Période : du XVIIe siècle à aujourd'hui Lieux : Beaune (Côte-d'Or) Champy, doyenne des maisons de Bourgogne

Né en 1720, Champy est le plus ancien négoce de vins bourguignon. Multipliant les voyages d'affaires, trois générations de Claude Champy ont été les artisans majeurs de son développement.

« C'est à Beaune, haut lieu culturel et coeur de la Bourgogne viticole, que le commerce de vins est né. Les Champy furent les premiers à l'organiser et à le développer », racontent volontiers les représentants de la plus ancienne maison de vins bourguignonne.

Ses archives attestent de la présence à Beaune (Côte-d'Or) dès le XVIIe siècle, en 1682, d'un certain Zacharie Champy, maître compagnon tonnelier. Ses descendants exercent la profession de courtiers-gourmets avant de se lancer dans le négoce de vins. « La première mention d'un commerce de vins enregistré à Beaune date de 1720. Celui-ci fut créé par Edme Champy », relate un document interne retraçant l'histoire de la maison. Par la suite, le fils, le petit-fils et l'arrière-petits-fils, tous prénommés Claude, vont développer l'affaire.

À l'époque du fondateur, comme le rappelle le document, « les crus étaient principalement la propriété des nombreuses et puissantes congrégations religieuses implantées dans la région : abbaye Cîteaux, évêchés de Langres et d'Autun, abbaye Saint-Vivant, de Cluny, etc., ou encore de grandes familles de l'aristocratie détenant titres et terres dans l'ancien fief des ducs de Bourgogne ».

Après la Révolution, tout change : les valeurs morales, le calendrier, les classes sociales et bien sûr la clientèle. De nouveaux noms apparaissent dans les livres des comptes. « Pour qui n'est pas aristocrate, la période est propice aux achats et aux transferts de propriété. Les domaines détenus par l'Église et la noblesse tombent dans les mains d'une nouvelle classe qui prospère et s'épanouit : la bourgeoisie. Les Champy en font partie. » Au fil des ans, Claude achète de petites parcelles de vigne pour un total de 6,5 hectares dont 2,5 de clos-vougeot, en 1809. Les Champy sélectionnent les vins chez les propriétaires pour les élever. Ils effectuent leurs achats juste après la récolte, paient comptant la moitié des sommes dues et règlent l'autre moitié en février, le jour de la fête du mardi gras.

Tout comme son père l'avait fait avant lui, Claude Champy le troisième, né en 1797, développe les ventes dans l'Est de la France et les Flandres en recrutant des agents commerciaux. Ces équipes prospectent avec succès toutes les régions jusqu'au moindre « petits pays » de la future Belgique. Déjà amateurs de vin, les habitants de ces contrées en achètent beaucoup et Claude Champy sait leur faire apprécier ses bourgognes.

« Chaque année, il part en calèche et escorte de lourds chariots attelés de huit chevaux conduits par des rouliers belges, indique le document. Ces chariots, chargés de vin, étaient acheminés vers les Flandres, région qui devient son principal marché. Les clients sont des industriels mais aussi la communauté ecclésiastique. Conformément aux usages en vigueur, les clients payent leurs achats un an après, lors de la tournée suivante. » Les livraisons ont lieu en novembre avant les grands froids et en mars avant les grandes chaleurs.

À partir de 1850, Claude Champy prospecte par-delà les mers. « La maison est présente partout dans le monde à l'époque des grandes expositions universelles et jouit d'une notoriété indiscutée. » En outre, elle mène des expérimentations avant-gardistes pour améliorer les vins sous l'ingénieuse supervision du savant et maire de Beaune, Alfred Vergnette de Lamotte. Elle s'équipe de matériels performants, comme des générateurs de vapeur Houdard spécialement adaptés pour chauffer les vins en vue de les conserver. Et assure ses approvisionnements dans les grands crus : « Les dirigeants sauront obtenir des contrats de quinze ans renouvelables auprès des plus importants producteurs de raisins de qualité. » Ils vinifieront et élèveront ces récoltes au coeur de Beaune.

À sa mort en 1879, Claude Champy le troisième laisse une maison solide. Ses gendres puis descendants reprennent le flambeau. En 1990, elle est rachetée par Pierre Beuchet, PDG de la société de distribution de vins Diva, et par la famille Meurgey. Depuis le 31 décembre 2013, Pierre Beuchet a repris la main. La maison exploite aujourd'hui 29 hectares et commercialise 500 000 bouteilles de cinquante appellations bourguignonnes dont une vingtaine de premiers et grands crus. La plus ancienne maison de Bourgogne a toujours une belle notoriété.