Beaujolais : Le gamaret bien valorisé
Le gamaret est un cépage noir obtenu en Suisse en 1970. Il est issu d'un croisement entre le gamay et un cépage blanc allemand : le reichensteiner. La Sicarex Beaujolais l'étudie depuis longtemps, ce qui a contribué à son introduction au catalogue français en 2008.
« C'est un cépage qui se comporte bien sous le climat du Beaujolais, révèle Valérie Lempereur, de l'IFV pôle Bourgogne Beaujolais Savoie. Sa maturité est comparable à celle du gamay. Mais comme il est plus résistant à la pourriture grise, on peut le récolter plus tard. Ses baies sont riches en polyphénols, ce qui permet d'obtenir des vins structurés et colorés sans recourir à des méthodes d'extractions poussées comme le chauffage de la vendange, le pigeage ou le délestage. »
Pour l'instant, ce cépage ne peut être commercialisé qu'en vin de France, mais les professionnels ont fait une demande pour l'introduire dans le cahier des charges des beaujolais et beaujolais villages à hauteur de 10 %. Vincent Audras, du domaine Clos de Haute-Combe, à Juliénas (Rhône), en a planté 1 500 mètres en 2008 pour se diversifier. « Je devais remplacer une parcelle de gamay en beaujolais village et j'ai saisi l'occasion, dit-il. J'ai opté pour le gamaret car il résiste bien au botrytis. Cela me permet d'étaler les vendanges étant donné que je le ramasse quinze jours plus tard. Son port n'est pas dressé et ses bois ont tendance à retomber. Il faut donc le palisser soigneusement. C'est l'inconvénient. »
Vincent Audras s'en tient à des rendements de l'ordre de 40 à 50 hl/ha et obtient des degrés très satisfaisants. « J'atteins 13 degrés sans problème. Les intensités colorantes sont très intéressantes. Ce cépage supporte bien un petit passage en barrique. Avec, j'élabore un vin de couleur rubis sombre, bien structuré avec des tanins souples et des notes poivrées. » L'an passé, il en a produit environ 700 bouteilles qu'il vend sous la marque Verigoude au prix de 10 euros, contre 6,50 euros pour le beaujolais village.
D'autres viticulteurs l'ont adopté. « Ils le positionnent plutôt sur un segment haut de gamme et le valorisent bien », constate Valérie Lempereur. Selon une étude réalisée auprès de douze exploitations par l'IFV et la chambre d'agriculture du Rhône, le prix moyen départ cave du gamaret atteint 6,80 euros le col quand les beaujolais sont à 5,76 euros. Et surtout, le gamaret est bien plus productif que le gamay : il atteint 86 hl/ha contre 49 hl/ha pour son géniteur. Il offre donc des recettes plus de deux fois supérieures au gamay. Mais il est vrai que ces résultats sont obtenus alors que le gamaret est un produit de niche, contrairement au beaujolais.
Côtes du Rhône : Des alternatives au grenache
Dans les côtes du Rhône, l'encépagement est nettement dominé par le grenache. Or ce cépage est très sensible à la coulure, comme on l'a encore vu cette année. Et il peut manquer de couleur dans certaines situations.
Pour pallier ces faiblesses tout en restant dans la typicité des côtes-du-rhône, le syndicat étudie trois de ses descendants : le marselan (grenache noir croisé avec du cabernet sauvignon), le caladoc (grenache noir et cot) et le couston (grenache noir et aubun). En 2006 et 2007, il a ainsi surgreffé ces cépages sur trois parcelles et les a comparés avec le grenache, le carignan et le cinsault.
Les résultats sont prometteurs. « Pour l'instant, nous n'avons pas noté de coulure excessive sur ces trois cépages, rapporte Camille Avallone, du syndicat. Ils donnent des grappes plutôt aérées et ils sont moins sujets à la pourriture grise que le cinsault et le carignan. Le couston semble bien s'adapter à la sécheresse. » Ce dernier est le cépage le plus précoce. Il arrive à maturité environ deux semaines avant le grenache. Le caladoc a quant à lui un comportement intermédiaire alors que le marselan est plus tardif. Sur le plan œnologique, les trois cépages ont un potentiel tannique et des intensités colorantes plus élevées que le grenache. Ils sont très appréciés lors des dégustations. Le marselan est aujourd'hui inscrit comme cépage accessoire dans le cahier des charges de l'AOC Côtes du Rhône jusqu'à 10 % de l'encépagement. « Nous espérons pouvoir également y intégrer le couston et le caladoc », indique Camille Avallone.
Le marselan a séduit Bernard Burle, du domaine Font Sarade, à Vacqueyras (Vaucluse), qui travaille sur 35 hectares. Il en a planté près d'un hectare en 2009 sur une terre assez riche. « C'est un cépage très intéressant ; très résistant à la coulure et à la pourriture, se félicite le viticulteur. Cette année, j'estime le niveau de récolte entre 70 et 80 hl/ha alors que, dans les vieilles vignes de grenache, je n'ai pas ramassé plus de 15 à 20 hl/ ha. Le marselan permet d'élaborer des vins très structurés, très colorés et très fruités. » Il a réalisé sa première cuvée en 2012. Celle-ci est vendue en vin de pays et se compose à 60 % de marselan et à 40 % de caladoc. Il la commercialise en bouteille vendue 2,60 euros et en bibs de cinq et dix litres au prix de 2 euros le litre. « Cela me permet d'élargir ma gamme. Les clients sont satisfaits car ce vin répond à leurs attentes. » Bernard Burle envisage donc d'en planter à nouveau d'ici deux à trois ans pour l'intégrer dans son côtes-du-rhône.
Languedoc-Roussillon : Le sangiovese a la cote
Le pépiniériste VCR France note un accroissement de la demande pour le cépage rouge italien sangiovese, appelé nielluccio en France, où il est cultivé en Corse. « Il s'en plante actuellement environ 200 000 plants par an dans le Languedoc-Roussillon », selon Loïc Breton, directeur de VCR France.
Dans la région, il est agréé dans le cahier des charges de l'IGP d'Oc et fait partie des cépages recommandés dans le cadre de la restructuration du vignoble. « Sur sols fertiles, il peut produire plus de 20 t/ha. Sur des terrains plus pauvres, les rendements sont de l'ordre de 10 à 12 t/ha. Sa maturité est relativement tardive. Il doit être implanté sur un terroir ensoleillé. C'est un cépage assez élégant qui procure des vins très fruités mais l'acidité peut être prononcée », explique Loïc Breton.
Nathalie Goma-Fortin, responsable expérimentation à la chambre d'agriculture de l'Hérault, souligne qu'il faut bien choisir son clone, car ils sont très divers. « Certains procurent des vins très fruités, d'autres des vins plus structurés… » Par ailleurs, en vinification rosé, ce cépage est très sensible à l'oxydation. « On peut très rapidement passer d'une couleur rose bonbon à orangé », prévient-elle. Ce cépage intéresse spécialement les viticulteurs en cave particulière qui y trouvent un moyen de diversifier leur gamme.
Serge Martin-Pierrat, du château des Hospitaliers, à Saint-Christol, dans l'Hérault, le cultive depuis plusieurs années sur un demi-hectare. « Il est tardif, mais il a un débourrement précoce, observe-t-il. Son cycle est donc relativement long. Il est assez simple à conduire. Je l'ai planté sur un sol profond mais qui contient des galets roulés. Et j'ai installé un enherbement permanent. J'obtiens des rendements de 45 à 50 hl/ha. Dans nos conditions, il est très régulier et, bien qu'il soit tardif, nous n'avons jamais eu de souci de pourriture grise, contrairement au mourvèdre ou au carignan. C'est le dernier cépage que l'on vendange. »
Avec le sangiovese, Serge Martin-Pierrat obtient des vins aux notes de fruits rouges et aux tannins arrondis et soyeux. Il élabore une cuvée composée pour moitié de sangiovese et pour l'autre moitié de syrah qu'il vend en vin de France au prix de 6 euros TTC. « Il est très apprécié des consommateurs », assure-t-il.
Dix variétés étrangères au catalogue
Grâce aux essais de l'IFV et de ses partenaires, dix nouveaux cépages ont récemment été inscrits au catalogue national officiel. Il s'agit de variétés étrangères principalement issues de l'Arc méditerranéen. Elles permettront aux viticulteurs de s'adapter au changement climatique et d'élaborer de nouveaux vins. Ces nouvelles variétés sont l'alvarinho B, l'arvine B, le parellada B, le verdelho B, le touriga national N, le nebbiolo N, le pinotage N, le tinta barroca N, le calabrese N et le saperavi N.
Le négoce de Cognac teste le monbadon
Le cépage monbadon pourrait bien représenter une alternative intéressante à l'ugni blanc, aujourd'hui seul cépage cultivé pour la production de cognac.
Le Conservatoire du vignoble charentais a en effet montré qu'il donnait de gros rendements, jusqu'à 30 % de plus que l'ugni blanc, et de petits degrés d'alcool, ce qui est intéressant pour des vins de distillation. Le conservatoire et l'interprofession du cognac (BNIC) viennent de passer une convention pour mettre en route des expérimentations grandeur nature avec les plus grandes maisons de négoce et la Fondation Fougerat, une propriété appartenant à la ville d'Angoulême (Charente) ayant pour vocation de faire des essais viticoles. Dès l'an prochain, les maisons Hennessy, Rémy Martin et Courvoisier consacreront chacune 1,6 ha au monbadon. Les négociants sont intéressés par les rendements élevés de ce cépage qui seraient bienvenus pour répondre aux besoins actuels du marché. Quant à Martell, la société va implanter la même surface avec du pleau, un cépage autrefois cultivé pour le cognac, et avec différents croisements obtenus au début du XXe siècle par le sélectionneur Jean-Louis Vidal. Plantées l'an prochain, ces différentes variétés donneront leurs premiers raisins en 2017 et leurs premières eaux-de-vie en 2018. Il faudra encore attendre 2022 pour évaluer leur qualité.