expulsées par l'Opti-Grape. En début de chantier, il permet au chauffeur d'apprécier la qualité du tri et, au besoin, d'accélérer ou de ralentir la turbine pour trier plus ou moins.
Une fois remonté en cabine, le chauffeur lance les appareils, règle la turbine à 2 800 t/min, sa vitesse normale, puis démarre. Nous sommes à ses côtés. La machine roule à 4 km/h. Nous découvrons le fonctionnement de l'Opti-Grape. Les raisins venant des convoyeurs tombent sur un prétrieur constitué de deux séries de rouleaux. Les premiers, striés et pleins, étalent la vendange et l'envoient vers les seconds. Ceux-là sont ajourés. Ils séparent les baies libres, qui tombent au niveau inférieur, des grappes entières, qui filent vers l'égreneur. En mettant la vendange en mouvement, les rouleaux optimisent, au passage, l'aspiration des déchets par les extracteurs.
L'égreneur de l'Opti-Grape fonctionne comme son aîné. Les grappes passent sur un tapis de mailles entre les doigts de trois hérissons successifs qui séparent les baies des rafles. Les baies passent entre les mailles et les rafles sont évacuées à l'arrière de l'égreneur. Petite différence tout de même : il mesure 10 cm de large en moins, « mais il reçoit deux fois moins de vendange en moyenne que l'égreneur classique », précise Alexandre Colmart.
De nombreux déchets éliminés.
Les baies libres, les grains abîmés et les petits déchets issus de l'égreneur rejoignent, à l'étage inférieur, ceux qui y sont déjà passés au travers des rouleaux du prétri. Avant de chuter dans la benne, le tout passe devant la grille microperforée d'où sort un puissant flux d'air. À ce niveau, une quantité impressionnante de déchets est expulsée : des petites baies, des baies écrasées, des bouts de rafles, de feuilles ou d'écorces de piquets et surtout des pétioles. À n'en plus finir.
Car ce 13 septembre, l'Opti-Grape a fort à faire. Charles Greuzard a arrêté l'irrigation à la même date que d'habitude, un peu avant la fin août. L'année étant tardive, c'était un peu trop tôt pour la vigne. Résultat : elle a souffert de stress hydrique avant d'arriver à maturité. Déjà, en cette mi-septembre, des feuilles jaunissent et sèchent à la base des sarments. Elles ne tiennent plus qu'à un fil. La machine les décroche sans difficulté, faisant monter d'énormes quantités de pétioles avec la vendange.
Malgré l'efficacité de l'Opti-Grape, certains finissent dans la benne. « Dans les blancs, ce n'est pas grave, observe Charles Greuzard, alors que le chauffeur vidange la benne pour la première fois. L'Opti-Grape élimine en tout cas beaucoup plus de déchets que l'égreneur classique de New Holland. » En redémarrant, le chauffeur monte toutefois la turbine de 300 tours, à 3 100 t/min, pour en éliminer davantage.
Un appareil convaincant. La vendange continue. Sur l'écran du terminal, le chauffeur surveille la progression de la récolte sur le prétrieur, filmée par une caméra. Il reste également attentif au niveau de remplissage des bennes. Ces dernières sont dotées en haut d'un répartiteur à barrettes qui envoie les raisins d'abord vers l'avant, puis vers l'arrière. « Le sens de rotation s'inverse automatiquement lorsqu'elles sont remplies à 70 %, explique le chauffeur. Et un bip me prévient lorsqu'elles sont pleines. »
Après un hectare de vendange, l'Opti-Grape nous semble un appareil très convaincant, même s'il n'a pas enlevé 100 % des déchets. D'ailleurs, les tests réalisés par l'IFV confirment son efficacité (voir encadré). Cette innovation nettoie efficacement la vendange et réduit au minimum le temps de contact entre les raisins et les déchets. Cependant, compte tenu de son coût, 35 000 euros HT, soit 15 000 de plus que l'égreneur classique, elle s'adresse avant tout aux caves particulières et aux vins à haut potentiel qualitatif.
Des tests probants
En 2012, l'IFV a comparé le travail de l'Opti-Grape à celui de l'égreneur New Holland sur quatre cépages rouges : syrah, cabernet sauvignon, cabernet franc et merlot. Les résultats sont sans appel. En moyenne et tous cépages confondus, l'Opti-Grape permet de réduire le volume de déchets par un peu plus de trois.
Il profite mieux à la syrah qu'au carbernet franc. Sur la syrah, le volume de déchets est divisé par 4,4 et sur le cabernet franc par 2,4. Le pourcentage de déchets résiduels est infime. Il varie de 0,38 % de la vendange sur cabernet franc à 0,1 % sur syrah. La vendange issue de l'Opti-Grape contient aussi un tiers de jus en moins en moyenne, sauf celle de cabernet sauvignon où l'IFV a mesuré 15 % de jus en plus. L'analyse en détail des déchets révèle qu'on trouve 66 % de pétioles, 73 % de rafles, 80 % de sarments et 86 % de feuilles en moins que dans une vendange issue de l'égreneur classique.