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VIGNE

Le gazole sous contrôle

CÉDRIC MICHELIN - La vigne - n°264 - mai 2014 - page 48

L'an dernier, les Cuma et les chambres d'agriculture de Bourgogne ont analysé la consommation de carburant d'un panel d'exploitations. Pulvérisation et travail intégral du sol s'avèrent très gourmands.
LA PULVÉRISATION REPRÉSENTE 30 % de la consommation annuelle d'une exploitation en Bourgogne. Les pneumatiques sont les plus gourmands. © C. THIRIET

LA PULVÉRISATION REPRÉSENTE 30 % de la consommation annuelle d'une exploitation en Bourgogne. Les pneumatiques sont les plus gourmands. © C. THIRIET

Avec un prix moyen flirtant avec la valeur symbolique d'un euro le litre, le gazole non routier (GNR) représente une réelle charge. Depuis 2007, celle-ci a augmenté de près de 1 500 euros par an pour une exploitation bourguignonne de 20 ha, selon une étude de la Fédération régionale des Cuma, de Vinipôle sud Bourgogne et des chambres d'agriculture.

Vu l'importance de ce poste de dépense, ces organismes ont décidé de l'analyser en détail. L'an dernier, ils ont réalisé une enquête auprès de 71 exploitations et équipé un tracteur de la Cuma de Lugny (Saône-et-Loire) d'un débimètre pour mesurer la consommation à tout instant. Ils viennent de diffuser les premiers résultats de leur travail.

Les exploitations enquêtées cultivent toutes des vignes étroites avec un enjambeur. En moyenne, leur consommation de carburant s'élève 265 litres de GNR par ha et par an. Mais pour la moitié des viticulteurs audités, elle varie entre 170 et 357 l/ha/an. Le sommet atteint 600 l/ha/an, soit sept fois plus que la meilleure performance, à 84 l/ha/an. L'enquête n'en étant qu'à ses débuts, les raisons de ces variations ne sont pas détaillées.

Cinq chantiers ont été passés au crible : désherbage chimique, travail du sol, pulvérisation, fertilisation et effeuillage. Sur une année, la pulvérisation arrive en tête, suivie de l'effeuillage et du travail du sol. Elle représente jusqu'à 30 % de la consommation annuelle des exploitations. Cela tient au nombre important d'interventions réalisées durant la dernière campagne.

En toute logique, les pulvés pneumatiques avec des descentes face par face dans le rang sont les plus gourmands, consommant 12,6 l/ha (soit 18,2 l/h). Ces matériels sont les plus gros consommateurs de puissance pour des débits de chantier au mieux similaires, sinon inférieurs, aux voûtes et aux canons. Difficile néanmoins d'en contester l'intérêt puisqu'ils offrent aussi la meilleure qualité de pulvérisation. À noter que le débit de chantier se situe en moyenne à 1,6 ha/h pour la pulvérisation.

Ramenés à l'hectare parcouru, l'effeuillage et le travail du sol sont les interventions qui brûlent le plus de gazole. Pour le travail du sol, l'enquête observe qu'il faut en moyenne 22,4 l/ha de carburant et 27,8 l/ha pour l'effeuillage. Point commun entre ces deux chantiers : ils sont à très faible débit. Un vigneron entretient 0,2 ha/h lorsqu'il travaille le sol et effeuille 0,3 ha/h.

Concernant le travail du sol, des différences très importantes apparaissent selon les équipements. Avec un cultivateur travaillant uniquement l'interrang, la consommation s'élève à 15,3 l/ha (soit 2,7 l/h). Chez les vignerons équipés en plus d'interceps à lames, elle monte à 21,6 l/ha (5,1 l/h). Et avec des interceps rotatifs, elle culmine à 63,2 l/ha (8,2 l/h). Le travail intégral du sol s'avère donc énergivore.

Dans le même temps, le désherbage chimique absorbe en moyenne 5,7 l/ha pour un débit de chantier de 1,4 ha/h. Quant à la fertilisation, 11 litres sont nécessaires pour un hectare (11,9 l/ha pour 1,1 ha/h).

La puissance de traction disponible lors de ces travaux est importante et peu valorisée : 208 ch/min pour l'effeuillage et 130 ch/min pour le travail du sol, par exemple. En conséquence, les taux de charge des moteurs sont faibles : respectivement 24 et 23,9 % pour les mêmes travaux. Les viticulteurs pourraient donc employer des engins moins puissants.

Grâce au testeur de consommation en continu installé sur un tracteur de 115 ch de la Cuma de Lugny, les enquêteurs ont également mesuré la consommation lors des déplacements. Là encore, les chiffres sont élevés. Avec une moyenne de 13,4 l/h, la consommation atteint 67,8 l aux 100 km. Les exploitations ayant des parcelles très éloignées « peuvent étudier le coût que représente le transport de l'enjambeur ou avoir un autre lieu de stockage de matériel », préconise déjà Jérémy Nobs, conseiller agroéquipement à la chambre d'agriculture de Côte-d'Or. L'enquête doit encore durer deux ans, au terme desquels ses auteurs émettront des conseils pour faire des économies.

BERNARD CHEVALIER, VITICULTEUR SUR 8 HA À MONTBELLET (SAÔNE-ET-LOIRE), MEMBRE DE LA CUMA DE LUGNY « Besoin d'économies »

 © C. MICHELIN

© C. MICHELIN

« La viticulture de Bourgogne se pose beaucoup de questions sur les charges d'exploitation. À la Cuma de Lugny, nous consommons 90 000 litres de GNR par an pour une vingtaine d'exploitations. Sur mon exploitation de 8 ha, j'utilise environ 3 000 l/an, hors vendanges (15 à 17 l/h et 3 h/ha). La consommation de carburant est de plus en plus conséquente, notamment celle des tracteurs hydrostatiques qui mangent de la puissance lors des sulfatages et des gros travaux. Si les constructeurs ressortaient des tracteurs comme ceux d'il y a vingt ans, ils les vendraient, même s'ils sont moins confortables que les modèles d'aujourd'hui, car nous avons besoin de faire des économies. »

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