Retour

imprimer l'article Imprimer

VIGNE

Écoconduite 10 à 20 % d'économies de carburant

FRÉDÉRIQUE EHRHARD - La vigne - n°262 - mars 2014 - page 40

Après avoir passé leur tracteur au banc d'essai, dix vignerons ont découvert l'écoconduite lors d'une formation organisée par le Pôle régional agroéquipement du Languedoc-Roussillon.
UNE ÉPROUVETTE de vingt litres de fuel est installée pour permettre de constater la consommation. PHOTOS F. EHRHARD

UNE ÉPROUVETTE de vingt litres de fuel est installée pour permettre de constater la consommation. PHOTOS F. EHRHARD

Les formateurs analysent avec les participants les résultats du passage au banc de leurs tracteurs réalisé la veille et leur apprennent à lire les courbes moteur établies avec ces données.

Les formateurs analysent avec les participants les résultats du passage au banc de leurs tracteurs réalisé la veille et leur apprennent à lire les courbes moteur établies avec ces données.

Dans la cour de la coopérative Anne de Joyeuse, à Limoux, dans l'Aude, ce 22 janvier, une dizaine de vignerons se pressent autour d'un tracteur équipé d'une éprouvette géante. Il ne s'agit pas d'un tournage pour l'émission de télévision « C'est pas sorcier ! », mais bien d'une journée de formation à l'écoconduite, organisée par la coopérative et le Pôle régional agroéquipement du Languedoc-Roussillon.

Les deux intervenants, Jean-Claude Chanfreau et Antoine Lalloué, tous deux formateurs au Centre de formation professionnelle et de promotion agricole (CFPPA) de Castelnaudary, finissent d'installer une éprouvette contenant vingt litres de fuel sur le tracteur d'un des participants, un New Holland TN75N de 2001 pourvu d'une boîte Power Shift avec 32 vitesses. L'éprouvette va prendre le relais du réservoir pour alimenter le moteur du tracteur. Les vignerons pourront ainsi visualiser eux-mêmes la consommation.

L'objectif est de comparer deux modes de conduite à 20 km/h sur un kilomètre avec une remorque chargée. Le propriétaire du tracteur réalise un premier parcours avec les pneus légèrement dégonflés et au régime moteur nominal de 2 300 tr/mn. Puis il passe une seconde fois avec les pneus bien gonflés et à 1 500 tr/mn. Entre les deux, une vitesse de différence. Résultat : 30 % d'économie de carburant à 1 500 tr/mn.

Lire les courbes moteur. Au quotidien, les économies réalisables se situent plutôt entre 10 et 20 %. Pour les évaluer, les vignerons ont fait passer leur tracteur au banc d'essai de la FRCuma la veille. En ce début d'après-midi, ils décortiquent les résultats avec les deux intervenants. Ces spécialistes leur apprennent à lire les courbes moteur établies à partir des données mesurées lors du passage au banc.

« La première chose à regarder est le couple, qui représente la vraie force de travail du tracteur », explique Jean-Claude Chanfreau. En mesurant la différence entre le couple maximum et celui à la puissance nominale, il est possible d'évaluer la réserve de couple. « C'est un indicateur de la souplesse du moteur, de sa capacité à faire face à un effort supplémentaire sans trop baisser en régime », détaille-t-il.

Le formateur conseille alors aux stagiaires de repérer la puissance au régime nominal et de regarder jusqu'à quel régime ils peuvent descendre pour obtenir à peu près cette même puissance. En roulant à ce second régime, ils feront à nouveau des économies.

L'un des tracteurs passés au banc développe 76,5 ch à 2 500 tr/mn, son régime nominal (voir infographie). Or, il s'avère presque aussi puissant à 2 100 tr/mn, avec 74,4 ch. Mieux vaut donc travailler à ce régime, où la consommation tombe à 17 l/h contre 19,3 l/h à 2 500 tr/mn, d'après les données du banc d'essai. Le chauffeur économise alors 2,3 litres par heure, soit 12 % de carburant. Et le moteur fait moins de bruit. « Pour changer de conduite, vous devez adapter vos repères sonores », relève le formateur. Cette conduite à 2 100 tr/mn convient à tous les travaux qui ne nécessitent pas d'employer la prise de force : désherbage, travail du sol ou déplacement sur route.

Pour les travaux à la prise de force, ce tracteur dispose d'une touche 540 « éco ». En l'actionnant, le chauffeur réduit le régime du moteur autour de 1 500 tr/mn tout en restant à 540 tr/mn à la prise de force. La consommation diminue encore de 4,6 l/h par rapport à 2 100 tr/mn, mais la puissance chute de 15 ch. « Avec un pulvérisateur pneumatique, cela peut ne pas suffire », souligne l'intervenant.

L'adhérence au sol influe aussi sur la consommation. « Il faut éviter de patiner. Avec des pneus suffisamment gonflés et un relevage bien réglé, vous économisez du carburant », note Jean-Claude Chanfreau. L'organisation du chantier et la réalisation de plusieurs interventions en un seul passage contribuent aussi à la diminution de la consommation.

Démarche de développement durable. Le nombre de rapports disponibles sur la boîte de vitesses conditionne les possibilités d'adaptation de la conduite. Mieux vaut avoir une boîte avec 24 rapports que 12. « C'est un élément à prendre en compte au moment de l'achat de votre tracteur », rappelle Jean-Claude Chanfreau.

Toutes ces informations font réfléchir les participants. « Économiser 15 % sur les 9 000 litres de fuel que je consomme chaque année représenterait 1 150 euros de dépenses en moins. Cela vaut la peine d'essayer de changer de conduite. Je vais voir jusqu'où je peux baisser le régime moteur », indique l'un d'eux.

« Quand je changerai de tracteur, je me poserai davantage de questions avant de faire mon choix », relève un autre participant, qui a bien noté que la touche « éco » sur la prise de force ouvre des possibilités.

Pour la coopérative Anne de Joyeuse, cette formation s'intègre dans sa démarche de développement durable certifiée Agriconfiance. « Nos adhérents ont encore des marges de progrès. Moins de fuel consommé, c'est moins d'empreinte carbone », souligne Anne-Marie Andrieu, la conseillère de la chambre d'agriculture qui accompagne cette cave.

Les données mesurées sur le banc

Le régime : vitesse de rotation du moteur, exprimée en tours par minute.

Le couple : force développée par le moteur en rotation. Elle sert à déplacer le tracteur et le matériel attelé ou encore à mettre en mouvement un outil relié à la prise de force. Elle se mesure en newton par mètre.

La puissance : quantité d'énergie fournie par le moteur dans une unité de temps. Elle se calcule à partir du couple et du régime et s'exprime en kilowatt par heure (1 kW correspond à 1,36 ch).

La consommation horaire : quantité de carburant utilisée mesurée en litres par heure.

La consommation spécifique : elle est ramenée à la puissance fournie par le moteur, ce qui permet d'estimer son rendement. Plus cette consommation est faible, moins le moteur a besoin d'énergie pour réaliser un travail. Elle s'exprime en grammes de carburant par kilowattheure.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :