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VIGNE

Un outil simple de diagnosti c du sol

ADÈLE ARNAUD - La vigne - n°266 - juillet 2014 - page 32

En agronomie, la simplicité revient avec le « test bêche » qui consiste à évaluer la porosité d'un sol par l'observation d'une bêchée. De nouveaux tests sont à l'étude pour évaluer l'activité biologique des sols.
1. CONSTATER LA TENUE du bloc de sol sur la bêche et la bâche. © L. FOURRIE

1. CONSTATER LA TENUE du bloc de sol sur la bêche et la bâche. © L. FOURRIE

2. OBSERVER L'ASSEMBLAGE des mottes.

2. OBSERVER L'ASSEMBLAGE des mottes.

3. APPRÉCIER l'état interne des mottes.

3. APPRÉCIER l'état interne des mottes.

4. ÉVALUER LA PROPORTION de chaque type de mottes, de cailloux et de terre fine.

4. ÉVALUER LA PROPORTION de chaque type de mottes, de cailloux et de terre fine.

Le test bêche est un outil de terrain simple et peu destructif pour diagnostiquer la structure du sol sur les premiers horizons travaillés. Il permet au viticulteur de mieux appréhender la circulation de l'eau et de l'air dans les sols et d'évaluer l'impact d'un itinéraire cultural. Pour le réaliser, seules une bêche et une bâche sont nécessaires.

Les conditions d'humidité sont en revanche un élément clé pour une bonne interprétation. Le sol ne doit être ni trop sec (auquel cas il est impossible de creuser), ni trop gorgé d'eau (où il est alors impossible d'observer).

Le test bêche se réalise en plusieurs étapes. Voici le protocole proposé par Joséphine Peigné et Jean-François Vian, enseignants chercheurs en agronomie et écologie des sols à l'école d'ingénieur en agronomie agroalimentaire de l'Isara Lyon (Rhône).

Pour commencer, Jean-François Vian recommande de réaliser une prétranchée de la largeur d'une bêche afin de faciliter le dégagement du bloc de sol que l'on va observer. Avant d'extraire ce bloc, le spécialiste conseille d'en découper les côtés avec la bêche. On opère ensuite comme si l'on bêchait. La bêchée doit être la plus profonde possible (20 à 40 cm) et d'une largeur et d'une épaisseur d'environ 20 cm. Dans les sols caillouteux, il est possible de remplacer la bêche par une fourche bêche.

Dès lors, le diagnostic commence. On observe tout d'abord la tenue du bloc de sol sur la bêche. S'il se désagrège directement, le sol présente alors une structure très aérée, dite ouverte.

Dans de nombreux cas toutefois, le bloc tient sur la bêche. On le dispose alors sur une bâche afin d'observer comment les mottes qui le composent s'assemblent. « Plus le sol est massif et plus il se désagrège difficilement, plus la porosité d'assemblage est faible », commente Jean-François Vian. Cela se traduit agronomiquement par une mauvaise circulation de l'eau et un frein à l'enracinement des cultures en profondeur. Au contraire, si le sol se désagrège très facilement ou sous une légère pression, sa structure est dite ouverte ou continue. Il est alors favorable à une bonne activité biologique et au bon développement des cultures. Plus il y a de terre fine par rapport aux mottes, meilleure est la porosité du sol, et donc sa structure.

Les observations qui suivent portent sur les mottes elles-mêmes. Les unes présentent une surface rugueuse et grumeleuse. On y distingue beaucoup de porosité à l'oeil nu, souvent des racines et des galeries de vers de terre. Plus on dénombre de mottes de ce type, meilleure est la porosité et donc la structure du sol. Jean-François Vian les appelle les mottes « gamma ». À l'opposé, on trouve des mottes tassées, à la surface lisse et plane. Elles ne présentent pas de porosité visible à l'oeil. Leur présence révèle un sol très compacté. Elles sont appelées « delta ». Entre ces extrêmes, on trouve des mottes présentant une surface plutôt lisse, mais avec quelques racines et/ou galeries de vers de terre.

Pour interpréter ces observations, Jean-François Vian conseille de « croiser le mode d'assemblage des mottes et leur état interne. On peut alors donner une note de tassement au sol de sa parcelle. Cette note varie de 1 à 5. Une note de 1 indique une structure du sol favorable à la circulation de l'eau, des gaz, à l'enracinement et à la nutrition des cultures, tandis qu'une note de 5 révèle une structure très tassée pouvant compromettre la nutrition des cultures. À partir de 3, des actions correctives peuvent être envisagées, comme un travail mécanique du sol pour recréer de la porosité. L'entretien de la structure peut ensuite se faire via un apport d'amendement organique et par la mise en place d'un enherbement ».

L'enseignant chercheur souligne également que « d'autres observations peuvent être couplées au test bêche, comme une estimation de la densité et de la profondeur d'enracinement ». Dans un sol bien structuré, les racines ont tendance à se développer en profondeur et leur densité peut être importante. « Enfin, l'observation de la surface du sol peut renseigner sur la sensibilité du sol à la battance ou le pourcentage de cailloux peut donner des indications sur la taille du réservoir en eau et éléments minéraux du sol. » Plus il y a de cailloux et plus ce réservoir est réduit. En revanche, les cailloux jouent un rôle dans la résistance au tassement et améliorent l'infiltration de l'eau.

Le test bêche peut être réalisé toute l'année. « Il permet de caractériser rapidement la structure d'un sol et donc d'évaluer l'impact de ses interventions. On peut alors décider des opérations à réaliser », conseille Jean-François Vian.

Ce test doit être répété trois à quatre fois dans une zone représentative et homogène de la parcelle. Il s'agit du minimum requis afin d'obtenir des résultats fiables et significatifs. Si la parcelle présente une grande hétérogénéité, il faut identifier les différentes zones qui la composent. Le test pourra révéler les différentes organisations structurales au sein de la parcelle. Il faut compter environ dix minutes pour réaliser un test bêche complet. Une fiche technique est disponible sur le site de l'Itab.

Connaître la vitesse de dégradation de la matière organique

Dans les pays anglo-saxons, l'utilisation de litterbags (sacs à déchets) se développe pour estimer l'activité biologique d'un sol. Il s'agit de sacs ajourés dans lesquels on enferme une quantité connue de matière organique (quelques grammes de feuilles mortes par exemple) puis que l'on enfouit dans les premiers centimètres du sol. Quelques mois plus tard, ils sont récupérés pour peser leur contenu. La simple perte de poids permet alors de quantifier la vitesse de dégradation de la matière organique. La taille des mailles est choisie en fonction de ce que l'on souhaite observer. Inférieures à 2 mm, elles renseignent sur l'activité de la microfaune et mésofaune. Plus larges, elles intègrent l'activité des vers de terre et autres larves. L'Esa d'Angers (Maine-et-Loire) travaille sur cette méthode afin de proposer un référentiel propre à l'agriculture (projet Agrinnov).

Les nématodes dévoilent les sols vivants

Le laboratoire Elisol Environnement, à Montpellier (Hérault), évalue le fonctionnement biologique des sols en faisant l'inventaire des nématodes qui s'y trouvent. Ces minuscules vers sont en effet d'une extrême diversité du point de vue de leur alimentation. Ils peuvent être fongivores, bactériophages, phytophages, carnivores (consommant d'autres nématodes) ou omnivores. Une forte présence de nématodes fongivores et bactériophages dans un sol traduit une bonne dynamique de la matière organique et du recyclage des nutriments. Une faible présence de nématodes carnivores et omnivores renseigne sur d'éventuelles perturbations chimiques ou physiques. Partant de ces constats, le laboratoire a mis en place des indices permettant de caractériser l'état d'un sol et son fonctionnement biologique. Un échantillon de 250 grammes, réalisé à partir de plusieurs carottes de sol, suffit pour réaliser l'analyse. Son coût est de 250 euros.

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